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Une littérature économique récente questionne l’impact de la troisième révolution industrielle – marquée par la pénétration des ordinateurs, de l’Internet et des téléphones portables – sur la productivité du travail et l’emploi. A partir de cette littérature, cette note dresse aperçu des perspectives de la révolution numérique en termes de création d’emploi en Afrique subsaharienne.

S’il est trop tôt pour faire le bilan de la contribution de l’Internet à la croissance de long terme en Afrique subsaharienne (ASS), plusieurs études laissent entrevoir son potentiel et ses limites en matière de création d’emploi. Les enseignements de littérature théorique et empirique sur le lien entre changement technologique et emploi dans les pays industrialisés et en développement (Gordon, 2012 ; Stanley et al, 2018 ; Niebel, 2018 ; Cariolle et al. 2018), ainsi que les quelques (et rares) études empiriques sur l’impact des NTIC en Afrique sub-saharienne (Ndulu, 2006 ; Aker and Mbiti, 2010), permettent de comprendre les enjeux de l’expansion de l’économie numérique pour le marché de l’emploi et pour la réduction de la pauvreté dans la région (Banque Mondiale, 2016 ; Hjort et Poulsen, 2017).

La révolution numérique

En contribuant à l’émergence et la diffusion des innovations dans le commerce, l’agriculture, l’éducation les services financiers, ou le transport, et à la modernisation des administrations publiques (notamment fiscales), la numérisation de l’économie serait en passe de révolutionner les échanges économiques et de stimuler la croissance, l’emploi et la réduction de la pauvreté (Banque Mondiale, 2016 ; Aker and Mbiti, 2010).

Cependant, les dividendes attendus des technologies numériques en Afrique sub-Saharienne (ASS), notamment en termes de croissance et d’emploi, tardent à se concrétiser et à bénéficier à l’ensemble de la population (Banque Mondiale, 2016), en raison du fort déficit en infrastructure de télécommunication (Ndulu, 2006 ; Schuman et Kende, 2013 ; Bates, 2014 ; Cariolle, 2018) et de l’insuffisance des régulations du secteur des télécommunications (Wallsten, 2005 ; Buys et al, 2009 ; Sutherland, 2014). A l’inverse de l’Asie, de l’Amérique du Sud et l’Afrique du Nord, qui ont été rapidement connectées par câble sous-marin (CSM) de télécommunication aux pays du Nord, l’Afrique subsaharienne est restée relativement isolée de l’Internet mondial jusqu’en 2010. Depuis lors, l’infrastructure maritime internationale s’est rapidement déployée, facilitant l’accès et réduisant le coût de l’internet haut-débit et des services de téléphonie mobile dans la région (Sutherland, 2014 ; Cariolle, 2018).