Partager

une-130.jpgLes rôtisseurs lui expliquaient que l’affaire de viande de chien est devenue compliquée, qu’aucun chien ne voulait se laisser manger puisqu’aucun ne mourait ni par maladie, ni par accident, genre voiture ou coups de gourdin. Tieuvel résolut donc de faire les villages autour de Ouaga où il espérait tomber sur un marché où quelques chiens miséreux seraient venus terminer leur parcours terrestre sur l’étal d’un rôtisseur.

Ce fut en ce moment qu’il pensa à Attala, sa cousine, conseillère municipale dans leur province. Attala avait l’habitude d’organiser ce genre de fête ; elle devrait normalement connaitre bien de tueurs, de rôtisseurs, ou de démarcheurs de chiens à abattre. Il l’appela. Le lendemain elle le rappela pour lui annoncer que le problème était réglé et que son type lui promettait six chiens. Dans sa langue Tieuvel remercia le ciel et s’en fut, rassuré du succès inédit que rencontrerait sa fête.

La veille du « dassandaga » dans l’après-midi, la cousine Attala l’appela. A son timbre, il comprit qu’un malheur est arrivé ; et de fait, elle lui expliquait que son type lui a raconté une histoire de son papa ou de sa maman qui a fait quoi et comment. Bref, que son type ne pourrait plus leur apporter le moindre chiot. Elle était déçue. Tieuvel resta sans voix. Toute la publicité faite autour de ces six chiens… ils seront nombreux, les mécontents.

Restée seule, la conseillère Attala se désolait en pensant à sa part de responsabilité dans ce qui arrive à Tieuvel. C’est elle qui lui avait dit de ne plus chercher car elle avait trouvé six chiens, et voici que maintenant… C’est alors qu’elle pensa à son chien, à son vieux chien qui coulait sa vieillesse couché à l’ombre des plantes de la cour. Elle se leva. Il y était.

La conseillère se dit : « pourquoi pas ? » Le meurtre du chien venait ainsi d’être arrêté. Il n’est pas dit que Tieuvel n’offrira pas du chien à ses invités. Elle fit séance tenante ce qu’elle devait faire pour que le vieux chien se transforma en viande froide. Elle téléphona à Tieuval pour lui annoncer la nouvelle et termina par ce qui aurait pu être une oraison funèbre pour le chien : « Il était vieux mais il est gros hein ! »

Voici comment Médor est mort d’une mort qui n’était pas sa mort !

Sacré Chédou OUEDRAOGO

Sidwaya du 19 août 2008