Partager

L’intention serait certes louable et saluée par tous si les motivations réelles du pouvoir en place étaient de rendre, enfin, justice en faisant instruire des affaires aussi graves ; car cela aura le mérite de faire condamner des coupables et de faire acquitter des innocents.

Dans ce cas, les autorités se doivent d’apporter tout leur soutien et d’accorder une indépendance absolue aux femmes et hommes, les magistrats, qui seront chargés d’instruire les différents dossiers. Cela est nécessaire car, jusque là, la justice est considérée comme étant le maillon le plus faible de la démocratie et de l’Etat de droit.

Il convient donc au pouvoir de laisser faire ces magistrats tout en veillant à ce que le droit soit dit et la loi appliquée. Mais l’intention serait détestable si les motivations n’étaient, comme le pensent certains, que de basses manœuvres. En ce cas, les sanctions qui résulteront des instructions, même si elles étaient largement justifiées et méritées, seraient entachées d’irrégularités et n’auraient pas l’effet souhaité.

Cependant dans les deux cas ce serait un bénéfice pour le pays, les finances publiques et la morale sociale. Car la corruption est un fléau qui ne cesse de prendre des proportions dramatiques. L’ignorer est suicidaire pour tous, notamment pour le développement social et économique.

Qu’est ce que la corruption?

Le mot corruption pourrait avoir plusieurs sens selon le dictionnaire anglais d’Oxford. Il peut désigner un phénomène matériel lorsqu’il s’agit de la destruction ou de la dégradation de quelque chose, notamment par la désintégration ou la décomposition malsaine et répugnante de cette chose.

Il peut également concerner le domaine moral lorsqu’il vise la perversion ou la dénaturation de l’intégrité dans l’exercice des fonctions publiques par l’emploi de pots-de-vin ou de faveur ou par l’utilisation ou la réalisation de manœuvres frauduleuses.

Quant à la Banque mondiale et à certaines institutions, elles définissent la corruption comme étant l’abus d’une fonction publique pour obtenir un gain privé. Cela implique la recherche ou l’exigence de promesse, l’obtention d’un don ou de tout autre avantage par un agent public, en contrepartie de la réalisation ou de l’omission d’un acte, et ce, en violation des devoirs qui lui sont imposés par sa fonction. Cela peut aussi impliquer l’extorsion de fonds ou le vol, par un agent de l’Etat, de sommes dues ou destinées aux caisses publiques.

On peut également percevoir le phénomène de corruption dans le contexte politique, lorsque, par exemple, des opérateurs économiques offrent de l’argent aux partis politiques et/ou à leurs candidats en contrepartie de décisions, mesures favorables ou marchés publics au cas où ces partis ou candidats seraient élus et viendraient au pouvoir.

Comme un cancer…

La corruption et les pratiques de corruption ont des effets nuisibles et dévastateurs qui ne connaissent pas de limites. Ici au Mali, elles ont eu et continuent à avoir des conséquences désastreuses pour l’économie et la détérioration du tissu social. En effet, la corruption engendre des coûts économiques exorbitants, fausse les mécanismes du marché, ralentit le développement économique et social, détruit les capacités des Institutions et de l’Administration à rendre à la société les biens et services que celle-ci attend.

La corruption nuit également aux efforts qui sont entrepris pour lutter contre la pauvreté, non seulement en ce qui concerne les initiatives nationales et locales, mais aussi en ce qui concerne les partenaires bi et multilatéraux qui sont de plus en plus réticents à donner des fonds voués à être détournés de leur objectif. Contribuant ainsi à la constitution d’une classe de nouveaux riches qui se développe grâce à la corruption, au détriment du développement national global. La corruption, comme on peut le constater, est comme un cancer généralisé qui a développé ses métastases dans tous les secteurs de la vie.

Car il serait faux de croire que la corruption n’est le fait que des agents publics. Si l’Etat est menacé essentiellement dans ses pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, la nation l’est également à tous les niveaux. Les pratiques de corruption sont régulièrement rapportées sur la place publique par ce qu’il est convenu d’appeler le quatrième pouvoir ou le contre pouvoir, c’est à dire la presse. Pourtant, à l’analyse ce contre pouvoir non plus n’échappe pas au phénomène.

Toujours dans le cadre des pratiques de corruption au niveau du privé, on ne doit aucunement perdre de vue que s’il y a des fonctionnaires corrompus c’est parce qu’il y a des corrupteurs ;or ceux-ci proviennent le plus souvent du secteur privé.
Reste maintenant à voir et à appliquer les mécanismes de prévention et de répression de la corruption et de ses pratiques. Nous y reviendrons.

Ch. A Tandina – 10 Mars 2005