Après quelques mois d’accalmie, la tension a repris de plus belle entre les familles Traoré de Kourousalé et le chef de village Amadou Kéïta. Celui-ci, qui ne voulait pas voir les Traoré participer à la pêche collective du village la semaine dernière n’a pas hésité à les confiner chez eux. Aussi, vient-il de leur interdire, depuis 4 jours des biens publics comme les fontaines, le marché et même l’école. Comme si tout cela ne suffisait pas, certains d’entre eux ont été attachés, déshabillés avant d’être passés à tabac sur la place publique.
La chasse ouverte aux familles Traoré dans le Mandé profond que nous avions évoquée dans l’Indépendant N°2181 du 9 avril 2009 vient de ressurgir.
En effet, cela fait bon nombre d’années que les familles Traoré de Kourousalé au nombre de sept cohabitent péniblement avec les autochtones de la localité qui détiennent la chefferie. Et la dispute est partie d’un malentendu autour de 40 hectares au bord du fleuve Djoliba, que le chef de village entend retirer aux Traoré.
Une décision à laquelle ceux-ci n’entendent pas obéir. Dès lors une véritable chasse aux sorcières a été lancée en 2009 contre les membres de cette famille.
Ces affrontements s’étaient soldés par de nombreux blessés et l’interpellation du chef de village de Kourousalé à la Brigade territoriale de la gendarmerie de Bamako. Après une accalmie suite aux médiations des griots du Mandé et du président du Haut conseil islamique, l’imam Mahmoud Dicko, les deux communautés vivaient dans une atmosphère de ni guerre ni paix.
Mais il suffisait d’une étincelle pour mettre le feu aux poudres entre les deux parties. Et ce qui devait arriver, arriva la semaine dernière suite à l’éviction des familles Traoré des lieux de la pêche collective du village. Une éviction soldée par leur passage à tabac, et le retrait de leurs filets. Pour l’une des victimes, Abdou Traoré, tout était planifié à l’avance par le chef de village lui-même.
» A la veille de cette pêche, il nous a envoyé un émissaire en nous informant que nous sommes indésirables sur les lieux. Alors que nous participons à cette pêche depuis plus de 150 ans. Donc nous n’avons pas obéi à ses ordres. Et lorsque nous nous sommes rendus au marigot, ils ont confisqué tous nos filets avant de nous passer à tabac « , regrette Abdou Traoré.
Comme si tout cela ne suffisait pas, ces familles Traoré ont été assiégées durant tout le week-end dernier et ce confinement a continué jusqu’ hier lundi 26 avril. Sur place, ils sont interdits de se servir de l’eau des fontaines publiques, de se rendre au marché, leurs puits ont été obstrués. Certains d’entre eux ont été déshabillés sur la place publique avant d’être ligotés.
» Nous ne savons plus à quel saint se vouer. Nous sommes agressés à longueur de journée devant les forces de l’ordre qui ne pipent mot « , ajoute la même source.
La situation à Kourousalé exige que les plus hautes autorités s’impliquent davantage pour régler définitivement ce bras de fer dont nul ne sait l’issue. Car un proche Conseiller du chef de village avait,auparavant, laissé entendre que « les familles Traoré ont le choix de respecter les ordres du chef de village ou de quitter la localité « .
Kassim TRAORE
27 Avril 2010.