Partager

Chez nous, depuis son arrivée au pouvoir, Amadou Toumani Touré n’a pas caché son envie d’en découdre avec les corrompus, les corrupteurs leurs complices, ainsi que tous ceux confondus de détournement de deniers publics. ATT a affiché sa volonté de faire de la lutte contre la corruption et la délinquance financière une des priorités de son mandat.

Au dispositif (ancien), déjà en place, est venu se greffer un dispositif (permanent), censé apporter plus d’intensité à la lutte. Le bureau de vérificateur général, sous la forme d’une automitrailleuse, s’est ajouté aux armes légères comme la CASCA (Cellule d’appui aux structures le contrôle de l’administration), le contrôle général d’État et les autres structures de contrôle.

Cependant, force est d’admettre l’existence de failles au sein du dispositif en place. Maillon essentiel de la lutte, la justice représente, à elle seule, plus de 60% des forces engagées dans la lutte. Et pourtant, l’on a comme l’impression que la justice malienne reste en marge du théâtre des opérations. Et effet, sur 131 dossiers de corruption qu’elle a reçu de la CASCA, seuls deux ont fait l’objet de jugement. Quant aux autres dossiers, ils se divisent en deux catégories : ceux en instruction et ceux classés sans suite.

Toutefois, un troisième lot pourrait exister, il s’agit de celui des dossiers «portés disparus». En effet, il semble qu’à présent certains dossiers n’ont ni été jugés, ni en voie d’instruction, ni classés. Où sont ils ? Des interrogations demeurent. Des doigts sont pointés sur le parquet et la Brigade économique et financière. Certains gros bonnets de la République bénéficieraient d’une protection en béton à ces deux endroits, malgré la détermination du chef de l’État et ses instructions pour intensifier la lutte sur tous les fronts et à tous les niveaux.

Sinon comment comprendre que des dossiers transmis en même temps au parquet fassent l’objet d’une sélection ? Comment expliquer que certains dossiers transmis en juin 2004 par la CASCA à la justice soient instruits avant d’autres dossiers transmis depuis mai 2003 ? Qui veut enterrer quoi ?

Dans la République, y a-t-il alors une justice à double vitesse ? Une pour les faibles et l’autre pour les puissants ? Dans ce cas, il faut craindre un fiasco au bout du compte.

C.H. Sylla

16 Mars 2005