Pour bouter la poliomyélite hors d’Afrique, une campagne de vaccination est en cours. Entamées le 6 Mars, ces journées nationales de vaccination prennent fin le 9 Mars. Mais pour ce qui concerne ce premier passage de la campagne au Mali, certains faits et actes laissent penser à une négligence ou une tentative de sabotage à tous les niveaux, y compris au niveau du département de la Santé. Comment et pourquoi ?
Les Maires ont-ils boudé ?
En vue d’accélérer l’atteinte de l’objectif d’éradication de la poliomyélite, le Ministère de la Santé et ses partenaires organisent des journées nationales de vaccination sur toute l’étendue du territoire national les 6, 7, 8 et 9 Mars 2010. La présente campagne se fait en synchronisation avec 17 pays africains, dont 14 en Afrique de l’Ouest et 3 en Afrique Centrale.
Elle vise à stopper la propagation du virus au Mali, dans la sous-région et en Afrique.
Le premier passage prévu les 6, 7, 8 et 9 Mars 2010 se fait de porte en porte. Pour ce faire, les parents se doivent de garder, à la maison, leurs enfants âgés de 0 à 5 ans, y compris ceux déjà vaccinés, pour les faire vacciner contre la polio.
Ainsi, pour parvenir à un bon déroulement du premier passage de ces JNV, une réunion s’est tenue vendredi dernier, à 10 h, au Gouvernorat du District de Bamako. Cette rencontre avait pour but de réunir, autour du Gouverneur, les responsables sanitaires du District et les Maires des six Communes de Bamako. La présence des Maires s’explique par le fait que la campagne se déroule sur leurs territoires respectifs.
Cependant, seuls les responsables des structures sanitaires ont répondu présents à cette réunion. Mais aucun Maire n’a ni fait le déplacement, ni envoyé son représentant. Or, à pareille occasion, on compte sur eux pour véhiculer le message auprès des Chefs de quartier et les Imams.
Ces derniers, à leur tour, donnent l’information aux parents pour qu’ils gardent leurs enfants à la maison. Car les vaccinateurs doivent faire du porte-à-porte.
Pourquoi les Maires des Communes de Bamako ont-ils brillé par leur absence, lors de cette rencontre tenue juste à la veille des JNV?
Après avoir travaillé sur le dossier avec les responsables des centres de référence repartis entre les six Communes de la capitale, les chefs des exécutifs municipaux ont-ils jugé nécessaire de ne plus prendre part à cette réunion au Gouvernorat? Ou alors, les Maires n’avaient-ils pas été informés à temps? Autrement dit, devait-on les convoquer pour les informer par rapport à une activité qui débutera le lendemain dans leurs Communes?
Le Ministre interpellé
Si l’absence des Maires à cette réunion est comprise par certains comme étant la preuve de leur désintérêt pour la bonne tenue de cette campagne, il n’en demeure pas moins que le comportement de l’autorité de tutelle est compris. En effet, pour les JNV dans le District, les vaccins sont déposés à la Direction régionale de la santé. C’est de là qu’ils sont acheminés vers les Centres de Santé Communautaires (CSCOM), via les CSREF. C’est là où les vaccinateurs viennent s’approvisionner pour faire le porte-à-porte. La capitale compte une cinquantaine de CSCOM.
Pour la présente campagne, des difficultés ont été enregistrées, semble-t-il, dans le transport des vaccins de la Direction régionale du District vers le terrain. Selon nos informations, seule l’OMS a mis la main à la poche en donnant quatorze tickets de carburant. Il s’agit des tickets de 5 000 FCFA de la station service Total-Mali. Et les mêmes sources, d’ajouter que le Ministère de la Santé, principal organisateur de la campagne, n’a osé donner ni du carburant, ni de l’argent destiné à son achat.
Et pourtant, cette activité n’est pas imprévue. Dans la politique sanitaire du pays, des JNV sont toujours programmées. C’est pourquoi un chapitre budgétaire existe après un budget-plan soumis au département de tutelle. Comment se peut-il que les agents chargés de la mise en place des vaccins sur le terrain se contentent de tickets de carburant offerts par l’OMS ? Où est donc passé le Ministre Oumar Ibrahima Touré ?
Des résultats contestables?
Ce premier passage des JNV risque de donner des résultats qui ne reflèteraient pas la réalité sur le terrain, à cause de la méthode utilisée qu’est le porte-à-porte. En effet, les agents vaccinateurs ont en main des documents qui prévoient le quota d’enfants à vacciner. Chaque fois qu’ils vaccinent un enfant, ils cochent. Mais le porte-à-porte peut présenter des dangers.
Il fait actuellement très chaud dans la capitale. A partir de 12 h, la chaleur devient insupportable. Qui sait si des vaccinateurs, pour ne pas affronter la canicule, ne vont pas s’asseoir quelque part, pour cocher tout le document, puis le déposer à la descente ?
Si c’était le cas, personne ne pourrait dire qu’ils n’ont pas travaillé. Or le document en est la preuve, et personne ne pourrait dire le contraire. Sur cette base, on élaborera des statistiques dont la fiabilité reste à vérifier. Pis, certains vaccinateurs ne sont pas bien formés. Pour preuve, dans certaines familles, ils se contentent de demander s’il n’y avait pas d’enfants, sans pourtant préciser qu’ils sont là pour la vaccination. Dans d’autres cas, ils ne précisent pas la tranche d’âge exigée.
C’est pourquoi des parents, qui ne sont pas au courant des JNV, refusent de coopérer. Même si après avoir eu la bonne information, des chefs de famille amènent leurs enfants vers les vaccinateurs. Alors, au lieu du porte-à-porte, ne fallait-il pas choisir des points fixes de vaccination, toutes choses qui avaient l’avantage d’avoir les vaccinateurs à l’œil et de vacciner correctement le maximum d’enfants ?
Dans tous les cas, la motivation semble beaucoup faire défaut à la campagne des JNV au Mali. Car des vaccinateurs expliquent qu’ils affrontent le chaud soleil pour 2 500 FCFA par jour et par personne.
Est-ce le même taux applicable dans les autres pays concernés par cette campagne de vaccination contre la polio en Afrique ?
Oumar SIDIBE
08 Mars 2010.