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L’émigration clandestine constitue actuellement un sujet de préoccupation entre les pays occidentaux, les pays de transit, et ceux de départ. Les candidats à l’émigration eux, à leur tour, sont assujettis à d’énormes risques, ce qui ne laisse personne indifférent. Cette situation nous a amené à interroger un émigré clandestin qui a échoué à la porte de l’Espagne en 2005. Là, il fut expulsé.

Les difficultés du trajet

Le candidat malheureux du nom de Fodé Mankan Keïta, après son succès au Baccalauréat malien en 2001, fut attiré par le soi-disant Eldorado Européen. Selon M. Keïta depuis Bamako, ceux qui sont les mieux renseignés se dotent des pièces nécessaires (passeport, carnet de vaccination et la carte d’identité), en revanche les sous informés ne prennent que la carte d’identité.

Après Bamako, ils se dirigent vers Gao où ils sont fortement rançonnés par les forces de l’ordre, en l’occurrence les gendarmes et souvent le prix à payer pour chaque candidat s’élève à 10 000 F CFA. Et les récalcitrants sont la cible des mauvais traitements. En plus des forces de l’ordre, les candidats ne sont pas également épargnés par les bandits armés.

Après Gao, ils arrivent à Borche sur le territoire algérien où les candidats déboursent entre 10 000 et 50 000 F CFA. Dans cette ville algérienne, ils obtiennent un cachet d’entrée conditionné à la présentation du passeport, du carnet de vaccination et de la carte d’identité. Après Borche, ils se dirigent vers Tamanrasset où, ils forment deux groupes celui du Maroc et celui de la Libye.


Le chemin de la Libye

M. Keïta dans son explication fera savoir que de Tamanrasset, à la frontière le moyen de transport privilégié est l’avion. Une fois arrivés à la frontière libyenne, ils marchent environ 40 km à pied pour rejoindre la ville frontière. Trajet au cours duquel ils affrontent des tracasseries des forces de l’ordre libyennes et des bandits.

Une fois à l’intérieur de la Libye, dans le but d’acquérir le prix de la traversée, les uns et les autres se mettent sur le marché du travail, la conquête des frais du transport est suivie par le paiement aux “businessmen” des frais d’embarcation vers l’Europe qui varient entre 800 et 1000 euros, soit l’équivalent de plus de 500 000 F CFA.

Ces”busnesmen”, à leur tour, achètent un petit bateau dont la capacité maximum est de 150 personnes en formant parmi les candidats un capitaine qui va diriger l’embarcation. Ensuite, s’ils s’embarquent vers l’Italie et ceux qui ont la chance arrivent aux côtes italiennes où ils sont reçus par les membres de la Croix-Rouge. Après un examen médical de 45 jours, cette étape est suivie de la délivrance d’une carte de séjour.

Mais pour les candidats malheureux, le voyage se termine soit dans un chavirement du navire qui amène immédiatement la disparition des occupants, soit ils sont saisis par les grandes côtes libyennes. En dehors du péril marrain, selon M. Keïta, la traversée du désert est également très fatale aux candidats à cause du manque de nourriture et d’eau.

Le groupe pour le Maroc

Pour rejoindre le Royaume Chérifien, ils s’embarquent à bord des taxis moyennant le paiement de 300 euros. De Tamanrasset, ils se dirigent vers Makaniya, la dernière zone algérienne avant d’atteindre le territoire marocain. Dans cette localité, les émigrés, en fonction de leur nationalité, se regroupant dans les camps.

Ils forment aussitôt deux groupes : ceux qui veulent escalader les grillages des enclaves de Centra et Melila et ceux qui veulent emprunter la voie des pirogues. Les partisans des enclaves marchent plus de 200 km et ce trajet est très périeux, à cause des dangers de la route auxquels s’ajoutent les tirs des forces de l’ordre espagnoles lorsque les candidats essayent de forcer les grillages.

Pour les candidats de la pirogue, de OSDA, ils s’embarquent vers la capitale Rabat en vue de négocier un “passeur” auquel ils payent une somme similaire à celle payée par les candidats pour la Libye. Une fois le marché conclu, ils s’embarquent sur la mer, une aventure qui, le plus souvent, se termine par des échecs avec des risques de nombreuses victimes.

Ce témoignage révèle que l’émigration clandestine est un véritable calvaire pour les candidats.

Mamoutou DIALLO

27 Janvier 2009