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Pour répondre à l’insécurité alimentaire qui menace le Mali, le président de la République, M. Amadou Toumani Touré (ATT), a créé en 2003 le Commissariat à la Sécurité Alimentaire (CSA). Afin de mener à bien ses missions, le CSA fut doté de moyens conséquents, preuve d’une volonté politique affichée du président ATT.

C’est cette volonté politique qui a permis au CSA la création des banques de céréales dans les 703 communes du pays. A côté de ces stocks de proximité, il y a un Stock National de Sécurité Alimentaire (SNSA) et le Stock d’Intervention de l’État (SIE). Si les banques de céréales sont gérées par les collectivités, à travers un comité de gestion de façon transparente, et le SNSA par le gouvernement, tel n’est pas le cas du Stock d’Intervention de l’État.

En effet, Mme Lansry Nana Yaya Haïdara, Commissaire à la Sécurité Alimentaire, fait aujourd’hui une main basse sur le SIE qu’elle gère en sa guise au détriment des couches les plus vulnérables qui sont les seules bénéficiaires.

Comment Mme Lansry gère aujourd’hui le SIE ? Les plus hautes autorités du Mali sont-elles au courant des pratiques malsaines de la patronne du CSA ?
Au-delà du discours officiel tenu par Nana Yaya Haïdara, que faut-il comprendre de l’insécurité alimentaire qui frappe les Maliens et leurs bétails ?

Le discours officiel et la réalité du terrain

La situation alimentaire du pays a été décryptée, analysée lors de la 7ème session du Conseil National de Sécurité Alimentaire, tenue le19 mars 2010 au Centre International de Conférence de Bamako. Ce jour là, il a été constaté que traditionnellement au Mali, la période de récolte (décembre-janvier et février), est considérée comme une période d’abondance. De ce fait, les prix des céréales sèches doivent chuter. Mais exceptionnellement en janvier 2010, donc en début de récolte, les céréales sèches coûtent excessivement chères.

Cette situation est consécutive au déficit pluviométrique, entraînant des ré semis au Sud du Mali, notamment dans la région de Ségou, considérée comme le grenier du pays et dans plusieurs autres localités. Le déficit pluviométrique se traduit toujours par l’insuffisance de pâturage.

C’est pourquoi, sur les 703 du Mali, officiellement, 43 sont menacées de famine. Ces 43 communes en difficulté alimentaire se répartissent entre les régions de Kayes, Tombouctou, Gao et Kidal.
A côté des hommes, les animaux dans les régions du Nord, principalement à Kidal et à Gao, sont menacés de décimation.

La révélation a été faite par Mme Lansry lui-même, lors d’une conférence de presse, tenue le 25 mars dernier dans les locaux de sa structure.
“Il y a aujourd’hui une réelle menace sur les troupeaux dans la région de Kidal, où on peut acheter une vache ou un bœuf à 20 000 F CFA.

Cette situation est due au fait que les animaux sont maigres, faute l’insuffisance de pâturage”, a soutenu Mme Lansry Nana Haïdara.
Malgré ce tableau sombre, les autorités en charge de la sécurité alimentaire, dont Mme Lansry Nana Haïdara, soutiennent que la campagne agricole 2009-2010, est accréditée d’une bonne production même si aucun chiffre n’est avancé pour matérialiser ce résultat.

Ce discours officiel contraste celui des producteurs qui déclarent dans le “Bulletin de Conjoncture” de l’Observateur du Marché Agricole (OMA), que leurs productions de la présente campagne sont inférieures à celles de la campagne écoulée.

En effet, la campagne agricole 2009-2010 a été marquée par une installation plus ou moins tardive des pluies et particulièrement dans les zones pastorales Nord-Est du pays. C’est pratiquement en fin juillet que les pluies se sont généralisées à l’ensemble du pays.

Les mois d’août et septembre ont été assez bien arrosés dans les zones agricoles du pays, occasionnant des cas d’inondations surtout en septembre.
S’agissant des zones pastorales Nord-Est du pays, après le mois d’août suffisamment arrosé, des déficits voire des arrêts de pluies ont été enregistrées à partir de la 2ème décade de septembre.

Au mois de novembre, contre toute attente, de grandes quantités de pluies ont été enregistrées dans certaines zones, provoquant des dégâts sur les récoltes (détérioration de la qualité des graines et des résidus).

Plus de 200 mille Maliens en difficultés alimentaires

Les 23 communes répertoriées comme étant des zones en difficultés alimentaires, comptabilisent 258 088 âmes. Elles sont concentrées dans les régions de Gao (12 communes) et Kidal (11 communes). Les 23 communes sont réparties entre les cercles de Ménaka, Ansongo, Gao et Bourem. Dans ces quatre cercles pour douze communes, 188 025 populations ont des difficultés alimentaires.

Dans la région de Kidal, 70 063 habitants des cercles d’Abeïbara, Tessalit et Tin Essako, repartis entre onze communes, éprouvent de réelles difficultés alimentaires.

A côté de ces communes en difficultés alimentaires, trois communes du cercle de Nara dans la région de Koulikoro, six du cercle de Nioro, dans la région de Kayes, une de Douentza, dans la région de Mopti, cinq du Gourma Rharouss à Tombouctou et cinq de Gao, Ansongo et Bourem dans la Gao, soit 20 au total, ont été classées comme étant des communes en difficultés économiques.

De la gestion du stock d’intervention de l’État

Tel que mentionner haut, pour répondre de façon efficace à l’insécurité alimentaire, il a été mis en place des stocks de proximité appelés banques de céréales, gérés par les collectivités. Si certaines communes ont pu bien gérer leurs stocks, d’autres part contre, ont été de véritable fiasco.

En plus des banques de céréales, il y a le Stock National de Sécurité Alimentaire (SNSA), constitué de 35 000 tonnes. Dans la reconstitution de ce stock, les partenaires financiers tels que le Japon interviennent.
Durant la période de soudure (juillet-août-septembre) où les stocks familiaux s’épuisent, tandis que les nouvelles récoles ne sont pas encore mûres, le gouvernement vent aux commerçants une partie où la totalité du SNSA à des prix subventionnés fixés pour soulager les couches les plus vulnérables.

L’argent issu de cette transaction est réservé à l’Office des Produits Alimentaires du Mali (OPAM), qui procède ensuite à la reconstitution du SNSA.
A côté du Stock National de Sécurité Alimentaire, il y a le Stock d’Intervention de l’État (SIE). Ce stock constitue aujourd’hui une caisse noire entre les mains de Mme Lansry Nana Yaya Haïdara, Commissaire à la Sécurité Alimentaire.

La quantité de ce stock tourne autour de 1 500 tonnes pour une valeur estimée à 3 milliards F CFA. Sur les 1 500 tonnes du SIE, 200 mille sont reversés aux couches démunies constituées de malades du Sida, des orphelins, veuves ou veufs, les malades de la lèpre, les mosquées.
Les 200 mille tonnes doivent être gratuitement distribué entre ces couches.

Il est vrai que la demande est supérieure à l’offre, mais les demandeurs sont exclus de cette aide de l’État au profit des copains et parents de Mme le Commissaire à la Sécurité Alimentaire.
En effet, pour avoir accès au SIE, seule Mme Lansry est habilitée à établir un bon de sortie. Toute personne ou regroupement qui se présente à l’OPAM avec ce bon de sortie, perçoit immédiatement la quantité demandée.

En lieu et place des démunis, Mme Lansry délivre des bons de sortie à ses copains et parents. Face à ces pratiques d’une autre époque, le gouvernement ne doit-il pas revoir les conditions de gestion du Stock d’Intervention de l’État ?

Daba Balla KEITA

29 Mars 2010.