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La crise économique récente, renforcée par celle financière ont fortement contribué à dégrader les conditions socio-économiques au Mali comme partout ailleurs dans la sous-région, voire au-délà. Le facteur catalyseur de cette situation, pour le moins désastreuse est sans doute la hausse du prix des hydrocarbures qui avaient dépassé la barre de 120 dollars le baril.

LE RENCHÉRISSEMENT DES PRIX DES DENRÉES

Consécutivement à cette hausse, les prix ont flambé de façon vertigineuse. Cette situation s’est empirée par les mesures de protectionnisme économique de certains pays jadis gros exportateurs de céréales, en particulier le riz dont la consommation est forte au Mali dans les milieux urbains.

Ainsi, les autres Etats africains, à l’instar du Mali, ont préconisé des mesures visant à subventionnner les produits à forte consomation afin d’éviter que la situation ne dégénère et ne provoque la colère, voire le soulèvement des populations, en particulier celles qui consomment presque quotidiennement le riz.

Au même moment, on se rappelle que le Kg du riz était vendu à 4OO francs CFA au port de Lomé où les opérateurs économiques s’approvisionnaient pour venir ravitailler le marché malien. Dans ces conditions, il y avait de fortes probabilités que le riz soit vendu autour de 500 francs CFA le kg. Le consommateur malien ne pouvait supporter de tels prix. Les subventions des États étaient donc les bienvenues pour juguler de façon ponctuelle la crise.

UNE INITIATIVE SALUTAIRE

Dans le cas du Mali où le président de la République avait déjà engagé le gouvernement dans la voie de la concrétisation de la loi d’orientation agricole, la situation a pu être contenue au prix d’énormes sacrifices consentis par le gouvernement, tant en terme de subvention de l’importation des produits alimentaires comme le riz, le lait et l’huile. Ce sont des sommes faramineuses qui ont été investies à cet effet.

En plus de cela, le gouvernement, suivant l’initiative du Premier ministre Modibo Sidibé appelée initiative riz a réuni les conditions de relance de l’agriculture. Dans le financement de cette initiative, l’Etat malien, à travers des institutions financières de la place, a débloqué 10 milliards de francs CFA pour le financement de plusieurs voltes dont l’achat de semences et d’engrais afin qu’ils reviennent moins cher au producteurs.

Beaucoup de producteurs ont effectivement bénéficié de cette opportunité. Malgré le retard enregistré dès le départ, les critiquese, et les déclarations le niveau des recoltes a convaincu qui étaient de nature à décourager autorités et producteurs, les recoltes furent bonnes.

En tout cas, tous étaient d’accord sur ce fait. Ce n’était que la première étape d’une initiative devant s’étendre sur plusieurs années.

PROBLÉMATIQUE DE LA COMMERCIALISATION DU RIZ

Avant même qu’on ne commence à recolter, les commerçants, notamment les grossistes, ont affûté leurs armes et se trouvaient dans un état de veille afin de concentrer une grande partie de la production du riz qu’ils ont plutôt vendu à l’étranger, dans les pays voisins notamment au Niger.

Ils ont été astucieux et prompts à tout ramasser au moment où nous étions là pour attendre la moisson. Certains commerçants auraient même prépayé le riz, d’autres avaient même fait confectionner des sacs par milliers pour réceptionner le riz qu’ils ont commandé.

Certains avaient interprété cela comme étant un complot ou ne trahison. En tout cas, ce fut tout sauf une action loyale vis-à-vis du consommateur et du gouvernement.Comme il fallait s’y attendre, les commerçants, plus intéressés par l’importation avec exonérations, sont montés au créneau pour crier au scandale, à la crise céréalière.

LES INTÉRÊTS DES COMMERÇANTS DIFFERENT DE CEUX DES CONSOMMATEURS

Il y a même eu des débats à la télévision nationale autour de la question. Pour les représentants des commerçants, l’initiative riz a été un échec d’autant plus que le riz n’est pas disponible sur le marché. Curieusement, les commerçants sont les seuls à savoir qu’il n’ya pas de riz ou qu’il y a pénurie ou crise et non les consommateurs.

Ces derniers étaient représentés par Badou Samounou qui a surtout mis l’accennt sur le prix qu’on doit voir encore à la baisse. Au cours de cette rencontre, les représentants des producteurs ont persisté et signé qu’ils ont du riz, mais qu’ils ne sont pas prêts à le brader.

Selon eux, ils gèrent tous leurs problèmes à partir de la vente de ce riz: frais de culture, nourriture, frais scolaires des enfants, de soins de la famille Pour ces raisons, avaient-ils précisé, il n’est pas questions qu’ils se pressent à brader le fruit de leur labeur.

LES PRESSIONS DES COMMERÇANTS POUR BÉNÉFICIER DES EXONÉRATIONS

Les commerçants qui, pour des raisons qu’on sait, persistent et signent qu’il n’y a plus de riz dans les zones de culture, ne savent-ils pas de quoi ils parlent? En tout cas, ils ont continué à faire des pressions pour que les autorités leur accordent ce qu’ils cherchent par tous les moyens, à savoir l’importation avec exonération.

Certes, au haut niveau, puisqu’on a alarmé, il a été accordé de l’exonértion sur une importante quantité de riz. C’est l’importation sous cette forme avec exonération de taxes qui est prisée par les commerçants qui tirent le plus grand profit de cette pratique. Sinon en temps ordinaire il n’est jamais interdit d’importer.

Ainsi, en vendant le riz produit localement à l’étranger où le riz est nettement plus cher, les commerçants maliens font plus de gains mais sur le dos du gouvernement et des consommateurs maliens. Cela a-t-il quelque chose à voir avec le fait que l’initiative riz a été un échec?
On se rappelle, en tout cas, que les consommateurs n’ont pas bénéficié des avantages dûs aux exonérations accordées par le gouvernement aux commerçants. Le riz exonéré, disait-on, était introuvable sur le marché. Le souci majeur des consommateurs, à travers leur représentant n’était ni plus ni moins que la baisse du prix du riz, qu’il soit importé ou produit localement.

L’IMPORTATION EXPLIQUE-T-ELLE LA PENURIE?

L’importation d’une quantité de riz pour constituer les stocks de sécurité est-elle la preuve qu’il n’y a pas de riz, quand bien même que les consommateurs n’ont jamais parlé de pénurie sur le marché?
Ne faudra-t-il pas croire encore à la cupidité de certains commerçants d’user de ce dont ils ont l’habitude, sachant bien que la poursiute de l’initiative riz mettra fin, à coup sûr à l’importation avec exonération, ne serait-ce que pour des mesures de protectionnisme économique?

Ce qui est sûr, c’est qu’après la réussite de l’initiative riz, la principale inquiétude était relative à la commercialisation. Par ailleurs, les investissements se sont poursuivis même après la fin de l’hivernage à travers la mise à disposition de plusieurs motoculteurs qui sont une composante de l’initiative riz, de même que l’angrais, les semences, les périmètres cultivables. Les résultats de l’initiative riz devront logiquement être plus probants les années qui suivront.

Quoi qu’on dise, l’Etat n’a injecté dans l’initiative riz que 10 milliards de FCFA, le reste des investissements provient des banques et des bailleurs de fonds (partenaires financiers du Mali). Ces derniers, ayant perçu et approuvé le bien fondé de l’initiative riz, se sont engagés à poursuivre leur appui pour l’atteinte de l’autosuffisance alimentaire au Mali dans les années à venir.

Moussa SOW

06 mars 2009