Faut-il féliciter Thabo Mbeki qui vient de démissionner de ses fonctions de président de la République sud-africaine ou franchement louer le modèle démocratique de l’Afrique du Sud postapartheid ? Les avis sont largement partagés.
Pour notre part, nous avons, il y a déjà belle lurette, fondé notre religion sur le remplaçant de « Madiba » à la tête de la nation Arc-en-ciel. A analyser son parcours, il s’avère l’émule d’un de ses pairs ouest-africain, réputé pour ses prises de position à l’emporte-pièce, mais aussi et surtout comme le sauveteur devant l’Eternel de régimes honnis. « Dis-moi qui tu hantes, je te dirais qui tu es ».
N’a-t-il pas tendu la perche à un président de la sous-région naguère infréquentable et qui, tôt ou tard, risque d’avoir sur le dos le TPI à propos d’un certain charnier ? N’a-t-il pas aidé à remettre en selle un président de l’Afrique australe détesté par la «
» ? Que dire de son silence sur un pays de l’Afrique de l’Est où des adversaires s’étripaient à la suite de la parodie électorale de décembre 2007 ?
N’a-t-il pas, ô comble de l’irresponsabilité, nié tout lien entre le VIH et le Sida dans un des pays les plus durement touchés par la pandémie, prônant, à l’instar de sa très fidèle ministre de la Santé la consommation de betterave mélangée à de l’ail et d’autres balivernes imaginées en légumes pour contrecarrer la propagation de la maladie et, par ce fait même, minimisé le combat de son prédécesseur contre la « peste du 21e siècle » ?
Certes, l’Afrique du Sud, sous sa houlette, a contribué de beaucoup au retour de la paix au Burundi. Mais, globalement, M. Mbeki, sous des dehors angéliques, n’est pas bien différent de ces présidents qui se comportent en roitelets, agissant comme « Charbonnier est maître chez soi ».
Ce n’est certainement pas de gaieté de cœur qu’il a quitté la tête de l’ANC. Battu à plate-couture, il voulait peut-être faire payer la note à l’imprudent (au propre comme au figuré) Zuma qui a eu le toupet de défier le président de la République et qui s’apprête à être calife à la place du calife : en actionnant la machine judiciaire.
Manque de pot pour lui ! Dans le système démocratique sud-africain, force, apparemment, reste aux partis politiques. Nul n’y est élu à la tête de l’Etat tant qu’il n’a pas l’onction d’un appareil politique puissant. Et puisque l’élection du chef de l’Etat (au suffrage universel indirect) reste l’apanage des députés, le parlementaire est puissant, remet l’exécutif sur les rails et au besoin défait le président.
Thabo Mbeki l’avait peut-être oublié à force de fréquenter certaines gouapes méchantes dont il faut se méfier ; à force de vouloir défendre l’indéfendable. « Tel est pris qui croyait prendre ».
Puisse le modèle sud-africain faire tache d’huile sur un continent qui, au nom d’une démocratie mal assimilée ou délibérément dévoyée, ne cesse de faire des reculs bien pires qu’il y a 20 ans sous l’ère des partis uniques !
A. M. T.
29 Septembre 2008