C’est une tentative maladroite de dresser un portrait angélique du président malien parce que son projet de référendum, finalement, ne touchera pas à une virgule de l’article 30 de la Constitution, c’est-à-dire que la limitation du mandat présidentiel à deux périodes de 5 ans sera maintenue.
Malheureusement, même la presse internationale, d’ordinaire prompte à ironiser les insuffisances de la démocratie africaine est, semble-t-il, tombée dans le panneau : en attribuant (avant même que cela soit effectif) au chef de l’État en exercice la paternité de l’alternance pacifique au pouvoir au Mali. Quelle méprise !
Dieu nous est Témoin : Alpha Oumar Konaré, quoi que l’on dise, est le premier à quitter de son plein gré le pouvoir alors qu’il pouvait user de subterfuges pour s’y maintenir, quitte à en pâtir plus tard. Cela n’est pas méritoire ? Si oui, pourquoi louer son successeur qui ne fait que suivre ses pas ? Il est vrai qu’entre-temps, la « folklorisation » de notre démocratie a atteint son apogée.
A vrai dire, ce n’est pas un cadeau qu’ATT offre au peuple malien sur un plateau d’argent. Au contraire, il connaît assez bien ses compatriotes, il sait qu’ils encaissent beaucoup mais pas tout. De plus, l’actualité a démontré que dans des pays comme le Ghana, le Bénin, le Niger… et surtout le Mali, il est suicidaire de faire le forcing. N’ayons pas peur des mots : le président est obligé de partir.
Aussi je me pose des questions sur le bien-fondé d’un référendum aujourd’hui. Avons-nous suffisamment de temps pour corriger les possibles couacs de ce processus sans que cela ait des répercussions négatives sur la tenue dans les délais des élections générales de 2012 ? Je constate que le président, qui avait réuni le consensus entre 2002 et 2007, n’avait pas jugé utile de toiletter la Constitution ?
Pourquoi à 2 ans de la fin de son règne ? Il est certain que quelqu’un tirera les marrons du feu en cas de pépin. Sinon, pourquoi ne pas s’en laver les mains, éviter toute polémique éventuelle, en laissant le soin au successeur de mener le processus à son terme ? L État ne doit pas être pressé, il doit être de continuité.
Néanmoins, s’il faut « rendre à César ce qui est à César et à Daba ce qui est à Daba », force est de reconnaître que le projet de Constitution renferme des dispositions qui méritent d’être saluées, voire renforcées. L’une d’elles veut que le prochain président soit strictement Malien en dehors de toute autre nationalité.
Je suggère qu’on étende la disposition aux membres du gouvernement et à toute la haute administration (ambassadeurs, DG, PDG), car la double nationalité qui fait de celui qui la possède Malien un jour pair, Français, Américain, Amérindien ou Chinois… un jour impair est source de divergences entre Etats. Japonais d’origine, l’ex-président du Pérou Alberto Fujimori, présumé coupable du détournement de milliards de dollars, est au centre de tiraillements entre Tokyo et Lima.
Je me réjoui aussi du fait que les médias publics seront mis au service de l’ancrage de la démocratie à travers l’organisation de débats publics contradictoires, mais il serait tout aussi bon qu’ils quittent le giron de l’État pour être chapeautés par une autorité indépendante des pouvoirs publics.
Les restrictions à la candidature indépendante, la fin du nomadisme et la moralisation des campagnes sont également des avancées.
Au demeurant, une Constitution ne vaut que par le respect qu’on lui porte. C’est toute la problématique des démocraties sous les tropiques.
A. M. T.
26 Avril 2010.