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La grève déclenchée mercredi par le personnel de l’hôpital Gabriel Touré pour protester contre l’arrestation de leurs collègues -le Dr Mohamed Keïta, maître assistant au service ORL et Mme Dembélé Dao, assistante anesthésiste au service de réanimation (voir l’Essor de jeudi)-, s’est poursuivie hier.

A l’hôpital Gabriel Touré, les services de consultation et de soins ne fonctionnaient pas au premier passage de notre équipe de reportage. Mais avant la fin de son entretien avec le directeur général adjoint de l’établissement, les médecins militaires avaient commencé à assurer le service minimum dans certains services de la formation hospitalière.

Selon les informations fournies par la direction générale de l’établissement, le Premier ministre Ousmane Issoufi Maïga s’est rendu hier à l’hôpital en compagnie des ministres de la Santé, Mme Maïga Zeïnab Mint Youba, de la Sécurité intérieure et de la Protection civile, Sadio Gassama.

Il a ordonné que les médecins militaires suppléent les grévistes pour soigner les malades. C’est ainsi que les médecins militaires ont assuré le service minimum.
La question du service minimum a d’ailleurs fait débat à l’assemblée générale des travailleurs de l’hôpital et les avis étaient partagés. Mais ceux qui appuyaient le principe ont été mis en minorité.

L’AG a alors décidé d’ignorer cette disposition réglementaire, a expliqué un chef de service. Une décision surprenante sur le plan moral aussi mais qui n’a rien d’inédit dans le secteur de la santé.

« Nous sommes en train d’organiser les choses pour voir comment nous allons accomplir cette mission« , a néanmoins expliqué le chef du service des urgences, le Dr Nouhoum Diani. Dans cette unité, un médecin commandant et l’infirmier de garde étaient en train d’examiner les malades, sans aucune pression particulière.

Dans la quasi totalité des services, les médecins militaires s’étaient présentés pour s’occuper des malades. Dans certaines unités, le service minimum est essentiel pour sauver des vies humaines. C’est le cas par exemple du service de gynécologie. A ce niveau, la direction générale du centre hospialo-universitaire assure avoir pris les dispositions qui s’imposent pour faire face à la forte demande.

Le directeur général adjoint, le Dr Youssouf Konaté, confirme ainsi que la pharmacie hospitalière a instruction de mettre des kits (médicaments destinés à une prise en charge chirurgicale) à la disposition des médecins militaires de garde pour résoudre d’éventuels cas de césarienne. « Nous attendons de voir comment les choses se passent et demanderons que des médecins militaires travaillent avec les équipes de garde« , a-t-il indiqué.

Le bureau exécutif du Syndicat national de la santé et de l’action sociale (SNS-AS), dans un communiqué diffusé mercredi soir par la télévision nationale, s’est désolidarisé de la grève. Le secrétaire général du SNAS, le Dr Mamady Kané, également chef du service d’imagerie médicale à l’hôpital Gabriel Touré, explique que le débrayage n’est pas une action décidée par l’organisation syndicale, laquelle souhaitait privilégier une démarche sociale pour dénouer la crise causée par le décès de Mme Touré Aïda Niaré (voir l’Essor d’hier).

Rappelons que l’avocate, après diverses péripéties, avait été victime d’un arrêt cardiaque alors qu’elle subissait une anesthésie avant une opération destinée à retirer un morceau de colas qui lui obstruait l’oesophage. Le Dr Mohamed Keïta et Mme Dembélé Salimata Dao, l’assistante anesthésiste, devaient conduire cette intervention. Ils parvinrent à faire repartir le coeur de la patiente mais celle-ci ne put reprendre connaissance jusqu’à son décès à Paris où elle avait été évacuée par les soins de son époux. La procédure judiciaire engagée avait débouché sur l’arrestation du médecin et de l’assistante anesthésiste.

Le SNAS avait alors souhaité réunir une commission de bons offices (constituée de notabilités, de leaders religieux et de griots) pour présenter les condoléances du corps médical à la famille de Mme Touré Aïda Niaré. Mamady Kané avait bon espoir que cette démarche fondée sur la tradition, fasse baisser la tension soulevée par ce qui était devenue une affaire. Le syndicat envisageait aussi une démarche de l’Ordre national des médecins en direction du Barreau pour créer les conditions d’un apaisement.

On comprend alors la réaction du secrétaire général du SNSAS qui a jugé que la grève déclenchée était « sauvage, illégale et inopportune« . « La législation en matière de grève exige le dépôt d’un préavis de 2 semaines pour pouvoir entamer une grève. Nous n’allons pas conduire nos militants à une telle action. C’est une question de responsabilité. Nous poursuivrons notre démarche sociale« , a-t-il assuré.

Le mouvement lancé par le personnel de Gabriel Touré ne s’est, heureusement pour les malades, pas étendu à d’autres établissements hospitaliers. Le secrétaire général du syndicat des travailleurs du Point G confirme ainsi que l’établissement fonctionne sans à-coups.

Les structures de santé fonctionnent effectivement mais un peu dans la confusion occasionnée par des informations contradictoires et pas mal de rumeurs. Ainsi le Centre national d’appui à la lutte contre la maladie (CNAM), ancien Institut Marchoux, se demandait sur quel pied danser. Le secrétaire général du comité syndical de cet établissement est finalement venu aux nouvelles à la Bourse du travail pour en avoir le coeur net.

B. DOUMBIA- L’Essor

10 août 2007.