Dans les périmètres aménagés de la zone de l’Office du Niger à Niono comme dans les autres zones, les travaux champêtres pour la culture du riz vont bon train.
Certains paysans se sont d’ailleurs serrés la ceinture, requinqués qu’ils sont par la mesure prise par le Premier ministre, Ousmane Issoufi Maïga.
Celui-ci avait, lors de sa tournée dans la zone en novembre dernier, instruit à ses subalternes d’accorder un délai de grâce de 3 mois aux paysans qui ne s’étaient pas acquittés de leur redevance eau.
Depuis près de 2 ans, les exploitants de la zone Office du Niger n’arrivaient plus à s’acquitter régulièrement de leur redevance eau.
La situation s’est aggravée l’année dernière quand une centaine de paysans avaient décidé de rallier la capitale Bamako pour exprimer leur ras-le-bol au président ATT après que des milliers d’exploitants eurent été dépossédés de leurs terres suite au non-paiement de la redevance eau.
Selon les textes régissant l’exploitation des terres aménagées en zone Office du Niger, l’exploitant c’est-à-dire le paysan, est tenu de s’acquitter chaque année en fin de campagne de sa redevance eau.
Dans le cas contraire, il perd le droit de la cultiver. Cette règle a été appliquée par les responsables de l’Office du Niger, qui ont exproprié plus de 4000 familles et suscité un soulèvement des paysans.
A la date du 31 mars, beaucoup de paysans étaient en retard de paiement de leur redevance eau. Ce délai a été prorogé de 3 mois pour permettre aux paysans de se mettre à jour.
Nonobstant, ce délai de grâce, certains paysans n’ont pu s’acquitter de leur devoir. C’est le cas par exemple à Kolongo-Kokry-Bozo où 15 familles ont été dépossédées de leurs anciennes terres, mais réinstallées sur de nouvelles terres aménagées.
Peut mieux faire
En effet, tous ceux qui n’avaient pas payé un seul centime de leur dette à la date du 30 juin, se sont vus retirer la terre qui a été ré-attribuée à d’autres.
Cependant, « ces mauvais payeurs » ont été recasés. Par contre, les exploitants qui s’étaient, en partie ou en totalité, acquittés de leur redevance eau, ont vu leurs terres leur être réaffectées.
Ce compromis, fruit de la tournée du Premier ministre, a été salué par Abdoulaye Ndao, délégué général des exploitants agricoles de l’Office du Niger à Nioro.
M. Ndao, regrette cependant que les 15 familles de Kolongo-Kokry-Bozo ne sont pas autorisées à rester sur leurs anciennes terres. « C’est une dislocation de familles », déplore-t-il.
Pour M. Ndao et Lassine Dembélé, membre du comité de gestion de fonds d’entretien à l’ON-Niono, la visite du Premier ministre a mis certes du baume au cœur des exploitants agricoles.
Mais, pour autant, elle n’a pas permis d’aplanir toutes les difficultés. Celles-ci ont pour noms : la baisse du rendement, la dette des paysans vis-à-vis des institutions bancaires, notamment la BNDA, entre autres.
Les rendements dans la zone Office Niono baissent d’année en année depuis 3 ans. « Tous ceux qui récoltaient 80 sacs à l’hectare n’en ont maintenant que 55 sacs tout au plus », explique M. Ndao qui ajoute : « toutes nos difficultés viennent de là » et de s’interroger si cela serait dû à la qualité des engrais ou de l’appauvrissement graduel de terres.
Les craintes vis-à-vis de la BNDA se trouvent justifier parce que les exploitants ne savent pas si cette banque va accepter de leur octroyer de nouveaux crédits pour l’achat d’engrais eu égard aux anciennes dettes non encore remboursées.
Bien que cette question n’a pas été discutée avec le Premier ministre, M. Ndao sollicite son intervention pour un compromis.
« Nous exploitants de Niono, disons que le Premier ministre est venu enlever une épine de nos pieds. Cependant, tout le problème n’a pas été résolu parce qu’il est profond et vieux de 3 ans », témoigne le délégué général des exploitants de Niono.
Denis Koné
(envoyé spécial)
18 juillet 2005