Partager

Le rapport 2011 du Vérificateur général a été présenté à la presse la semaine dernière. Parmi les vérifications effectuées, celle de la gestion du foncier dans le cercle de Kati, au temps du Sous-préfet Ibrahim Mamadou Sylla, de 2008 à 2010, donne des sueurs froides. Lisez plutôt.

Depuis plus d’une décennie, à cause de l’urbanisation grandissante et la saturation progressive des réserves foncières du District de Bamako, le Cercle de Kati, en raison de sa proximité avec la capitale, connait une vive pression foncière, avec pour corollaire la spéculation foncière. L’intérêt de la présente vérification est de contribuer d’une part, à la mise en œuvre d’une politique de mobilisation optimale des ressources internes, et d’autre part, à la préservation de la paix sociale, à travers une meilleure gestion foncière.

L’attribution des titres provisoires comporte des irrégularités

• Le Cercle de Kati a attribué des concessions à usage d’habitation sans y être habilité. En vertu de la Loi n°02-008 du 2 février 2002 portant modification et ratification de l’Ordonnance n°00-027/P-RM du 22 mars 2000 portant Code Domanial et Foncier (CDF), seul le Maire est habilité à délivrer des Concessions Urbaines à usage d’Habitation (CUH) et des Concessions Rurales à usage d’Habitation (CRH).

• Le Cercle de Kati, malgré l’absence de base juridique, continue à attribuer des concessions à usage d’habitation. Ainsi pour la période de 2008 à 2010, elle a procédé à dix lotissements correspondant à 13 207 concessions à usage d’habitation attribuées.

• En sus de son incompétence constatée, le Cercle de Kati a dépassé le nombre de CUH/CRH autorisé pour un même bénéficiaire. En effet, selon le CDF, il ne peut être accordé qu’une seule CUH/CRH par demandeur. Cependant, sur les lotissements de la période de référence, le Cercle de Kati a attribué à 80 bénéficiaires, plus de dix CUH/CRH chacun. La preuve, dans le lotissement de Sangarébougou, il a attribué à un seul bénéficiaire 109 CUH/CRH. Les Chefs des Bureaux Spécialisés des Domaines et du Cadastre auprès du Cercle et de la Mairie de la Commune urbaine de Kati n’ont pas perçu les droits sur les frais d’édilité et de transfert au compte du budget de l’État pour un montant total de 193 millions de FCFA. L’attribution d’une CUH/CRH est soumise au paiement, au profit du Budget national, du droit de superficie, soit 10% des frais d’édilité, et du droit sur le transfert des immeubles à usage d’habitation ne faisant pas l’objet d’un Titre Foncier (TF), soit 7% du prix de vente de l’immeuble. Le montant des droits non perçus au titre de la période 2008 à 2010 est égal à 91,81 millions de FCFA pour le Cercle et 101,31 millions FCFA pour la Mairie de Kati.

Le Sous-préfet de Kalaban-Coro a changé la vocation des terrains sans base légale. Le Décret n°01-040/P-RM du 2 février 2001 déterminant les formes et les conditions d’attribution des terrains du domaine privé immobilier de l’État autorise le Sous-préfet à attribuer des Concessions Rurales (CR) d’une superficie allant jusqu’ à 2,5 ha. Le Sous-préfet de Kalaban-Coro a procédé au morcellement en parcelles à usage d’habitation de terrains attribués par le Cercle sous forme de CR ou des champs appartenant à des propriétaires coutumiers. Il n’a donc pas respecté les textes régissant l’attribution de concessions rurales (formalité de publicité, cahier de charges). La dimension des terrains (300 m²) et la présence des équipements collectifs (lycées, marchés) dans les plans de morcellement font que ces terrains ne sont pas des concessions rurales mais des concessions à usage d’habitation.

• La mission a constaté que le Préfet du Cercle de Kati a attribué plusieurs CR de 5 ha à un même bénéficiaire alors qu’en application de l’article 7 du Décret n°01-040 P/RM du 2 février 2001, il est habilité à n’attribuer qu’une superficie comprise entre 2,5 ha et 5 ha sous forme de concession rurale. Ainsi, dans la localité de Soro, il a attribué à une seule personne plusieurs CR de 5 ha chacune pour une superficie totalisant 459 ha. Le Directeur Régional des Domaines et du Cadastre de Koulikoro n’a pas intégralement versé au Trésor Public les recettes générées par la cession de Titres Fonciers.

Les recettes collectées par le Bureau des Domaines et du Cadastre de Kati ne sont pas intégralement versées dans le compte de l’État.

La DRDC-K, par l’intermédiaire de ses services subrégionaux, est chargée de collecter les recettes domaniales et de les reverser dans les comptes de l’État. La reconstitution de la situation financière du BDC de Kati a révélé un écart de 356,83 millions de FCFA entre les recettes perçues et celles déclarées et versées au Trésorier Payeur de Koulikoro.

• Le Directeur Régional des Domaines et du Cadastre de Koulikoro a minoré les prix de cession des parcelles. Le rapprochement entre les droits dus et ceux perçus par la DRDC-K a révélé un écart de 591,25 millions de FCFA.

Le Directeur Régional des Domaines et du Cadastre de Koulikoro a minoré les droits d’enregistrement et de mutation des titres fonciers cédés pour un montant total de 111,36 millions de FCFA. En vertu des dispositions du CGI, sur le prix de cession des Titres Fonciers, l’acquéreur doit verser à l’Etat un droit d’enregistrement de 15% et un droit de mutation de 1,5%. La mission a constaté que le Directeur régional a minoré des droits d’enregistrement à hauteur de 99,23 millions de FCFA. Concernant les droits de mutation, la mission a constaté que la DRDC-K applique un taux de 0,9%, ce qui a engendré une minoration de 12,12 millions de FCFA.

Le Chef du Bureau des Domaines et du Cadastre de Kati n’a pas collecté de façon exhaustive les redevances domaniales dues lors de la transformation en Titre Foncier des concessions rurales. Les bénéficiaires de concession rurale ont l’obligation de payer au profit du Budget de l’État une redevance annuelle à l’avance et au plus tard le 31 mars de l’année en cours. La mission a constaté le non-paiement ou le paiement partiel de ces redevances domaniales avant la cession du titre foncier aux concessionnaires.

Le montant des redevances non payées est égal 13, 22 millions de FCFA.

• En outre, le Chef du BDC de Kati n’applique pas systématiquement la pénalité de 25% due au retard dans le paiement de la redevance des CR. Ce manquement a entraîné la non-perception d’un montant de 2, 51 millions de FCFA.

Recommandations : Aux recettes perçues mais non reversées par le Directeur Régional des Domaines et du Cadastre de Koulikoro, pour un montant de 356,83 millions de FCFA ;

– A la minoration de prix de cession pour un montant de 591,25 millions de FCFA par le Directeur Régional des Domaines et du Cadastre de Koulikoro;

– A la minoration de droits d’enregistrement et de mutation pour un montant de 111,37 millions de FCFA par le Directeur Régional des Domaines et du Cadastre de Koulikoro.

Source Rapport BVG 2011

22 Septembre du 6 Décembre 2012