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C’est un PM iconoclaste qui ne se laisse pas facilement influencer par les critiques et reproches des politiciens de tous bords. Il n’est en rien responsable de la situation créée par leurs agissements durant ces 20 dernières années, situation dont on lui confia la responsabilité de gérer, de décanter et de réunifier un pays divisé , dont les fils ne parlent plus le même langage , ne pratiquent plus la même religion et attendent des élections renvoyées aux calendes grecques .

Appelé entre sur une short liste par la Cedeao et les militaires pour exercer les fonctions de PM, il dût dès la première semaine de sa prise de fonction faire face aux effets désastreux de la déliquescence de l’Etat et à ceux du contre coup d’Etat fomentés par les nostalgiques de l’ère Att. L’accord cadre lui fixa un certain nombre de contraintes telle que la formation d’un gouvernement de large ouverture. Il refusa de s’y plier ne sachant pas où trouver des hommes neufs dans ce qui reste des personnalités présentes sur la scène politique issues du mouvement de mars 1991.

Pour ne pas composer avec les tenants de l’ordre ancien, il forma un gouvernement de technocrates excluant les politiciens pur sucre. Mal lui en a prit. Ils ne l’entendirent pas de cette oreille et ont remué terre et ciel, consulté marabouts et géomanciens, poussé les populations du nord à crier avec les loups, fait du lobbying auprès des membres influents de l’organisation sous régionale pour qu’on leur fasse une place. A l’allure où vont les choses, les douze mois de transition ne leur apparaît pas comme un délai réaliste. Mieux vaut occuper son maroquin dans le gouvernement actuel.

C’était ce à quoi Att les avaient habitués dans ce qu’on appelait l’exception malienne du consensus, autrement dit, tout le monde mange et on ferme la gueule.

La Cedeao accéda à leur requête parce qu’elle ruminait elle aussi le secret espoir de changer le PM. Motif: il ne se pliait pas à leurs diktats. Du coup le PM CMD est devenu l’homme à neutraliser à tout prix comme le capitaine Sanogo le fut en lâchant un pouvoir qui était devenu une patate chaude. La Cedeao est allée jusqu’à lui reprendre le statut d’ancien président que seul le Mali pouvait lui accorder en substance. Qu’importe, on fait comme si on dispose d’un tel pouvoir, d’une telle récompense. Donner ce qui ne vous appartient pas n’est pas faire preuve de générosité.

Le PM fit l’objet d’une campagne de dénigrement systématique, taxé d’immobilisme et même d’incompétence par les porte voix du système, et par des leaders d’opinion experts en désinformation et enfin par les thuriféraires de l’ancien régime. Pendant que, des organes de presse proches des partisans du Fdr pilonnent les positions tenues par le PM, des députés dont le mandat fut prorogé par l’accord cadre tentent de reprendre du poil de la bête alors qu’ils devaient faire profils bas, étant coresponsables de la gestion calamiteuse du pouvoir par ATT, certains pouvant être rattrapés par la justice.

Que lui reproche-t-on ? De ne pas aller conquérir le Nord la fleur au fusil ? De travailler en bonne intelligence avec les militaires ? De faire preuve de loyauté vis a vis de Dioncounda ?

Que savait- on du degré de déliquescence de l’armée malienne, une armée désarticulée , sous équipée, mal logée et mal nourrie, avec sa pléthore de généraux , une armée qui venait de subir un traumatisme a Aguel hoc , Gao, Ménaka, Tombouctou , Kidal, Dire etc..

Que savait-on de l’armée, avec un commandant en chef en villégiature permanent chez les grands du monde alors que le danger grondait et la rébellion couvait. Dans l’insouciance, il gouverna, et dans l’opprobre il se réfugia à l’étranger.

Le PM a attendu que les politiciens qui veulent plus les prébendes que l’unité du pays se calment tant soi peu avant de compter les amis du Mali, et ses soutiens stratégiques dans les pays du champ. Il veut la paix, mais prépare la guerre. Il est amoureux de la paix et de la guerre, mais la guerre qui conduit à la paix.

En dépit des exactions commises sur les populations du Nord, la destruction des mausolées, et la profanation des lieux saints, Cmd, prépare avec l’armée malienne le règlement du conflit. L’impatience n’est le remède à aucun mal.

Comme tout malien, il est horripilé par les oukases incohérents et les fatwas de la Cedeao qui croyait faire du novice en politique une simple bouchée. Elle déchanta et entrepris de le détruire. Son patron Dioncounda est aussi de l’étoffe des héros puisqu’il refusa de suivre la Cedeao dans ses lubies.

En dépit de notre pauvreté du moment, le malien est réfractaire à toute domination, c’est un peuple digne.

L’adversité a noué entre les deux hommes une estime réciproque que les contingences politiciennes n’arrivent pas à éroder.

Lorsque la Cedeao a voulu envoyer une tête de pont pour sécuriser les organes de la transition, en langage diplomatique pour neutraliser les postes de commandement dont celui du capitaine, il répondit par un Niet poli mais ferme. Il comprit que la politique est un jeu d’échec et mat. Elle est dangereusement passionnante.

Lui le matheux, y prit goût. Pour contrecarrer les desseins de la Cedeao et rester crédible, il organisa la réaffectation de 1200 gendarmes et policiers aux forces spéciales dépendant directement de la primature pour sécuriser les organes de la transition et repris l’avantage aux poings.

Et pour sortir du tête à tête avec Ado et Blaise , il se fit adouber par Dioncounda qui le prit en estime en raison de sa loyauté et sa sensiblerie aux drames humains dont celui qui frappa Dioncounda lui même et qu’il a soustrait à la vindicte populaire.

Lorsque la Cedeao a activé sa force en attente qui est en sustentation et sollicita l’Onu pour couvrir le débarquement au Mali de la Micema, il fit jouer ses relations à Washington pour bloquer la résolution de l’Onu. Les Américains firent une mise en garde qui ramena les chefs de la Cedeao à la raison. Cmd s’est souvenu qu’il avait plus d’amis dans sa deuxième patrie, les USA et avait participé au rayonnement de l’Amérique plus qu’aucun ressortissant ou dirigeant de la Cedeao. Les USA s’en souviennent et lui en savent gré.

Pendant ce temps, il fit le tour des amis du Mali pour tisser une nasse autour de la rébellion et se dégager de la tutelle pesante de la Cedeao qui joue un jeu des plus troubles. Blaise mène sur le sol malien des ex filtrations de rebelles armés pour faire plaisir au Qatar qui avait suspendu sa participation au financement du deuxième aéroport international de Ouaga.

Les voltes faces d’Alassane Dramane Ouattara (Ado) l’ont laissé sans voix, lui qui fut élevé dans la droiture et le respect de la parole donnée. Il découvre un microcosme politique qui partage les objectifs de la Cedeao et pour lequel le reniement et la dénégation sont les vertus cardinales.

Cmd sait maintenant que la politique est un combat entre mâles dominants pour la suprématie sur un territoire donné, et tous les coups sont permis. C’est le jeu favori à l’échelle planétaire en temps de paix, comme en tant de guerre. Il doit vaincre ou périr au sens politique du terme. Il a remporté la première victoire, la considération et l’estime de ses concitoyens. Il lui reste à conquérir l’appui de la communauté internationale en concurrence avec Ado.

La France de Hollande fut réceptive à ses arguments au grand dam de ADO , le Sakoziste bon teint.

Le géant débonnaire nourrit à la source de la sagesse et au caractère bien trempé mais à la sensibilité à fleur de peau, attend d’autres victoires, pas lointaines pour dérouler le tapis d’honneur pour la patrie enfin réunifiée par la négociation ou par la glaive.

La destruction des mausolées par le groupe Ancar-eldine / Aqmi le blesse profondément. Impuissant à stopper cette dérive de ceux qui aspirent au paradis par le martyr, il voudrait pouvoir y mettre fin à tout prix, consacrer toute son énergie vers la résolution de ce douloureux problème. Mais, il est à chaque fois, distrait par la Cedeao qui n’a d’autres objectifs que de retarder au maximum les efforts de son gouvernement pour régler ce conflit. D’oukases en fatwas, la Cedeao lui pourrit sa gouvernance par des prises de positions mesquines qui apparaissent puériles à coté des enjeux que pose la réunification du Nord.

Contenant sa rage, il rend coup sur coup, boycottant la réunion du groupe de contact à Ouaga. Son absence et celle de Dioncounda ont enlevé toute crédibilité à cette rencontre.

Il sait de science certaine que le temps lui ait compté pour réussir sa mutation de scientifique émérite en homme d’Etat éclairé et visionnaire, ayant une ambition pour le Mali, la réunification de son pays et l’organisation d’élections propres, transparentes et crédibles.

N. D

Le Prétoire du 16 Juillet 2012