Après les errements nés de sa «défaite» de 2002 à la présidentielle et de son désir de participer à la gestion des affaires publiques en se basant sur son score aux législatives 2002, le RPM (Rassemblement Pour le Mali) est entrain d’affirmer, laborieusement mais fermement, sa position par rapport aux élections générales qui se dérouleront en 2007.
C’est dire que l’unanimisme politique tant décrié par certains et salué par d’autres, est entrain de tomber en désuétude. Car il ne fait aucun doute pour personne que le RPM est une force politique importante et que sa participation à la gestion consensuelle du pouvoir était un préalable à «la stabilité sociale et politique» du pays. Ce parti aurait pu choisir de jouer la carte de la contestation après l’élection présidentielle de 2002, notamment en optant pour une opposition qui aurait pesé au parlement au vu du nombre très important de ses élus.
Mais, après, Ibrahim Boubacar a choisi la conciliation et la modération en acceptant de participer activement à la politique de consensus, en faisant passer du coup le mandat d’ATT comme une période de transition, une transition à laquelle il fallait collaborer. Mais, de plus en plus s’élèvent pour remettre en cause cette collaboration. Le mouvement est parti de la fougue juvénile, lors d’une conférence, au Mémorial Modibo Kéïta.
Les jeunes du parti y avaient interpellés leurs aînés pour leur demander les raisons du maintien du partenariat, jugé mauvais, avec ATT. Ils estimaient que les dividendes escomptés tardaient et se faisaient désirer. D’où leurs interrogations sur la nécessité de continuer.
«Ne valait-il pas mieux aller à l’opposition si le consensus ne rapportait rien de ce que le candidat ATT leur avait promis ?» ont-ils demandé, ou, pire, «ne faudrait-il pas cheminer avec le grand rival, l’Adéma-PASJ ?» Mais la vieille garde qui veillait au grain a tenu ferme. Ce n’était pas le moment avait-elle estimé, et, en outre, les conditions n’étaient pas encore réunies.
A l’époque, beaucoup ont vu un manque de courage politique dans ce qui n’était en réalité qu’une ruse d’opportuniste qui cherche en même temps d’autres opportunités, notamment un rapprochement en douceur avec l’Adéma et/ou l’URD (avec lesquels il partage une origine), mais aux conditions des tisserands. L’idylle a tourné court.
Le mouvement s’est poursuivi avec l’enterrement du regroupement dit Espoir 2002 ; les tentatives de l’Adéma d’aspirer et/ou de s’aliéner certains partis politiques; l’affirmation sans cesse croissante de l’URD qui du coup devenait menaçant; mais aussi et surtout des appétits de plus en plus élevés du Mouvement Citoyen dont les responsables, malgré le fait qu’ils soient divisés sur l’opportunité d’ériger le mouvement en parti politique classique, s’accordent cependant sur la nécessité d’un deuxième mandat pour leur candidat ATT et sur leur pérennisation au pouvoir, pour un 3e voire 4e mandat.
Les différentes conférences de cadres du RPM procèdent de la préparation du parti pour une prise de pouvoir en 2007. Et ces différentes rencontres entrent dans le cadre d’une restructuration du parti en vue de le renforcer et le préparer à affronter les prochaines échéances électorales. Et pour prendre une longueur d’avance sur les autres, les tisserands sont entrain de tisser «un plan d’action pour le développement du Mali» qui n’est rien d’autre qu’une proposition de programme de gouvernement, au cas où… Renforcer son parti, car IBK n’a jamais caché son ambition de ravir au Général le fauteuil présidentiel.
Le RPM est, jusque là, le seul parti qui n’entretient aucune équivoque ni aucun doute, qui ne nourrit aucune ambiguïté quant à ses ambitions. Ce qui est un courage politique dans le contexte actuel caractérisé par les faits que certain parti est parti, encore une fois, pour se déchirer entre son propre candidat et un autre qui ne serait pas issu de ses rangs ; qu’un autre parti tente de faire croire qu’il ne présentera pas de candidat alors que le contraire est clair pour tous ; que deux partis, le MPR de l’ex opposant, rangé depuis, Choguel K Maïga, et le CNID, ou plutôt de ce qui en reste, qui ne font plus illusion, restent en expectative. Bien sûr, il y a les autres, tous les autres, qui seront encore là, et dont on entendra les voix ténues alors qu’ils ne se font déjà aucune illusion.
Mais ils seront quand même là pour amuser la galerie, l’exercice étant d’évaluer leurs forces et de les monnayer au gagnant. En oubliant juste qu’avec l’éventualité d’un RPM au pouvoir, le consensus et l’unanimisme sont loin d’avoir droit de cité. Ce qui serait, d’ailleurs à coup sûr, un bien pour la démocratie et l’expression plurielle.
Mais on en est encore loin, malheureusement, parce que si chacun faisait dès à présent comme les tisserands, on saura à quoi s’en tenir avec les débats de campagne préélectorale, très longue, pendant laquelle les Maliens pourront se faire une idée précise des différents programmes de gouvernement proposés par ceux-là mêmes qui veulent présider à nos destinées. A condition, bien entendu, qu’ils aient des programmes.
Ch. A. Tandina – 21 février 2005