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Le renouvellement du bureau de l’Assemblée nationale vendredi dernier a été la confirmation de tout ce dont les journaux évoquaient des jours avant l’ouverture de la présente session parlementaire ; c’est-à-dire exclure le RPM, parti qui dispose du plus grand nombre de députés, et le pousser dans l’opposition afin, déclarent les commanditaires, de constituer une majorité présidentielle pour ATT et lui assurer un 2e mandat.

Nous ne reviendrons pas sur le caractère politiquement incohérent et incorrect de la démarche, mais face au complot ourdi, le RPM a claqué la porte (ce qui est une première depuis 3 ans) et refuse toute participation dans le bureau et dans les commissions parlementaires. Par-delà la redistribution des cartes au niveau de l’Assemblée nationale, nul ne peut présager des conséquences plus générales sur l’échiquier politique.

Après que le rideau ait été tiré sur le spectacle peu glorieux et pour le moins risible de vendredi à l’Assemblée nationale, l’un des maîtres d’œuvre de ce qui restera dans les annales de notre jeune démocratie comme un attentat aux règles républicaines, Me Montaga Tall, s’est essayé à une peu convaincante explication.

Se contentant plus de la forme que du fond, Me Tall a osé une comparaison entre la sortie des députés du RPM de la salle et le spectacle auquel lui-même avait habitué les Maliens lors de la 1re législature et surtout avec ce qui se passe souvent dans les démocraties avancées. Pour ne parler que de son cas personnel, Me Tall sait très bien qu’il se livre à un amalgame qui ne le grandit pas.

Et le détail le plus important sur lequel il voudrait faire l’impasse, c’est incontestablement le contexte politique. De son temps, l’accent était mis sur la théâtralisation des débats dans le cadre d’un régime où le fait majoritaire, malgré les contestations et les aigreurs de certains acteurs, jouait.

Me Tall sait que malgré la majorité écrasante dont disposait l’Adéma à l’époque, le poste de 2e vice-président lui avait été proposé conformément à la loi.

Cette même loi, que lui, homme de loi et homme de droit, piétine pour la satisfaction de ses seuls intérêts et des intérêts de celles et ceux qui ont trempé dans cette comédie qui ne fait pas honneur à notre démocratie.

Surtout à un moment où au nom du consensus politique, chaque acteur politique fait le maximum pour préserver le fragile équilibre.

Me Tall sait pertinemment qu’une saine application de la loi ne lui aurait jamais permis de siéger encore au poste qui est le sien.

Dans les normes, le poste de 1er vice-président revient au RPM et le Cnid ne peut prétendre qu’au poste de 4e vice-président. Tout au plus.

Souffre-douleur des politiciens

Sortons des calculs d’apothicaires, même si la principale motivation de cette nouvelle majorité présidentielle se rapporte aux postes que les uns et les autres occupent, pour voir les conséquences à court terme (les moyen et long termes pouvant attendre).

Il n’échappe à aucun observateur que le coup a été exécuté dans la foulée de l’allégeance apportée par la direction de l’Adéma à ATT.

Or, ils oublient que le score stalinien enregistré au niveau du CE traduit très mal la réalité au sein de ce parti et surtout que l’opération qui consiste à enfiler à ATT la camisole de force de candidat Adéma est loin d’être gagnée.

Les observateurs estiment qu’ils donnent raison à IBK qui, dans son discours de rentrée parlementaire, parlait du patrimonialisme en Afrique où l’on voit « le prince transformé en chef de clan et qu’en vérité il devient un otage ». Ceux qui voulaient se donner une raison avaient affirmé qu’IBK a osé traité ATT de chef de clan.

En fait, Me Tall et ses complices de l’Adéma et des autres formations politiques ayant trempé dans ce complot, voulaient qu’ATT soit un chef de clan, le chef du clan qu’ils sont en train de constituer et pour cela ils n’hésitent pas à le prendre en otage.

Cette volonté ne date pas d’aujourd’hui. En écartant le RPM, ils pensent devancer les désirs du « prince » qui déclarait que le consensus actuel n’est pas une camisole de force et qui de toute évidence vivait mal les critiques répétées et parfois justifiées du parti du Tisserand.

Nous allons au-devant d’une situation inédite au Mali où le président de l’Assemblée nationale se trouve être malgré lui le chef de l’opposition parlementaire. Il est presque certain que le RPM va demander à ses ministres de rendre leurs tabliers, même s’il est à parier qu’ils ne s’exécuteront pas.

Mais au moins, IBK et son parti auront les mains libres pour attaquer de front le régime.
Dans le rôle de martyr qui semble lui être dédié, IBK pourra capitaliser le mécontentement actuel et donner un lieu de convergences à toutes les frustrations.

Et ce n’est pas sûr que les « farceurs » de l’Assemblée nationale pourront faire le contrepoids.

TBM

17 octobre 2005.