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Hôpital clé en main, pont en béton offert gratis, limousines venues directement de l’usine, prêts à taux préférentiels…La Chine est un partenaire généreux. A tel point que sa magnanimité nous laisse cois. La Chine est le partenaire des partenaires ou, pour utiliser la terminologie exacte, le partenaire privilégié. Elle est parvenue à tisser un nouveau type de relation sans complexe avec les pays en développement. Ce qui fait grincer des dents les partenaires classiques. Et ce qui frôle le ridicule, les dirigeants chinois affichent toujours leur appartenance au monde en développement

S’agissant de notre pays qui vient de célébrer ses 50 ans de coopération avec l’Empire du milieu, c’est un constat reluisant que les deux parties ont dressé.

Pour autant, la coopération sino-malienne n’est pas exempte de faiblesses qui au-delà de leurs effets immédiats, nous font douter, à l’instar de celle avec les pays occidentaux, de sa capacité à amorcer notre développement.

Il semble que la largesse chinoise, si elle en est une, a eu raison de nos dirigeants. D’ailleurs, ne dit-on pas que la main qui donne est au dessus de celle qui reçoit? On dit également que même si le griot n’a pas honte, son front ruisselle de sueur. Et donc pour laver leur honte face à cette largesse des descendants des Mings, nos dirigeants sont prêts à tout pour leur rendre la pareille. La conséquence est bien connue : les entreprises chinoises raflent tous les marchés. Echangeur multiple, c’est la Chine, troisième pont, c’est encore la Chine. Sans compter les hôpitaux (Yirimadio, Mopti et Kati).

Aucune autre entreprise ne peut leur livrer concurrence, particulièrement dans le domaine des BTP. L’exemple le plus récent est la réalisation de l’autoroute Bamako-Ségou. En effet, la Chine qui a accordé un prêt préférentiel de 75 milliards FCFA à notre pays, sera aussi l’exécutant du même projet. C’est la China Road and Bridge Corporation qui va réaliser l’ouvrage pour un coût total d’environ 180 milliards de FCFA. Cela veut dire que la Chine donne et la Chine reprend. Le Mali, toujours consommateur, se contentera de l’ouvrage (certains diront que déjà c’est beaucoup).

Comme le dit un vieux proverbe chinois, au lieu de donner du poisson à quelqu’un, mieux vaut lui apprendre à pêcher. L’entreprise chinoise réalisera l’infrastructure sans que notre pays bénéficie d’un quelconque transfert de technologie. D’ailleurs, c’est une constante chez eux, les Maliens ne sont bons qu’à être des  » manoeuvre « . 300 milliards de FCFA, au bas mot, c’est le montant des marchés attribués aux entreprises chinoises.

Une somme, qui sans grand calcul, explique les offres généreuses des Chinois. Et plus que tout autre partenaire (les Occidentaux étant accusés d’être trop tatillons avec leur critère de bonne gouvernance et d’obligation de résultats) les Chinois donnent sans condition ni contrôle. Surtout, ils prennent soin de donner la part belle aux chefs. Sans compter les dessous de table pour les fonctionnaires et qui faussent la concurrence. Difficile dans ces conditions pour une entreprise malienne de sortir la tête de l’eau. Non seulement nos entreprises perdent les marchés, mais surtout elles les perdent dans leur propre pays. Et ce, à cause de la complicité des Maliens eux-mêmes. Il est vrai, il faut le dire, nos entreprises dans leur écrasante majorité, prêtent le flanc en exécutant pas correctement les marchés.

Le développement de la Chine ne doit étonner guère. Le secret est dans le patriotisme. Cela est, d’ailleurs, vrai pour tous les pays qui se sont développés. Et pourtant, après 50 ans de sous-développement, ça crève les yeux que les difficultés de notre décollage résident dans l’extraversion (à la fois économique, politique et culturelle) qu’aucune politique n’a réussi à inverser. Une extraversion qui nous installe dans une logique de consommation. A la limite, elle assure le développement de quelques-uns au détriment de la grande majorité.

On a toujours le choix, dit-on. Donc, cette situation est voulue par nos dirigeants. Ainsi, la responsabilité de tous les désagréments de cette coopération relève de nous, les Maliens. Dans ce sens, nous ne devons pas avoir froid aux yeux en disant aux Chinois, et à tous les autres partenaires, ce que nous voulons pour notre développement, ce qui est bien pour tous les Maliens. Nous devons faire comme les Chinois qui ne se contentent jamais des ouvrages, mais exigent le transfert de technologie. Toute autre attitude est moins propice à l’indépendance et à un développement soutenu. La Chine qui a passé par le sous-développement saura comprendre cette préoccupation plus que tout autre partenaire et gagnerait davantage à commercer avec un Mali robuste et non famélique et mendiant. Ceci est d’ailleurs valable pour tous les PTF. Et c’est cela un véritable partenariat gagnant-gagnant !

Mamadou Lamine DEMBELE

29 Octobre 2010.