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jpg_une-17.jpgY.D est un artiste bien adulé dans la zone. Il joue un instrument très apprécié par la population, notamment par la gent féminine. Très populaire dans le Banico, il est très souvent sollicité par d’autres musiciens pour les accompagner dans leurs prestations. C’est le cas de la célèbre cantatrice de balafon, Sanata Fomba.

Y.D. et sa formation ont été invités un jour à Toula pour animer une série de manifestations. Au cours de son séjour Y.D. a fini par conquérir le cœur d’une jeune femme mariée dans le village. Malgré le statut de la femme, leur idylle a duré pendant quelques mois. Y.D. faisait fréquemment le déplacement à Toula, pour aller rencontrer sa dulcinée, en prenant toutefois beaucoup de précautions, pour de ne pas être découvert. Sa chance a été que sa sœur cadette est également mariée dans le village. Cela lui servait d’alibi pour expliquer à tous ceux qui le lui demandaient, le pourquoi de ses nombreux déplacements à Toula.

Gagné par le virus de l’amour Y.D. se faisait de plus en plus fréquent dans le village. Ses incessants déplacements ont fini par semer le doute dans l’esprit des villageois. Ce que Y.D. ne prenait plus les mêmes précautions pour rencontrer la femme d’autrui. Le pot aux roses finit par être découvert et le bruit commençait à faire le tour du village. Les villageois lui tendirent un piège qui marcha à merveille. Y.D. fut pris en flagrant délit d’adultère.

Sa triple casquette de musicien célèbre, de cousin à plaisanterie et de beau frère d’un des habitants du village lui épargnèrent d’être lynché. Il n’a même pas été hué, ni châtié encore moins traîné devant une justice. Ceux qui l’ont pris en flagrant délit, ont avisé les notabilités du village. Celles-ci estimèrent qu’en pareil cas il faut informer les parents de Bokoro. Mais de la manière la plus diplomatique possible. On fit venir Y.D. chez le chef de village pour lui raser la tête. Quatre gros gaillards furent désignés pour le conduire dans son village. Ils furent chargés d’un message à transmettre au chef du village et aux notables de Bokoro : « Dites au chef de village et aux notables de Bokoro qu’un de leurs géniteurs, en divagation a été pris dans nos jachères. Nous vous l’envoyons. Veillez bien sur lui. Nous ne demandons pas une réparation des dommages causés à cause des multiples liens qui existent entre nous. Faites en sorte qu’il ne revienne plus par ici, sinon, gare à lui ».

Ainsi dit, ainsi fait. Ainsi le message a été compris. Pendant longtemps cette affaire est restée entre les habitants de Toula et leurs cousins de Bokoro.

N’est-ce pas là une des vertus de notre cousinage à plaisanterie ? Une façon de dire à ceux qui ne croient plus à certaines de nos valeurs qu’elles existent encore et font toujours leur effet. Même dans des conditions aussi délicates que celles relatives au cas de Y.D.

A. B. COULIBALY

AMAP- Dioïla / 15 septembre 2008