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« Finalement, la CMDT n’est pas si mal lotie » : c’est le sentiment de plusieurs membres de la délégation de la Compagnie malienne pour le développement du textile après leur rencontre avec les acteurs de la filière cotonnière togolaise vendredi dernier, dans le fief des Eyadema, à Kara.

Au Togo, la filière-coton est démantelée entre la société nationale, la Sotoco, qui possède trois usines d’égrenage et qui s’occupe de l’encadrement des producteurs, trois égreneurs privés, des producteurs et des transporteurs qui, souvent, ne parlent pas le même langage.

« La Sotoco n’est pas privatisée, mais elle en subit les règles », affirme son directeur de production, Agossou Yao, pour qui cette société, créée en 1974 pour s’occuper des filières, s’est recentrée sur le coton pour plus d’efficacité.

Baba Diabakatié est le président de la Fédération des groupements des producteurs de coton du Togo (GPC). Selon lui, les producteurs togolais, dans l’optique d’une organisation faîtière, ont réussi depuis 6 mois à mettre sur pied une fédération regroupant les groupements villageois qui, eux, existent depuis plus de 5 ans.

La Sotoco accumule des arriérés de paiement de plus de trois ans pour certains producteurs. « Nous avons des difficultés depuis certain temps. Pour la campagne 2005-2006, nous nous sommes engagés à payer intégralement la production, nous verrons comment éponger les arriérés », affirment certains responsables de la société.

Nouvelles perspectives

Le Togo a produit pour la campagne écoulée 170 000 tonnes de coton graine, mais s’attend à une production de 70 000 tonnes cette année. Une chute que les responsables expliquent par les « aléas climatiques » et les difficultés financières. Le pays a acheté à 150 F CFA le kilo du coton. Selon le directeur commercial de la Sotoco, « le prix d’achats du coton aux producteurs est fixé par une commission interministérielle qui s’inspire du cours mondial ».

Mais, cette solution ayant montré ses limites, le pays a opté pour la prochaine campagne, 2006-2007, pour « le jeu de la vérité des prix ». Dans ce cadre, un séminaire, jugé par toutes les parties comme « une première majeure », a réuni tous les acteurs de la filière à Kara et a planché avec les producteurs sur le mécanisme de fixation des prix et les charges de la société. Un exercice qui a été apprécié surtout par les producteurs qui n’avaient jamais été associés aux prises de décision de la société.

C’est d’ailleurs ce qui fera dire à M. Diabakatié que « les producteurs attendent avec impatience de pouvoir entrer dans le capital de la Sotoco. Car, si à ce niveau une privatisation n’est pas à l’ordre du jour (la société est étatique à 100 %), beaucoup espèrent quand même sur une ouverture du capital aux producteurs ».

Pour le président du GPC, ceci ne serait que justice car le coton, au Togo, fait vivre selon lui plus de 3 millions de personnes. Il représente 20 % des recettes globales d’exportation et 60 % des recettes d’exportation des produits agricoles.

Lundi, la délégation a rencontré les producteurs du Bénin à Cotonou avant d’aller à Parakou à la rencontre des responsables de la société locale de transformation du coton.

Alexis Kalambry (envoyé spécial au Togo)

INTRANTS AGRICOLES

« Tout est dans la qualité »

Parmi les défis qui se posent à la chaîne de production du coton, figurent en bonne place la question des intrants, l’organisation et la passation des marchés. Ces questions occupent une grande place dans la mission que la CMDT a organisée dans certains pays comme le Burkina, le Togo et le Bénin.

« Tout est dans la qualité », affirme le directeur de la production de la Sofitex du Burkina Faso. « Pour les intrants, il faut être vigilants. Nous avons connu des années où des paysans se sont suicidés du fait que les intrants étaient de mauvaise qualité ».

Du coup, les Burkinabés ont trouvé une solution, jugée « transparente » tant par l’Union nationale des producteurs de coton (UNPCB) que par les responsables des usines.

Pour jouer à fond la transparence, l’UNPCB, en collaboration avec les autres intervenants du secteur, ont mis en place une commission d’attribution du marché des intrants. Cette commission est présidée par les producteurs. « Il faut savoir jouer entre la qualité et le prix », ajoute M. Kaboré, directeur de la production de la Sofitex.

Au Togo, le principe est simple mais moins démocratique et moins transparent. En effet, selon Agossou Yao, directeur de la production de la Société togolaise de coton (Sotoco), « nous évaluons les besoins en intrants d’après les estimations de nos techniciens et nous passons les marchés ».

C’est également la société qui fixe unilatéralement les prix aux producteurs. Un système qui fait couler beaucoup de salive et qui fait jaser les producteurs togolais, mais qui a au moins le mérite de raccourcir les délais.

Alexis Kalambry
(envoyé spécial au Togo)

26 avril 2006.