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Les bouchers et d’autres professionnels de la filière ont observé un premier mouvement de grève et menacent de remettre ça.Les acteurs de la filière viande et bétail (éleveurs, producteurs de bétail, vendeurs, bouchers) menacent d’aller de nouveau en grève, après avoir observé un premier mouvement de 72 heures, la semaine dernière.

La grève avait été très suivie dans la capitale où trois jours durant, les étals des bouchers étaient restés désespérément vides, obligeant les ménagères à se rabattre sur la volaille ou le poisson (fumé, séché ou de mer). Le poisson de mer importé du Sénégal et de la Côte d’Ivoire communément appelé « kôkôdji djèguèni », auparavant boudé par les ménagères pour son odeur ou son goût, a pris une belle revanche pendant la grève.

Et dans l’ensemble, les poissons importés ont vu leurs prix monter en flèche. Ils étaient vendus entre 600 et 1000 Fcfa le kilo, selon les variétés. Pendant la période de la grève, il fallait débourser de 1000 à 1500 Fcfa pour un kilo toujours en fonction de la qualité de l’espèce. Quelles étaient donc les raisons de ce mouvement ? Les acteurs de la filière viande et bétail se plaignent « de problèmes d’insécurité ». Moussa Traoré est le président d’une coopérative des vendeurs et éleveurs dénommé « Djiguiya ».

A ce titre, il est l’un des meneurs du mouvement. Il explique que le cahier de doléances soumis aux autorités comporte 10 points essentiels. Sur cette liste, figurent entre autres revendications, la sécurisation des animaux, l’application de la loi pastorale en matière de pistes de passage des animaux, l’aménagement de sites d’abreuvement, la mise en application des dispositions sur la vente des tourteaux et jus sucriers produits par l’usine Sukala. « Les bagasses de canne à sucre et les autres résidus produits par la sucrerie de Dougabougou ont toujours été réservés aux éleveurs pour l’alimentation des animaux. Aujourd’hui, ces produits sont exportés en grandes quantités vers des pays voisins où ils sont utilisés à d’autres fins. Cela au détriment des éleveurs maliens », dénonce Moussa Traoré.

D’autres doléances concernent le problème récurrent de transport des animaux. Les éleveurs soutiennent que peu de transporteurs acceptent d’acheminer les animaux des zones de transhumance vers les villes. Et les rares transporteurs qui interviennent dans le créneau pratiqueraient des prix exorbitants.

Les éleveurs dénoncent également le harcèlement dont ils seraient victimes de la part des agents des Eaux et Forêts. Par rapport à ces différentes revendications, les acteurs de la filière bétail et viande demandent au gouvernement « d’agir vite ». « Nous demandons aux autorités de prendre des dispositions adéquates et diligentes pour sécuriser les éleveurs et leurs animaux dans le Wassoulou. Faute de quoi, une grève illimitée sera décrétée dans les jours à venir », avertit Moussa Traoré en soulignant que la situation est très grave dans le Wassoulou (voir l’Essor de lundi) où la population a entrepris de chasser tous les bergers transhumants de la zone après la mort d’un agriculteur le 29 décembre dernier, qui aurait été tué à la suite d’un incident avec des éleveurs.

Cet incident est survenu à Tabaco, une localité de la commune rurale de Gouanan (ex-arrondissement de Yorobougoula) dans le cercle de Yanfolila. Dès lors, les agriculteurs ont multiplié les actions de représailles contre les éleveurs transhumants. La montée de la tension dans la zone avait conduit le gouvernement à dépêcher le 1er février dernier, une mission interministérielle de bons offices. La délégation était conduite par le ministre de l’Administration territoriale et des Collectivité locales, le général Kafougouna Koné, et comprenait ses homologues de la Sécurité intérieure et de la Protection civile, le général Sadio Gassama, et de l’Elevage et de la Pêche, Mme Diallo Madeleine Bâ.

Et même après cette importante mission, les représailles se sont poursuivies contre les bergers transhumants dont la plupart ont été contraints de quitter le cercle de Yanfolila pour gagner des pays voisins ou les zones de pâturage du cercle de Bougouni.

Face à cette situation, une mission régionale conduite par le gouverneur de la Région de Sikasso, Mamadou Issa Tapo, s’est rendue le 23 mars dernier à Yanfolila. Elles était chargée transmettre un message du ministre de l’Administration territoriale et des Collectivités locales exigeant l’arrêt immédiat de l’expulsion des éleveurs transhumants du Wassoulou. Le président de la coopérative « Djiguiya » assure que dans le Wassoulou, les éleveurs et leurs animaux sont toujours victimes d’exactions.

Des milliers de bêtes auraient été abattues à coup de fusil. « Depuis plusieurs années, nous nous plaignons de l’insécurité dont les éleveurs sont victimes dans le Wassoulou. Nous en avons assez », lance Moussa Troré, expliquant que la zone est un point incontournable de transit des animaux vers la Côte d’Ivoire et la Guinée.

C’est ce qui favorise les conflits d’intérêt entre éleveurs et agriculteurs. « Nous interpellons l’État pour que les textes soient appliqués. Il existe la Charte pastorale et la Loi d’orientation agricole. Ils est important que l’État fasse l’effort d’informer les uns et les autres sur leurs droits et devoirs pour éviter des situations de conflit entre les éleveurs et les paysans », préconise Traoré.

Doussou Djiré

L’Essor du 31 Mars 2010.