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jpg_une-77.jpgLes assises sur la corruption et la délinquance financière qui ont duré quatre jours (du 25 au 28 novembre) ont permis d’analyser et diagnostiquer sans complaisance l’état de la corruption et de la délinquance financière dans tous les secteurs d’activités. Les participants venus de l’intérieur et de l’extérieur du pays, dont d’éminents professeurs d’université ont formulé plusieurs recommandations pour circonscrire le phénomène.

Afin de disposer de structures de contrôle performantes et d’un arsenal de textes législatifs et réglementaires harmonisé, les participants ont ainsi recommandé la relecture des textes pour clarifier les missions des organes de contrôle afin d’éviter des chevauchements dans leurs interventions. Ils ont préconisé la création d’une Cour des comptes.

UNE CENTRALE D’ACHAT

En ce qui concerne l’administration, il est proposé de moraliser les recrutements à tous les niveaux, d’instituer des enquêtes de moralité fiables avant toute nomination par décret, d’étendre la déclaration des biens à tous les cadres nommés par décret et par arrêtés, aux élus locaux, régionaux et nationaux. Pour les postes de responsabilité (civils et militaires), personne ne devrait dépasser cinq ans à son poste. Mais cela devrait se faire dans le cadre d’un plan de carrière.

Pour accroître les ressources de l’état et les protéger, les participants ont recommandé d’évaluer annuellement les performances de l’administration, de ma”triser les dépenses, d’obliger tout propriétaire de véhicules privé et public à se soumettre aux formalités de dédouanement conformément à la législation en vigueur. Dans le même d’ordre d’idées, il a été proposé de payer les recettes de l’État (impôts, droits de douane, taxes diverses) au moyen de versements bancaires lorsque la somme à acquitter dépasse 100 000 Fcfa. Les paiements au profit des usagers doivent également se faire au moyen de chèques bancaires émis par le Trésor public quand le montant de la somme excède 100 000 Fcfa.

Il est proposé de créer une centrale d’achat dont la vocation serait de conduire les passations de marchés pour le compte de l’Etat et diverses administrations afin de réduire au minimum le fractionnement des marchés et la pratique des passations des marchés de gré à gré. Cela, pour réaliser d’importantes économies d’échelle.

La lutte contre la corruption dans la justice a également retenu l’attention les participants. A ce propos, ils ont proposé une reforme du Conseil supérieur de la magistrature par rapport à sa composition et ˆ son mode de saisine. Le code pénal devrait être révisé afin que certaines infractions financières (corruption, abus de biens sociaux, détournements de fonds) ne soient plus qualifiées de crimes, mais de délits, dans le but d’accélérer les procédures de jugement. Les longues périodes d’attente propices aux manipulations, aux trafics d’influence, aux interventions intempestives seront ainsi évitées. Toujours par rapport ˆ la justice, il a été aussi suggéré de publier les décisions de justice dans une revue spécialisée.

Les états généraux sur la corruption et la délinquance financière recommandent de suspendre de leurs responsabilités administratives, les agents impliqués dans les opérations de corruption et de délinquance financière, en attendant l’aboutissement de la procédure judiciaire. Les cadres reconnus coupables d’atteinte aux biens publics ne doivent pas être nommés à d’autres postes de responsabilités administratives.

Par rapport à l’éducation et à la formation, la rencontre suggère de moraliser les subventions accordées aux écoles privées, d’interdire le port d’arme dans l’espace scolaire et universitaire, de moraliser tous les examens et concours dans tous les secteurs.

S’agissant de l’emploi, un domaine très propice aux mauvaises pratiques, les participants ont recommandé de contrôler en permanence la présence des agents des services publics sur les lieux de travail, et de contrôler périodiquement les effectifs de la fonction publique.
Pour les partis politiques, une recommandation propose de soumettre leur accès aux financements publics à leur capacité de formation, de conscientisation de leurs militants à la citoyenneté et à la lutte contre la corruption et la délinquance financière. Les états généraux estiment qu’il est bon de faire l’audit des comptes des partis politiques ayant bénéficié des subventions de l’Etat par les structures de contrôle, de fixer les montants des frais de campagne à ne pas dépasser par les candidats pour toutes les élections.

DES DÉBATS PASSIONNANTS

Il est également recommandé la création d’une structure pérenne pour assurer le suivi et l’évaluation des mesures mises en œuvre par les autorités pour lutter contre la corruption et la délinquance financière, et pour recevoir les plaintes des citoyens victimes d’actes de corruption avérés.

Le président du Comité préparatoire des états généraux sur la corruption et la délinquance financière, Modibo Kéita, s’est réjoui du bon déroulement des travaux et a souligné que les débats ont été passionnants, mais marqués par le sceau de la responsabilité et de la tolérance. Il a remercié tous les participants, les experts et les médias pour la qualité de leurs contributions.

Le Premier ministre qui présidait la cérémonie de clôture, a de son côté remercié le Comité préparatoire pour la qualité du travail, et les partenaires au développement pour leur accompagnement. Modibo Sidibé a réaffirmé la volonté du gouvernement de faire de la lutte contre la corruption et la délinquance financière son cheval de bataille conformément à la Lettre de cadrage qui lui a été adressée par le chef de l’Etat et conformément à la Déclaration de la politique générale. Il a promis que le gouvernement accordera une attention particulière aux recommandations issues de ces états généraux sur la corruption et la délinquance financière.

M. KEITA

Essor du 01 décembre 2008