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Peu d’arguments peuvent couvrir les atermoiements des Nations unies dans l’optique d’une opération militaire immédiate au nord du Mali en proie à des islamistes et bandits de tout acabit. Nos compatriotes sont seulement peinés de voir leur nation tombée dans les profondeurs d’un précipice dont il serait difficile de la sortir. C’est à croire que l’intervention internationale est un mort-né.

Les autorités maliennes ont sollicité le concours de la Cédéao et du reste de la communauté internationale dans la reconquête des régions du Nord tombées entre les mains des terroristes, narcotrafiquants et autres jihadistes au lendemain du putsch du 22 mars 2012. La situation sur le terrain requiert une intervention militaire.

Mais, il n’existe aucune certitude sur l’envoi d’une force internationale en vue d’épauler les soldats maliens dans l’exercice de leur devoir régalien de recouvrement de l’intégrité territoriale. Les tergiversations persistent dans les rangs des décideurs mondiaux, notamment ceux du Conseil de sécurité. Ce dernier doit en principe se pencher ce 15 octobre sur la possibilité d’envoi de troupes au nord du Mali.

En prélude à cette rencontre, des consultations préliminaires concernant la demande d’intervention du Mali, ont commencé hier jeudi entre les membres du Conseil de sécurité. Elles devraient être suivies d’une convocation de la Cédéao, à laquelle le Conseil demandera plus de détails sur son projet d’opération.

Cependant, les vacillations de l’ONU sont indignes d’une organisation soucieuse de la défense des droits fondamentaux des citoyens du monde. Chaque jour que Dieu fait, de paisibles Maliens sont tués et mutilés, des villes décapitées et des édifices millénaires détruits sans qu’elle lève le petit doigt. Les communiqués de condamnation officiels ne suffisent plus.

Il faudrait des actes concrets pour annihiler les entreprises sordides des occupants du Nord du Mali. Et de nos jours, l’on voit difficilement une meilleure façon d’arriver à cette fin qu’une intervention militaire que les Maliens attendent impatiemment. Une attente d’autant plus compréhensible que cette même ONU et des puissances qui la composent sont intervenues, sans ménagement, sur des terrains plus périlleux que le nôtre, avec des enjeux nettement inferieurs au cas malien.

Qui dit que la mise en stand-by du dossier malien est justifiée ? Selon toute vraisemblance, notre pays est victime des intérêts croisés de « grandes nations ». Car la cacophonie entre leurs actes et les promesses d’un « monde apaisé » où il fait bon vivre est bien perceptible. Si le Mali représentait l’Irak pour certains ou la Libye pour d’autres, il serait mis dans les conditions idéales de sa réunification.

Pour ne pas se conformer à la politique répréhensible de « deux poids, deux mesures », le Conseil de sécurité gagnerait mieux à donner son feu vert à une opération militaire au Mali.

Comme la défunte SDN

Cela lui permettra d’anticiper les critiques et les conséquences d’une probable nonchalance de la gestion du dossier malien. A n’en pas douter, l’ONU se fera encore une très mauvaise publicité si elle n’arrivait pas à statuer rapidement sur le Nord du Mali. Des chercheurs indépendants ont déjà démontré que l’enchaînement des événements dans le Septentrion malien est le fruit d’une ONU dont les leaders sont aux abois à chaque fois qu’il s’agit de trancher sur un dossier sensible. La Société des nations (SDN, ancêtre) s’est-elle réincarnée ?

A force donc de se débiner, l’Organisation n’a plus suffisamment de crédit auprès de citoyens à travers le monde. D’ex-secrétaires généraux des Nations unies n’ont-ils pas attribué leur échec à l’ambivalence et aux politiques impérialistes que les grandes impuissances ont imposées au sein de l’institution ?

A défaut d’une décision commune sur le Mali, des pays comme la France et les Etats-Unis, dans des tirs croisés, se fendent de déclarations tranchantes dans le but de justifier leur engagement dans la lutte contre les maux dont souffre le Nord de notre pays. Mais, il est certain que c’est en regardant dans la direction et en se servant des mêmes conditions que les géants du monde se rendront utiles au Mali.

Plus que l’indétermination et la dissonance des Nations unies, la division représente un sérieux obstacle à l’atteinte des objectifs de l’heure. Seule l’union pourrait nous porter vers l’avant. Et cela doit d’abord se matérialiser au niveau de nos forces armées et de sécurité. Qu’on l’admette ou non, le coup d’Etat du CNRDRE a laissé des séquelles dans l’armée. En plus des tentatives de réconciliation entre bérets verts et rouges, il faudrait songer à remonter le moral à ses militaires qui se sentent écartés et marginalisés depuis le 22 mars 2012.

Tous les militaires qui ont servi le défunt régime d’ATT ne sont pas mauvais et beaucoup parmi eux peuvent aider leur pays contre ses ennemis. Mais, juste pour avoir obéi aux ordres de l’ex-chef suprême des armées, beaucoup sont condamnés à ne faire que de la figuration au sein de la Grande muette, malgré leurs compétences. Que dire de ces officiers « inhumainement » incarcérés à la suite d’un « contre coup d’Etat » alors que leur nation a besoin de leur apport ?

Aussi nos hommes politiques et leaders d’opinion doivent-ils faire table rase du passé en affrontant le présent et le futur. Se livrant à des pugilats interminables, ils continuent de nuire à leur patrie, qui les a pourtant supportés jusqu’à ces jours difficiles. Ces événements malheureux au Mali ne font que révéler la vraie face de nos hommes politiques. Comme si ce qu’on murmurait à propos de nos politiciens se confirmait.

Ogopémo Ouologuem

(correspondant aux USA)

Les Echos du 6 Octobre 2012