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Pour le pouvoir d’Abidjan, c’est la provocation de trop ! Suite à la création du Conseil national de Transition (CNT), mis en place et présidé par le doyen de l’opposition, Henri Konan Bédié (HKB), les autorités ivoiriennes qui n’y ont rien vu qu’un acte de sédition et de défiance, n’ont pas tardé à réagir.  Dans l’après-midi du 3 novembre dernier, les forces de l’ordre font une descente musclée dans les domiciles des opposants HKB, Pascal Affi N’Guessan, Assoa Adou et Albert Toikeusse Mabri. Sans doute leurs résidences devraient-elles être toujours encerclées en ce moment par des éléments de la Police anti-émeute. Et ce n’est pas tout : des hauts cadres de l’Opposition auraient été interpellés.  Dans la foulée de cette démonstration de force, le gouvernement annonce avoir saisi la Justice ivoirienne afin que soient traduits devant les tribunaux, les responsables du CNT, accusés « d’attentat et de complot contre l’autorité de l’Etat et l’intégrité du territoire national ». Désormais donc quasiment réduit à quia, l’organe cornaqué par HKB, qui entendait se substituer aux institutions républicaines, apprend à ses dépens que l’Etat ivoirien se montrera ferme ; il ne tolèrera pas que son autorité soit à ce point bafouée et ne reculera devant rien pour cela. Pouvait-il d’ailleurs en être autrement surtout que ADO, candidat à sa propre succession pour un 3e mandat, vient de sortir largement vainqueur du scrutin du 31 octobre dernier, avec un score sans appel de plus de 94 % des voix ? Fort de cette légitimité, quoique contestée par l’opposition dont on se demande si elle n’a pas prôné le boycott des urnes pour masquer plutôt sa cuisante défaite prévisible, ADO ne pouvait que sonner la fin de la récréation. Et le président s’est retrouvé dans une position d’autant plus favorable que les organisations sous-régionales dans leur grande majorité, n’ont pas trouvé grand-chose à redire sur la régularité de ce scrutin et que bien des  chancelleries occidentales ont pris bonne note de l’annonce des résultats provisoires.

Le mieux serait de privilégier la voie de la négociation

 Il est vrai que toutes sont inquiètes de la situation qui prévaut en Eburnie. Face à un tel climat de tension persistante, il faut vite agir avant qu’il ne soit trop tard. Mais pour le pouvoir ivoirien qui semble avoir opté pour la fermeté, l’erreur serait de croire que le tout-répressif pourrait constituer une solution durable et définitive à la crise.  Tout en brandissant le bâton pour tenter de mettre fin aux bravades et autres faits et gestes du CNT de nature à saper l’autorité de l’Etat et à troubler l’ordre public, le pouvoir ivoirien devrait savoir aussi user de la carotte. La situation en Côte d’Ivoire est trop volatile pour qu’on se permette de jouer avec des allumettes. A preuve : l’encerclement du domicile de la résidence du président du PDCI, a aussitôt donné lieu à l’érection de barricades dans les rues de Cocody, quartier de résidence du Sphinx de Daoukro. C’est dire s’il faudra, pour  les autorités ivoiriennes, faire preuve d’une prudence de sioux pour ne pas remuer les tisons. Quant à l’opposition, elle aurait tort de continuer à se braquer, surtout que le rapport des forces n’est pas en sa faveur. D’abord parce que le CNT qu’elle a mis sur pied, ne jouit pas d’une reconnaissance internationale au point qu’elle se voie en mesure d’engager un bras de fer avec le pouvoir. Ensuite parce que son existence ne se fonde a priori sur aucune légalité reconnue. Certes, on peut comprendre que HKB et compagnie tentent un dernier baroud d’honneur, après avoir lamentablement échoué à empêcher ces élections.  Mais il importe à présent qu’ils fassent preuve de lucidité pour ne pas s’engager dans une autre bataille qui s’annonce comme un combat d’arrière-garde. Le mieux, pour cette opposition, serait de privilégier la voie de la négociation, comme l’y a invitée récemment d’ailleurs le Christ de Mama. Quant à ADO qui étrenne son 3e mandat, le plus dur reste à faire, c’est-à-dire réconcilier les Ivoiriens à l’issue d’une élection qui aura davantage accentué la fracture Nord-Sud.

Par CBS

Source: Lepays.bf