C’est le regret que ce haut fonctionnaire a confié à un confrère la semaine dernière. Autant nous sommes fiers que nos enfants et nos fonctionnaires communiquent à l’école et au bureau en langue nationale, autant ce serait inquiétant que ce ne fût pas par choix mais par incapacité de s’exprimer en français, avec leur bac, voire leur maîtrise en poche.
Les élèves de l’école coloniale, dès le CM2, faisaient montre d’une grande maîtrise du français écrit et oral, de l’arithmétique et de la géométrie élémentaires, matières où nos élèves sont encore plus carrents, contrairement à une légende tenace qui voudrait que le Malien fût surtout mathématicien et technicien.
Un ancien coopérant français, ami de l’Afrique et du Mali où il a séjourné plus de vingt ans, comme chercheur à l’ORSTOM, ne cachait pas son souci, lors d’une conférence qu’il a donnée au Centre Djoliba, il y a quelques mois, de voir les jeunes Maliens devenir les manoeuvres de la sous-région.
Que croyez-vous que cet ami du Mali (en tout cas il se voulait tel) récolta ce jour-là pour sa sincérité? Des huées !… Or, c’est un fait que nous assistons, sur notre propre sol, à la mise à l’écart de nos demandeurs d’emploi au profit des étrangers africains, et cela, aussi bien dans le secondaire que dans le tertiaire.
D’où vient le mal? De l’échec de nos différents systèmes scolaires formels depuis l’indépendance. Et ceux-ci ont échoué parce que le pays manquait de citoyens responsables participant effectivement à la gestion de la cité.
C’est du moins ce qu’a soutenu le Pr Sall, président du CRI, lors de sa dernière conférence sur l’éducation au Centre Djoliba, mettant le doigt sur la plaie de la société malienne, une société qui a plus d’un siècle d’aliénation parentale, celle qui s’est installée du jour où elle a attendu que “l’enfant de l’école” finisse ses études pour venir la diriger en sa qualité d’homme instruit (par le Blanc).
Pendant que le ressort moral de la famille se relâchait ainsi, de nouveaux périls nommés “Droits de l’enfant” et “Droits de la femme” faisaient leur apparition pour parachever l’oeuvre de déstabilisation de la famille. Conséquence : n’ayant pas été formés à la tâche, les jeunes revendiquent des places toutes faites pour eux et leur part du Trésor.
Ainsi, il y a à peine un mois, les jeunes juristes se plaignaient qu’au lieu de 55 admis prévus par le Fonds canadien, l’Etat n’ait cru devoir déclarer admis que 6 d’entre eux au concours des auditeurs de justice (pour l’accès à la magistrature.
Croyant régler un problème, celui de l’échec scolaire massif, en faisant passer tout le monde en classe supérieure, et même au bac et aux examens professionnels, les différents ministres de l’Education du Mali n’en ont-ils pas créé un plus grave, celui de l’emploi à procurer aux jeunes qui ont reçu des diplômes de complaisance?
N’est-il pas temps d’en finir avec la facilité et de châtier l’indiscipline?
I. KOITA
28 février 2006.