L’histoire de l’amiral Bubo Na Tchuto tient tout simplement du merveilleux. D’abord, jeudi il passe sans transition d’un statut de réfugié barricadé au siège bissau guinéen des Nations-Unies à celui de cerveau d’un drôle de putsch.
Ensuite, comme pour semer plus de confusion, il désigne le général Antonio Injai nouveau chef d’État major après avoir mis aux arrêts le titulaire du poste Induta ainsi que le Premier ministre Carlos Gomez Junior. Et troisième curiosité, ce « coup d’État » dénoncé par le Portugal, la France et la Cedeao, entre autres, n’est pas contre le président élu Malam Bakaye Sagna qui était, selon une dépêche d’Apa, en train de négocier dans la matinée la libération de son Premier ministre.
Peut-on faire un coup d’État en arrêtant juste un chef d’État major et le Premier ministre au lieu du président de la République élu ? Oui c’est possible apparemment en Guinée Bissau où le chef d’État major symbolise la puissance de l’armée qui est le seul détenteur du pouvoir politique dans ce pays militariste, abonné aux putschs et ballotté par les cartels du narcotrafic.
L’assassinat sauvage de Joao Bernardo et de son chef d’État major en mars 2009 avait donné lieu à des élections démocratiques en juin de la même année, ouvrant pour ce pays pauvre et troublé un espoir qui aura été de courte durée.
A condition, bien sûr, que le putsch en cours soit consommé. Ce qui n’est pas encore le cas malgré le fait que la réalité du pouvoir était dans les mains des conjurés hier. Il est vrai : cette fois-ci, il y a une donne dont le cas Viera (qui n’avait même pas été assimilé à un putsch) n’avait pas bénéficié. Il s’agit de l’indignation instantanée de la Cedeao et de l’UA conjuguée aux pressions-menaces de la communauté internationale. Mais c’est tout ce qui reste.
Adam Thiam
02 Avril 2010.