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La majorité dicte sa loi à l’opposition (7 sièges contre 3)

Le bras de fer entre la majorité présidentielle et l’opposition autour de la désignation des dix représentants des partis politiques au sein de la CENI a enfin connu son dénouement. C’était le mardi 23 septembre, lors de la réunion du cadre de concertation entre les formations politiques et le département de l’Administration territoriale et des collectivités locales, présidée par le ministre Kafougouna Koné lui-même. Après cinq heures de débats, les partis ont fini par accepter la répartition suivante : majorité (7) opposition (3).

Les 15 et 16 septembre dernier, les partis politiques se sont réunis à la demande du ministre Kafougouna Koné afin de désigner leurs représentants au sein de la CENI. Sans succès.

La loi électorale prévoit dix postes à répartir de façon équitable entre les partis politiques. Aussi, l’opposition a-t-elle suggéré cinq pour elle et les cinq autres pour la majorité. Celle-ci a contesté cette clé de répartition et a proposé sept pour la mouvance présidentielle et trois pour les opposants. Chacun était resté arc-bouté sur sa position. Un constat de carence a donc été adressé au ministre Koné, tout en sollicitant son intervention pour débloquer la situation.

C’est pourquoi, le ministre de l’Administration territoriale et des Collectivités locales a rencontré, le mardi 23 septembre, les partis pour leur demander de s’entendre. Faute de quoi il serait obligé d’appliquer le principe de la proportionnelle qu’il a appelée la règle de trois sur la base des partis de la majorité et de l’opposition présents dans la salle. Auparavant, Kafougouna Koné avait fait l’historique de la représentation des partis au sein de la CENI avant de conclure que, selon lui, équité est bien différente d’égalité.

Ce qui a permis d’ouvrir les débats. Et c’est Djiguiba Kéïta dit PPR qui a donné le coup d’envoi en des termes durs : «Le débat est vicié. Le ministre de la République que vous êtes a pris position. Si vous fuyez votre devoir, l’histoire va vous juger. En 2007, vous avez organisé des élections truquées et la Cour constitutionnelle les a bien confirmées. Le PARENA ne souscrit pas à la règle des trois». Le bouillant responsable à la communication du parti du bélier blanc sera soutenu par le président du Morena, M. Doumbia, qui a relevé que la règle de trois n’existe pas dans la loi et a même suggéré la suppression pure et simple de la CENI.

Même son de cloche chez l’ancien ministre de l’environnement, Nancouma Kéïta du RPM, qui a laissé entendre que force doit rester à la loi, qui doit être appliquée dans son esprit et dans sa lettre. Selon lui, dans une démocratie, l’opposition doit s’exprimer avec une certaine aisance et cette règle de trois n’est pas de nature à la conforter.

Le président du Front pour la démocratie et la République (FDR) Me Mamadou Gakou, a même sorti le dictionnaire Larousse pour prouver que «équité= égalité= vertu =justice=impartialité». Et Me d’ajouter : «nous ne sommes pas à l’Assemblée nationale où le diktat de la majorité l’emporte. Il s’agit de respecter la loi en ses termes et dispositions et cela de façon rigoureuse».

Le président de l’UFDP, Youssouf Traoré, a rejeté ces arguments en soutenant que l’équité est bien différente de l’égalité. Ainsi, il a appelé à la sagesse des uns et des autres afin que la loi soit appliquée. Avant de s’interroger en ces termes : «pourquoi tant de tapages ?». Et d’y répondre : «A la CENI, il y a à boire et à manger». Me Hassane Barry de l’UDD renchérit : «l’équité, c’est le poids, c’est la règle de trois. Tu ne vaux rien politiquement, tu n’as rien. La répartition à travers la clé cinq pour chaque partie est une violation de la loi».

Quant à Drissa Traoré du MPR, il s’étonne que l’opposition puisse prétendre à quelque chose.

Le dialogue de sourd a donc prévalu le Général Kafougouna a juré la main sur le cœur qu’il ne supporte aucune tendance et que si le blocage persiste, il se verrait contraint d’appliquer la règle de trois.

C’est dans ce contexte qu’une suspension de dix minutes a été observée. A la faveur de celle-ci, l’opposition, à travers son porte-parole, Nankouma Kéïta, a déclaré que l’opposition suggère quatre pour elle et six pour la majorité. Cette proposition n’a pas été acceptée par la majorité et l’ancien ministre RPM de dire : «Nous mesurons tout l’enjeu et nous ne boycotterons pas la CENI. Nous prenons acte de l’attitude de l’opposition, c’est-à-dire sept contre trois».

Touché par ce comportement hautement responsable, le porte-parole de la majorité, Younouss Hamèye Dicko du RDS et non moins ancien ministre des Enseignements Secondaire, Supérieur et de la Recherche Scientifique, a rendu un vibrant hommage à l’opposition. Avant d’ajouter que la majorité prend acte et saura, au moment venu, lui rendre la bonne monnaie.

Enfin, le ministre Kafougouna Koné s’est réjoui de cette entente cordiale entre les partis politiques et leur a demandé de lui faire parvenir, avant ce jeudi 25 septembre, au plus tard à 10 heures, la liste de leurs membres désignés.

Maintenant, il reste au deux camps de choisir leurs représentants à la CENI. Cela pourrait également donner lieu à des tiraillements à l’interne. A suivre.

Chahana TAKIOU

25 Septembre 2008