La mauvaise gouvernance étalée aux quatre vents
Le désert avance à grands pas au Mali au vu et au su de tous sans qu’aucune politique lisible et efficace ne contrecarre le fléau. Incapable de faire face à cette désertification continue, le gouvernement a encore tendu sa cagnotte aux partenaires financiers.
S’il y a un défi que le monde contemporain se doit de relever sans aucun détour, c’est bien le réchauffement climatique. Phénomène d’augmentation de la température moyenne des océans et de l’atmosphère à l’échelle mondiale et sur plusieurs années, le réchauffement climatique menace sérieusement l’humanité. C’est pourquoi il est au centre des interventions des grandes puissances mondiales. Il est même rare de voir le président Obama des Etats-Unis terminer un discours sans directement ou indirectement soulever la question qui nécessite une synergie d’action au niveau international.
Au delà des conséquences directes, physiques et climatiques du réchauffement planétaire, celui-ci influera sur les écosystèmes, en particulier la biodiversité. Cette dernière est un maillon essentiel dans la lutte contre le fléau mondial. D’énormes efforts doivent par conséquent être concentrés sur la préservation de la biodiversité. A cet égard, les pays frappés par la sécheresse sont particulièrement concernés. Et le cas du Mali est spécifique.
« Deux tiers du territoire national est désertique et le tiers qui nous reste est suffisamment dégradé. Si nous ne prenons garde, si nous ne nous investissons pas dans la gestion et la protection durables du peu de ressources qui nous restent et dans l’intensification du reboisement, la situation au Mali se dégradera davantage », avait mis en garde le directeur national de la conservation de la nature, le colonel Alassane Boncana Maiga lors d’un de nos entretiens en 2008.
Plusieurs mois sont passés et la situation ne fait qu’empirer jour après jour. L’avancée du désert au Mali est presque inexorable. La faune et la flore de la région de Mopti, la Venise malienne, sont désormais affectées, la faute certainement à un manque de vision des autorités et à une politique décimée par des mesures cacophoniques.
Le président de la république a enchaîné l’énumération des mesures et des grands projets environnementaux lors du récent lancement des travaux de la grande muraille verte à Bamako tandis que son pays s’engouffre de plus en plus dans le désert. Et pour des causes connues et loin d’être inévitables.
Jadis réputé pour sa verdure, le cercle de Kita passe de plus en plus pour une zone décapitée d’une de ses potentialités. Lassées par l’exploitation abusive de leurs forêts par des Chinois avec qui des contrats signés sur le dos de la nation, les populations de la Capitale de l’Arachide ont beau dénoncer le phénomène, rien n’y fait.
L’Etat semble dire aux Chinois : « continuez ». Car rien d’autre ne justifie la suspension puis la reprise de la coupe du bois dans la localité au mépris de l’intérêt de la nation.
Incongruités
A Ménaka, une zone déjà minée par la rareté de la verdure, ni les espèces animales rares, ni les arbres ne sont épargnés par la chasse qui, selon certaines sources, ne profiterait pas au Trésor public alors que la loi en la matière stipule le contraire. Au lieu de protéger l’écosystème, l’Etat s’est donc érigé en complice des braconniers qui n’ont cure des effets néfastes de leurs actes sur les maliens.
Attribuant d’abord les effets du réchauffement planétaire sur le Mali à la « déforestation et à la désertification », M. Sangaré a encore tendu la main aux partenaires étrangers pour une cause nécessitant des antécédents révélateurs d’une gestion saine et efficace. « Nous sommes confrontés au problème de la déforestation et de plus à la désertification. Nous souffrons par conséquent beaucoup du changement climatique. Ce n’est pas une vue de l’esprit pour nous, mais une réalité que nous vivons au quotidien ».
Après avoir cité les hypothèses des « dons d’argent et l’accès aux technologies énergétiques » comme moyen d’accompagnement du Mali, le ministre a ajouté que les Occidentaux « peuvent nous aider dans le domaine de l’agriculture pour nous orienter vers des pratiques agricoles économes et durables par des techniques de maîtrise de l’eau et de production intensive ».
Ce que le ministre n’a pas mentionné, c’est que la lutte contre la désertification dans notre pays est plus une question de gestion qu’un problème financier. L’Union européenne, à travers le Fonds européen de développement (Fed) et ses pays membres, accompagne le Mali dans la protection et la restauration de la biodiversité, surtout au nord.
Les services des eaux et forêts jouissaient d’une réputation auparavant contre ceux qui laissaient leurs animaux s’évader dans la nature. Qu’en est-il aujourd’hui ?
Au lieu d’aller en besogne, Tiemoko Sangaré aurait dû s’assurer que toutes les mesures internes sont au point et que les aides antérieures comme celle de l’UE sont efficacement dépensées pour la cause. Ce qui est d’autant plus nécessaire que même avec l’octroi des sommes faramineuses, le problème continuera tant que l’Etat ne s’assumera pas correctement.
Une chose est d’investir, une autre est de sauvegarder les acquis. De même qu’une chose est de faire voter les lois, une autre est de les appliquer scrupuleusement tout en les renforçant avec des décisions adéquates.
Ogopémo Ouologuem
(USA)
10 Juillet 2009.