Avant la Seconde Guerre mondiale, le continent africain était pratiquement gouverné, colonisé par les bourreaux de ses masses travailleuses.
A la fin de la Seconde Guerre mondiale, les pouvoirs coloniaux étaient dans l’impossibilité manifeste de poursuivre l’odieuse occupation coloniale. Aussi et parce que les peuples colonisés d’Afrique avaient clairement compris qu’aucune nation n’a nullement reçu le droit de la nature le droit de commander aux autres. Parmi les peuples colonisés, beaucoup ont arraché leur indépendance des griffes de leurs colonisateurs par le biais des armes.
Les peuples africains se sont trouvés devant le dilemme : faut- il passer dans le camp socialiste et avoir les anciennes puissances coloniales dans le dos ? Ou alors fallait- il souscrire à la perpétuation de la domination coloniale avec son cortège d’oppression et d’explication ignoble de toutes les ressources du continent aux plans économique, politique, social et culturel ?
Pour pallier audit dilemme, les responsables africains ont préféré s’inscrire sur le tableau anodin du refus du choix ou plus exactement du non alignement, concept crée par le maréchal de Yougoslavie Broz Tito. Mais dans la triste réalité, même les pays qui ont opté pour des orientations socialistes ne sont pas allées au bout de l’option socialiste véritable.
En lieu et place de ce socialisme, a émergé sous certains cieux africains (comme le Mali), un socialisme à l’Africaine. La suite n’a échappé à personne : certains régimes ont été balayés par les forces rétrogrades comme celles du Mali et cela avec la bénédiction totale des ex colonisateurs. C’est d’ailleurs fort de ce constat que Kwamé Nkrumah a dit que « les blancs sont partis pour mieux rester ».
Partout, des foyers de tensions ont été crées (guerres de frontières, fratricides internes, rebellions, coups d’Etat permanents en Afrique, élections colmatées, etc.).
Cinquante ans après l’accession de la plupart des pays africains à la souveraineté, le tableau n’est guère luisant et pour cause :
Au plan économique, l’Afrique est au bas de l’échelle mondiale. Ça et là, il n’y a que misère, faim, disette, malnutrition, manque criard d’eau potable et de logements décents, incapacité pour l’écrasante majorité des populations d’accéder à des soins de santé décents. Bref, le tableau économique n’est guère luisant pour les masses travailleuses d’Afrique. Pendant ce temps, ce sont les responsables politiques et administratifs qui construisent des châteaux au grand dam des travailleurs d’Afrique.
Au plan politique, les cinquante ans d’indépendance enregistrent des souvenirs accablants : les dirigeants africains se sont engagés dans des guerres de clochers au lieu de servir les intérêts supérieurs de leurs peuples laborieux. Les uns après les autres, tous les régimes patriotiques africains ont été balayés par les puissances coloniales et néo coloniales qui ne pouvaient accepter laisser l’Afrique aux Africains.
Cette attitude grégaire desdites puissances rappelle, hélas, cette triste déclaration du ministre français de la Colonisation en la personne de Jules Ferry : « rayonner sans agir, sans se mêler des affaires du monde, pour une grande nation comme la France, c’est abdiquer ». Cela se comprend aisément quand on sait que les fondateurs de la France n’ont qu’une petite portion de la terre, à peine 550. 000km2, un territoire pratiquement pauvre.
Après avoir échoué dans la réalisation de la Communauté française, les dirigeants de l’Hexagone se sont appuyés sur les institutions financières de Brettons Wood (le Fonds monétaire international et la Banque mondiale) pour continuer à spolier l’Afrique, à sucer le sang de ses peuples laborieux. Mais autant il est vrai que l’épervier ne peut servir les intérêts des poussins de la basse cour, autant il reste évident que le FMI et la Banque mondiale ne peuvent servir la cause du développement du continent africain.
Toute la coopération franco- africaine fut ainsi subordonnée à la bonne entente entre ces institutions financières monopolistes et les pays africains. A la longue, les puissances coloniales et néo coloniales ont réussi à mettre le continent africain sous perfusion permanente et cela sous la responsabilité de dirigeants africains qui n’ont que faire des intérêts supérieurs des masses travailleuses d’Afrique.
Après avoir constaté toutes les limites objectives du FMI et de la Banque mondiale, les néo- colonialistes ont changé le fusil d’épaule. A partir du sommet de la Baule en France entre les chefs d’Etat et de gouvernements de l’Afrique et la France coloniale en 1990, il était demandé aux gouvernants africains de balayer devant leurs portes, sans quoi, la coopération franco- africaine en pâtirait dangereusement. C’est ainsi que la France contraint bien de dirigeants africains à s’habiller avec le grand manteau de la démocratie capitaliste bourgeoise.
Face à cet impératif français, les présidents malien et tchadien (Moussa Traoré et Hissen Habré) ont déclaré à la face du président de la France, François Mitterrand que « la démocratie n’est pas une camisole de force ». La suite est connue de tous : ces deux présidents « rebelles » ont été chassés du trône aussi parce qu’ils ont estimé que l’Afrique n’a pas besoin d’une démocratie imposée du dehors. Nous ne voulons nullement dire ici que ces deux présidents traitaient bien leurs peuples. Au contraire, ils n’avaient que faire des intérêts supérieurs de ces peuples.
Mais force est de reconnaître que la France a toujours du mal à se rendre à l’évidence que l’Afrique n’est pas un territoire français qu’elle peut continuellement gérer à sa guise.
Au plan politique toujours, il est évident aujourd’hui que la « démocratie est devenue une autre source d’exploitation et d’oppression de leurs masses laborieuses. Ainsi :
Au nom de la « démocratie », n’importe qui peut accéder au trône en Afrique même avec un passé suffisamment sale.
Au nom du jeu « démocratique », toutes les combines sont désormais permises. C’est d’ailleurs pourquoi pour former des groupuscules de vautours aux becs tranchants pour picorer les maigres ressources des Etats africains.
Au nom de la « démocratie », les politiciens se donnent le droit de spolier les travailleurs africains. Ainsi, de plus en plus en Afrique ceux qui travaillent n’ont rien et ceux qui ne font rien regorgent de toutes les ressources nationales. Que dire dans ces conditions des incalculables détournements de deniers publics ?
Au nom de la « démocratie », on diabolise les concepts de classes et de lutte des classes. Mais personne ne peut nier aujourd’hui que la « démocratie » en construction en Afrique est une grosse poudre aux yeux des naïfs et aveugles. Cette démocratie est l’expression parlante des intérêts des nantis aux dépens des peuples travailleurs. Cette démocratie sera toujours la chasse gardée de ceux qui ne peuvent vivre que de la spoliation des travailleurs.
Au plan sanitaire, il n’est plus un secret pour personne que lorsqu’un pauvre tombe malade il se place entre les produits de la médecine traditionnelle et de la morgue. Cela est d’autant exact que les pauvres n’ont plus le droit de taper à la porte des pharmacies modernes du fait de leur extrême pauvreté. Les hôpitaux en Afrique, notamment au Mali sont de plus en plus des mouroirs au grand dam des lois sophistiquées élaborées pour meubler la « démocratie » africaine.
Au plan culturel, l’acculturation de notre continent se poursuit avec zèle. Aujourd ‘hui, tout se passe comme si les grands parents africains n’ont rien laissé à la postérité. Mais il reste évident que jusqu’au 16e siècle, l’Afrique avait le même niveau de développement que l’Europe au double plan scientifique et technique. Pour mieux s’en convaincre, nos lecteurs peuvent se reporter sur le célèbre ouvrage du Togolais Edem Kodio, intitulé « Et demain l’Afrique ? »
Au plan social, le sens de l’humai, cède de plus en plus la place au calcul individualiste sordide.
L’Afrique tout entière renferme toutes les potentialités pour un décollage économique véritable. Le grand obstacle est l’absence de volonté politique responsable pour servir autrement les peuples d’Afrique.
Aujourd’hui, plus que jamais, le continent africain a besoin d’une nouvelle race de chefs d’Etat mais aussi d’une autre classe politique au service du développement. Ainsi, il apparaît clairement qu’une autre Afrique est possible si et seulement si les peuples travailleurs du continent décident d’une recomposition du paysage politique africain.
Seulement ainsi, l’Afrique reviendra aux Africains. Cela restera un vœu pieux tant que l’Afrique ne tournera pas le dos à la démocratie bourgeoise capitaliste qui assassine l’avenir.
N’en déplaise aux valets africains de l’impérialisme yankee et de ses mandibules européennes.
Pour réussir cette mission historique, les forces révolutionnaires doivent se retrouver à tout prix en vue de taire leurs fausses querelles de leadership. Sans cette union, le développement à l’avantage des masses travailleuses ne sera pas au rendez- vous. c’est donc le moment pour les patriotes africains de sortir des rangs des partis politiques ennemis des peuples pour former un camp unique de tous ceux qui veulent le changement véritable et la démocratie au service des travailleurs. En face de ce camp se dressera celui de ceux et de celles qui ne veulent pas le changement sérieux.
En effet, il est aujourd’hui urgent pour l’Afrique de procéder à la recomposition du paysage politique africain. Pour ce faire, rappelons avec Marx et Engels que depuis la fin de la propriété commune du sol, l’histoire de toute l’humanité reste l’histoire de la lutte des classes. Aujourd’hui, les nantis spolient les peuples travailleurs. C’est bien cela le vrai contenu de la démocratie et de la mondialisation.
Si l’Union africaine veut servir les intérêts des masses travailleuses du continent africain, elle doit faire sienne cette simple vérité que l’Europe ne peut maintenir sa puissance et sa croissance économique qu’en pillant les ressources africaines au nom de la fallacieuse démocratie qui tue l’espoir de millions d’hommes.
Que Dieu sauve l’Afrique !
Fodé KEITA
13 Décembre 2010.