Aujourd’hui le Malien semble coincé entre la culture et les lois du monde moderne, et les gouvernants donnent l’impression de vouloir s’en accommoder.
Au Mali, on ne saurait mettre en doute ou nier l’engagement du législateur dans la résolution et l’organisation de la vie du pays. Dans son travail de tous les jours, il a pourvu tous les domaines de la vie de textes de loi. Cependant, s’il est une chose qui saute aux yeux et qui fait mal à notre pays, c’est l’inapplication de ceux-ci.
L’absentéisme et le clientélisme se sont confortablement installés dans notre administration. Seule la minorité en tire profit, tout le monde est victime des conséquences néfastes de ces comportements. Et pourtant, il y a des lois. La corruption et le détournement ont conduit bon nombre de nos sociétés d’Etat en faillites et « contraint » l’Etat à faire de la privatisation un mode de gestion. Or, il y a des lois ! L’Etat, régulièrement, recrute de nouveaux agents pour renforcer les forces de sécurité.
L’ampleur de l’insécurité dans tous les domaines laisse perplexe sur l’utilité de ces recrutements. Les justices mal rendues et les décisions de justice non exécutées créent des tensions dans le pays. Pour cela, personne ne respecte les dispositions légales, qu’ensemble, nous avons pu trouver. Le comportement est à mi-chemin entre le légal et le proscrit, si ce n’est tout simplement le « je-m’en-foutisme ».
Aujourd’hui, face a l’ampleur de l’inapplication des lois et des textes le citoyen est confus, et parce qu’il est contraint de vivre, il se prête à ce jeu qui lui fait plus mal. L’absence de recours (application correcte des lois) ne lui laisse pas le choix. A la question de savoir pourquoi les lois ne sont pas appliquées pour régler et réguler la vie du pays, les instances de décisions évoquent la culture malienne.
Chacun est le frère ou la sœur de quelqu’un, chacun est le cousin du cousin de l’autre cousin. Le notable, l’imam, le chef des griots, le grand oncle, la tante, le grand frère, sont présentés comme les officiers, des bons officiers, au détriment de la loi et au nom de la culture, on ne peut rien leur refuser !
Trancher sur le vif
A l’analyse, il est évident qu’au Mali, on est tous sensibles à l’appel de la culture, sans exception. Alors pourquoi ne prenons-nous pas des lois et des textes s’inspirant de notre culture, pour qu’enfin nous ayons des instruments fiables pour gérer notre vie ?
A priori , cette éventualité n’est pas envisageable. L’évolution du monde actuel ne saurait s’accommoder d’un pilotage à vue tributaire des états d’âme et affinités. Il faut une organisation lisible et applicable selon le domaine et le contexte de façon rationnelle.
Aujourd’hui, le Malien semble coincé entre la culture et les lois du monde moderne. Et les gouvernants donnent l’impression de vouloir s’en accommoder. Le facteur culturel ne saurait être une couverture pour laisser les lois en chute libre, des lois financées avec l’argent et l’aval du contribuable.
Aujourd’hui, la culture est mise en avant pour fermer les yeux sur les entorses. On lutte timidement contre la corruption, la délinquance financière, le non-respect des clauses (exonérations), le non-respect des lois du marché, la fraude, l’incivisme, le népotisme…
Il est grand temps de faire un choix de société différent de ce que nous entretenons présentement. Il a montré ses limites et son impact sur la vie, une catastrophe que chacun vit dans sa chair. Les discours politiquement corrects et les congratulations démagogiques ne feront que renforcer ce climat de laisser-aller généralisé.
Les, débats, les concertations et autres forums pour discuter de l’état de la nation sont comme des pièces montées pour gérer à l’amiable où la vérité est occultée. Chacun au sortir de ces débats et rencontres est vainqueur. Pour construire un pays, il faut de la rigueur tributaire de la vérité. Celle qui fait mal, celle qui ne partage pas la poire en deux pour contenter tout le monde.
Bakary Sangaré
21 Octobre 2008