Voici la lettre que je m’apprête à envoyer au grand-frère. Ceux d’entre vous qui pensent qu’ils n’ont rien à voir à mes torchons sans queue ni tête et qui n’ont toujours pas compris que cette rubrique intitulée de quoi je me mêle est juste pour rire, qu’ils lèvent la main et se rangent à droite. Ah voilà, il y en a très peu heureusement. Je suppose donc que les autres veulent savoir le contenu de ma lettre et la voilà. Sauf votre respect, monsieur le Président de la République, je viens très solennellement renouveler la demande que je vous ai faite l’an dernier de me mettre sur la liste des partis qui doivent bénéficier du financement public.
Car je remplis tous les critères requis. J’ai un siège : ma maison comme la plupart des partis bénéficiaires.
J’ai des militants et comme c’est le cas des partis qui se tapent aujourd’hui la poitrine : ce sont les membres de ma famille, mes cousins et mes nièces. La seule différence, c’est que n’étant pas de la mangeoire publique, moi je ne peux pas exhiber ces cadres qui transhument au gré des investitures présidentielles, allant là où leur ventre les appelle.
Je n’ai pas encore d’élus à prendre en charge, mais des anciens élus qui ont conquis leurs sièges à ma table à manger, j’en ai quelques-uns.
Et parmi eux, il y a des gens de Boni, de Débéré, et même de Nioro.
Et puis, on sait comment ils font les partis : ils commandent soixante pancartes et ils les affichent où les gens peuvent voir. Je peux faire ça moi aussi. Et avoir une comptabilité qui est un critère d’éligibilité, qui ne peut pas le faire ?
Et faire des motions de soutien, des déclarations, des communiqués, je peux le faire moi aussi. La seule chose qui m’aurait fait recaler, monsieur le Président, c’est si on me demande de participer à des élections sans bourrer les urnes ou sans acheter des voix. Là, vraiment les partis me battent, surtout ceux qui ont eu le plus d’argent.
Car ils savent tellement faire des élections intègres et transparentes. Mais sur cet aspect, monsieur le président, j’implore votre clémence. Mettez-moi sur cette liste.
Cela aurait le même résultat sur la démocratie que ce qu’on est en train de faire. Sinon, je sais que je suis en train de me mêler de ce qui ne me regarde pas. Je vais, en tant que citoyen, demander au Vérificateur Général d’aller vérifier ces comptes puisque c’est de l’argent public. Or Sidi Sossoh Diarra et la castagne, vous savez !
Adam Thiam
16 Mars 2010.