Avez-vous les moyens d’y faire face ? Tel semble avoir été, jeudi dernier, la préoccupation des députés maliens. Ils ont interpellé le gouvernement sur la crise née des subprimes aux États Unis et qui s’est progressivement étendue à l’Europe et à l’Asie. Les ministres interpellés ont donné comme réponse la promesse de quatre nouvelles usines. « La réalisation de ces 4 projets structurants changera la structure de notre balance des paiements en ce sens que nous ferons d’importantes économies de devises du fait que nous n’importerons plus de ciment, ni de sucre et que nos importations d’engrais diminueront fortement », a expliqué le ministre de l’industrie et du commerce, Amadou Abdoulaye Diallo.
La première unité industrielle sur laquelle le Mali compte est la cimenterie de Diamou. La convention d’établissement de cette usine devrait être signée, avant la fin de l’année, pour permettre, dans trois ans, à notre pays de ne plus dépendre du ciment fabriqué à l’extérieur. Le Mali importe 900.000 tonnes de ciment pour un coût de 130,5 milliards par an. La cimenterie de Diamou, qui coûtera 66 milliards, offrira un millier d’emplois et permettra d’approvisionner le pays en ciment à 80.000 F CFA la tonne.
La seconde usine est la société d’exploitation des phosphates du Tilemsi, qui sera réhabilitée avec un investissement de 12 milliards de nos francs. Elle fournira entre 1000 et 1500 emplois et permettra de réduire significativement les importations d’engrais du pays.
Il y a en dehors de ces futures usines, deux projets sucriers. Celui de Markala devra coûter environ 158 milliards d’investissements. Sa capacité va s’élever à une production de 140 000 tonnes de sucre. Par ailleurs, c’est le plus porteur en matière d’emplois, avec la création de 7.200 emplois.
L’autre projet sucrier est celui de Sukala. Il nécessite 75 milliards d’investissement et produira 104 000 tonnes de sucre par an. Le nombre d’emplois attendu est 700. Sa contribution au budget national est près de 2,5 milliards par an.
Mais il y un risque. Si la crise continue à plomber le système capitaliste, l’investissement étranger va baisser. Dans un rapport, la commission des Finances, de l’économie, du plan et de la promotion du secteur privé de l’Assemblée nationale malienne s’inquiète. Elle souligne que l’amplification de la crise est liée au fait que nombre de banques présentes sur le marché des finances structurées ont réalisé, à partir des crédits consentis et des hypothèques reçues, des montages complexes de produits de titrisation auxquels ont souscrit des fonds spéculatifs à partir de ressources empruntées auprès des mêmes banques initiatrices de ces opérations.
Le relèvement des taux aux États Unis a créé une situation où les fonds d’investissement ne pouvaient plus encaisser les remboursements d’obligations sécurisées souscrites. L’enchaînement des défaillances a produit un effet boule de neige largement amplifié par les réactions des investisseurs sur les marchés financiers. Cette capacité de contagion à l’échelle mondiale qui s’explique par l’interconnexion des économies fait justement peur aux parlementaires maliens.
Pourtant, ils savent qu’au Mali, les banques ne sont pas engagées dans des opérations portant sur les produits financiers à risques. Seulement, estime le rapport, une crise durable qui affecte les partenaires du Mali ne peut pas ne pas avoir un impact sur notre économie. Ainsi la baisse de la demande mondiale entraînera un repli de nos exportations et un recul de leurs prix. Un autre risque est lié aux difficultés d’accès au crédit des investisseurs auprès de leurs banques et un reflux des investissements étrangers.
En somme, poursuit le rapport, la baisse de la demande mondiale se traduira nécessairement par la contraction des recettes d’exportation, par une diminution des rapatriements de fonds des immigrants et par un ralentissement de l’activité touristique, le pouvoir d’achat des ménages en Occident étant déjà profondément affecté par la crise.
Les recettes d’exportation sont passées de 730,5 milliards en 2007 à 742,9 milliards en 2008, les transferts des migrants de 140,4 milliards F CFA à 137,6 milliards durant la même période
Pour Abou-Bakar Traoré, le ministre des finances qui se veut rassurant, cette éclaircie de l’économie malienne en 2007 ne devrait pas être assez touchée grâce à une cellule de veille mise en place par le Premier ministre et le système bancaire et financier du Mali et de l’UEMOA.
Sambou Diarra
01 décembre 2008