Ces chasseurs de chaussures usées sont en fait les petites mains d’un négoce, ayant la Côte d’Ivoire comme principal débouché d’exportation.
En 1985, en Côte d’Ivoire, une fabrique de chaussures utilisant comme matière première du caoutchouc recyclé a vu le jour.
Très vite, grâce à ces prix abordables, les chaussures provenant de cette usine se sont imposées sur le marché.
Egalement, la fabrique s’est vite trouvée confrontée à des problèmes d’approvisionnement en matière première. C’est ainsi, que Moussa Sidibé, un opérateur économique malien importateur de ciment en Côte d’Ivoire a été contacté par la fabrique de chaussures.
Chargements de camions furent alors acheminés vers Abidjan par Mr Sidibé.
D’autres commerçants maliens en firent de même.
Vu la réussite de cette fabrique de chaussures, opérateurs économiques se sont alors lancés dans le créneau en Côte d’Ivoire, et au Mali, en ouvrant de nombreuses fabriques.
Au Mali, deux fabriques, la Société de Moulage et d’Injection de Plastique (SOMIP) et Tambadou Plastique, transformant en chaussures le caoutchouc recyclé, virent le jour.
Aussi, avec l’augmentation de la demande, les prix des vieilles chaussures sont allés crescendo.
Le kg est passé de 5 Fcfa à 10 Fcfa puis à 175 Fcfa et a même atteint 300 Fcfa pour certaines qualités de chaussures.
Ainsi, d’après les statistiques de la Direction Nationale du Commerce et de la Concurrence (DNCC), en 2000, le Mali a exporté 310 tonnes de chaussures neuves ou usées à destination de la Côte d’Ivoire, du Congo, et de la Belgique pour une valeur estimée à près de 12 millions de Fcfa.
En 2001, 542 tonnes de chaussures neuves ou usées ont été exportées pour une valeur d’un peu plus de 21 millions de Fcfa.
A partir de 2003, suite à la crise ivoirienne, la chute des prix a commencé.
Un exportateur malien du secteur affirme garder 10 tonnes de chaussures usées dans ses magasins, car suggestion a été faite par son partenaire ivoirien de garder son stock en stand-by, en attendant une amélioration de la situation en Côte d’Ivoire.
Créée en 1993, la SOMIP emploie actuellement 31 personnes et peut en période de forte demande, acheter près de 100 tonnes de chaussures usées.
Cependant, le marasme dans le secteur du négoce de chaussures usées n’est pas imputable à la seule absence de débouché ivoirien, mais inondation du marché malien par les chaussures de marque chinoise et le poids écrasant de la TVA sur les entreprises locales, ont également leur part dans cette crise, selon les professionnels du secteur.
Suite à ce marasme frappant le négoce des chaussures usées, mise au chômage de nombreux jeunes est constaté.
Selon Seydou Diallo, exportateur de vieilles chaussures, avant la crise, il employait une soixantaine de jeunes ruraux qui venaient en saison sèche à Bamako.
Modibo Traoré également exportateur affirme qu’il employait une cinquantaine de personnes dans ses magasins.
Ces jeunes qui autrefois gagnaient leur vie grâce à ce négoce, sont obligés de s’orienter vers autre chose.
27 juillet 2005