Le président sénégalais, Me Abdoulaye Wade a récemment indexé l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) comme étant en partie responsable de la crise céréalière qui sévit dans le monde, singulièrement en Afrique. Et il n’exige ni plus ni moins que la suppression de la FAO.
« Gouffre d’argent » ! C’est ce que pense le président Abdoulaye Wade de la FAO.
« La situation actuelle est largement son échec et les cris d’orfraie n’y feront rien. Cette institution aux activités dupliquées par d’autres, apparemment plus efficaces…, est un gouffre d’argent largement dépensé en fonctionnement pour très peu d’opérations efficaces sur le terrain », a affirmé le président du Sénégal dans une déclaration radiotélévisée sur la hausse des prix.
Ce n’est pas la première fois que le chef d’Etat sénégalais s’attaque à cet organisme onusien. Il l’avait déjà lourdement chargé lors du lancement de la « Grande offensive agricole » pour la nourriture et l’abondance (son plan de relance agricole).
Mais, comme certains confrères un peu partout dans le monde, nous nous demandons si ces critiques envers la FAO sont justifiées. Difficile d’abonder dans le même sens que Me Wade pour qui sait que, comme le rappelait La Croix, « la FAO a lutté contre la dérive imposée dans les années 80-90, notamment par la Banque mondiale, qui encourageait le développement des cultures de rentes au détriment des cultures vivrières ».
Et il y a près d’une décennie, cette organisation avait tiré la sonnette d’alarme par rapport à la réduction drastique des stocks de sécurité et attiré l’attention des dirigeants sur la multiplication des poches de famine dans le monde.
Mais, rares sont les dirigeants africains qui ont appuyé la FAO dans la mobilisation des ressources qui auraient permis d’éviter la crise qui sévit présentement.
Mieux, Jacques Diouf (directeur général de la FAO) n’a cessé de plaider en faveur du développement du secteur agricole en Afrique et de la construction des infrastructures nécessaires à ce développement.
Mais, il a toujours prêché dans le désert parce qu’un développement agricole harmonieux ne préoccupait nos décideurs que dans les discours démagogiques de campagne. Nos pays ont fait la sourde oreille axant toutes les ressources de production agricole sur les cultures d’exportation (coton, arachide, café, cacao…)
Pour avoir tout misé sur l’arachide, le Sénégal doit importer quasiment 100 % de ses denrées alimentaires quotidiennes. C’est aussi presque le cas du Mali qui a privilégié le coton au détriment du reste du secteur agricole.
Une prise de conscience tardive ?
Comme l’écrivait récemment un confrère de la RDC, « le vrai débat se trouve ailleurs ». Il est temps de faire l’autocritique au lieu de perdre des énergies à trouver des boucs émissaires pour se soulager la conscience vis-à-vis de son opinion nationale.
« Les pays qui sont aujourd’hui durement frappés par la crise alimentaire disposent-ils d’une vraie politique agricole ? Dans quel état se trouvent leurs structures d’appoint à l’activité agricole ? », s’interroge le confrère congolais.
Des questions pertinentes qui mettent à nu l’aspect dramatique de la question : l’absence d’une vision de politique agricole à long.
Comment expliquer qu’un pays comme le Mali importe l’essentiel de ses biens de consommation courante malgré ses immenses potentialités hydroagricoles et énergétiques ? Et c’est là tout le drame du peuple malien, des Africains d’une façon générale.
Heureusement, à la veille de la saison agricole 2008-2009, le branle-bas de combat est de mise dans la plupart des pays de l’Afrique de l’Ouest.
A commencer par le nôtre où le gouvernement multiplie les initiatives pour une production record au cours de la prochaine campagne. Au Burkina, c’est le Premier ministre qui s’est rendu à un conclave des cadres du ministère de l’Agriculture. Tandis que le président mauritanien a personnellement tenu à lancer la campagne agricole dans son pays…
On s’active dans tous nos Etats comme si, pour citer « Le Pays » (Burkina), « la crise alimentaire de ces derniers mois a subitement fait prendre conscience aux dirigeants africains que leur propre survie dépendait de l’autosuffisance alimentaire des populations ».
Cette prise de conscience n’est-elle pas tardive ? Cette mobilisation va-t-elle porter les fruits escomptés ? La campagne agricole à venir sera-t-elle a hauteur de souhait ?
Ce qui est sûr, c’est que nos dirigeants semblent avoir compris que la sécurité alimentaire est une solide garantie de la stabilité sociale et politique dont ils ont besoin pour régner en paix et sans partage.
Alphaly
09 Mai 2008