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C’est un sentiment de « trahison » qui anime les populations de Kita qui comprennent plus l’attitude du ministre de l’Environnement et de l’Assainissement dans l’affaire de la coupe du bois de vêne.

Le Mali est un pays continental de plus en plus confronté à l’avancée du désert, la sécheresse, avec comme corollaires la dégradation de l’écosystème et la disparition de la faune. Toutes choses qui ont suscité des politiques nationales de préservation de la nature par des mesures législatives en faveur du « peu » de ressources forestières dont dispose encore notre pays.

Malgré cette réalité, le ministre de l’Environnement et de l’Assainissement persiste dans sa volonté de faire reprendre la coupe du bois de vêne dans la Commune rurale et les villages environnants de Kita en dépit de l’hostilité des populations de cette localité opposées à l’opération qui, à leurs yeux, ne profite pas à leur environnement.

En envoyant ses émissaires il y a quelques semaines à Kita pour convaincre les paysans et les notabilités du bien-fondé et des « bonnes techniques » de coupe de bois, le ministre Aghatam Ag Alhassane a provoqué le scepticisme chez beaucoup de Kitois qui s’interrogent désormais sur ses « vrais » motivations.

Pour qui le ministre travaille-t-il ? Œuvre-t-il pour le bien-être des populations ou défend-il la prospérité d’une société étrangère ? Ce sont quelques-unes des questions que les chefs de village se posaient au sortir de la rencontre qui s’est achevée sur le statu quo : Kita s’oppose à sa déforestation.

Il est étrange qu’un ministre de la République qui suspend l’opération de coupe suite à une marche de protestation à Kita revienne à la charge comme un élément téléguidé par la société privée chinoise « Afrique Asie bois Mali », afin d’obtenir l’adhésion d’une population qui a toujours manifesté sa réticence.
Entêtement coupable

Cette attitude est anormale dans la mesure où même l’ambassade de la Chine au Mali s’est dissociée de l’opération suite à une de nos publications intitulée : « Mali, coupe du bois contre Hôpital et 3e pont » (voir Les Echos du 16 septembre 2008).

Effet, la représentation diplomatique chinoise à Bamako soutient que le contrat est signé entre le Mali à travers la direction nationale de la conservation de la nature (DNCN) et une société privée chinoise. Cette entente, selon elle, n’implique en rien le gouvernement chinois et ne saurait nuire aux bonnes relations de coopération entre nos deux pays.

Cependant, les autorités en charge de l’environnement semblent avoir une motivation suspecte à honorer un contrat signé en catimini sans l’accord préalable des populations. Le comble est que ces mêmes autorités avouent que le contrat en question qui s’étale sur une durée de 5 ans pour 100 millions de F CFA n’a pas respecté les clauses stipulant que la coupe concerne uniquement des bois de vêne en état de dégradation.

Le contrat retient aussi que seulement 4 pieds de bois doivent être abattus sur 10 hectares. Mais, sur le terrain le constat est alarmant car aucun pied de bois n’a été épargné.

D’ores et déjà à Kita, tout est mis en œuvre pour préserver les ressources forestières et même certaines autorités administratives, sans le manifester ouvertement, sont opposées à la coupe et au contrat.

Certaines radios privées de la Capitale de l’arachide, dont Kayira V, diffusent constamment des émissions sur la nécessité de préserver nos maigres ressources forestières. C’est cette radio qui a brisé l’élan des émissaires du ministre à la veille de la rencontre par la rediffusion des interventions de notabilités opposées à la poursuite de la déforestation.

Amadou Waïgalo

17 Décembre 2008