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Dans une cérémonie marathon qui a démarré avec six heures de retard, la Cour constitutionnelle a enfin rendu son arrêt sur les résultats des législatives du 22 juillet 2007, dans la nuit de vendredi à samedi 11 août 2007. En procédant à des annulations et réaménagements de voix qui ont profité à des partis ou candidats indépendants, le président de la Cour s’est contenté de constater des fraudes et autres irrégularités.

Au sortir de la présidentielle du 29 avril 2007 et du 1er tour des législatives du 1er juillet 2007, la Cour constitutionnelle avait systématiquement rejeté toutes les plaintes relatives aux cas de fraudes et autres formes d’irrégularités allant jusqu’à dire que ce ne sont pas des motifs constitutifs d’annulation de résultats ou de vote.
Ces rejets en bloc des recours n’avaient pas indigné que leurs seuls auteurs. L’opinion publique était elle aussi sidérée par le fait que la Cour constitutionnelle venait de créer une jurisprudence dangereuse en matière de contentieux électoral dans notre pays en ouvrant un boulevard à la fraude.

Le président de la Cour constitutionnelle, Salif Kanouté, a donné raison à ceux qui ne cessent de jeter l’opprobre sur son institution. Avant même de commencer à lire l’arrêt de validation des résultats du 2e tour des législatives, les propos liminaires tenus par le président Kanouté constituent un aveu de taille.

Comme pour faire avaler à qui de droit l’arrêt qui allait être rendu public, le président de l’honorable Cour a cru bon de donner en dix minutes un cours magistral de droit privé en matière de preuve. Il a exploré les différents compartiments de la preuve qui vont de l’aveu au témoignage en passant par le flagrant délit. Il a aussitôt expliqué qu’il n’avait pas la preuve formelle de tous les recours compte tenu du temps dont il dispose et que certaines plaintes relatives aux dérapages dans les campagnes devaient être formulées en amont, pendant les campagnes.

« Je ne comprends pas que ceux qui sont chargés au niveau des bureaux de vote, pour travailler dans un délai maximal, acceptent de procéder à des falsifications de chiffres, à des inversions de chiffres. Je ne comprends pas que les présidents des bureaux de vote, qui jouissent de la confiance de l’Etat et des autorités, acceptent de chasser les délégués des partis politiques, ceux-là mêmes qui traduisent la transparence des élections (…) ».
Ce discours du président Kanouté, à la fin de la cérémonie de proclamation officielle des résultats à 4 h 15 du matin, sonne comme un aveu d’impuissance et aiguise davantage les soupçons d’une frange importante de l’opinion publique encline à penser qu’il vaut mieux réformer l’institution surtout pour ce qui est de sa saisine en matière de contentieux électoral.

La Cour, seule habilitée à connaître des litiges électoraux pour l’élection du président de la République et des députés, existe normalement pour dire le droit. A partir du moment où son président met le doigt sur ce qu’il appelle fraude, achat de conscience, violences, il n’avait qu’à sévir de tout son poids. Tout le reste n’est que superfétatoire. Au lieu de donner des leçons à l’homme malien pour la moralisation de la vie politique, la Cour constitutionnelle aurait mieux fait de sortir le bâton de la coercition depuis le scrutin du 29 avril. L’institution doit s’en prendre à elle-même en se remettant en cause sur ce qu’elle a fait pour empêcher la dépravation des mœurs électorales.

Pour avoir fermé les yeux sur ces genres d’irrégularités depuis un certain temps, elle ne fait qu’accentuer le phénomène. La conséquence est grande pour notre peuple. Au lieu de participer impuissants à ces simulacres d’élections, des citoyens boudent de plus en plus les urnes pour ne pas servir de faire-valoir à des cooptations qui ne disent pas leur nom. Le taux de participation se réduit comme peau de chagrin scrutin après scrutin. Le coupable ? Suivez mon regard.

Abdrahamane Dicko

13 août 2007.