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Démarrée en 2002, avec 174 producteurs et productrices pour une production de 20 tonnes de coton fibre sur une superficie de 118 ha, la production de coton biologique est en plein essor au Mali. Lors de la matinée d’information et d’échanges sur la conduite de la culture du coton biologique au Mali, organisée au CCA-ONG, Sidi N’Guiro, directeur du Mobiom a levé le voile sur les chiffres de 2006.

En 2006, nous avons enregistré la mise en valeur de 1810 ha de terre par 3170 producteurs et productrices. Nous attendons une production de 828 tonnes de coton graine et 350 tonnes de coton fibre“, a-t-il révélé lors de cette séance essentiellement animée par : Sékou Diarra, coordonnateur du programme coton bio et équitable de Helvetas au Mali ; Sidi N’Guiro, directeur du Mobiom ; Siaka Doumbia, conseiller sur le programme et Lazare Yombi, inspecteur en agriculture biologique à ECOCERT international.

Dans sa présentation, Sékou Diarra a indiqué que les filières cotonnières en Afrique sont en crise depuis quelques années. Selon lui, cette crise est en partie due à l’augmentation, d’année en année, du prix des intrants et à une chute vertigineuse du prix du coton sur le marché international.

Face à cette crise et surtout à ses conséquences sur les paysans, Helvetas s’est interrogé sur des solutions alternatives telles que la culture du coton biologique qui rejette l’utilisation des intrants chimiques de synthèse“, a-t-il déclaré.

Il a indiqué qu’après une phase expérimentale (1998 à 2001), le programme coton biologique au Mali a démarré en 2002, pour évoluer et avoir le label équitable en 2004.

Pratiquement, dans le sud du Mali dans les cercles de Bougouni, Kolondièba et Yanfolila, la production du coton biologique est confrontée à des défis majeurs.

Avec la privatisation annoncée de la CMDT, Sékou Diarra s’interroge sur le sort qui sera réservé à la production du coton biologique qui est aujourd’hui portée par plus de 3000 producteurs et productrices.

Il s’est aussi inquiété de la tendance favorable de certains responsables maliens à l’introduction des OGM au Mali. En ce qui concerne les OGM, de passage, il a fustigé cette démarche qui consiste à passer par les regroupements sous-régionaux pour les imposer aux différents pays.

Le CCA-ONG étant une structure qui regroupe les ONG nationales et internationales, nous avions estimé venir vous informer sur la petite place de la culture biologique dans le développement de notre pays, afin qu’au delà de Helvetas Mali, la filière puisse bénéficier du soutien d’autres acteurs au Mali“, dira Sékou Diarra.

Le coton biologique, une alternative Dans sa communication, Sidi N’Guiro, directeur du Mobiom, a indiqué que le coton biologique est une alternative pour les producteurs et productrices du Mali.

Selon lui, l’agriculture biologique est un système de production qui valorise les ressources naturelles existantes et qui n’autorise pas l’utilisation des intrants chimiques de synthèse comme les engrais minéraux et les pesticides de synthèse.

Il a indiqué qu’en agriculture biologique, la fertilité du sol est assurée par la rotation culturale, l’utilisation de plantes légumineuses et l’apport d’engrais organiques (fumier et compost).

En ce qui concerne la protection des plantes, il dira qu’elle se fait avec le bio pesticide fabriqué à partir des extraits végétaux, notamment des extraits de Neem (azadirachta indica) mélangés avec les huiles de Koby (carapa procera) et de Npeku (lannea microsperma).

Nous y associons des techniques alternatives d’utilisation des plantes pièges telles que le gombo, apprécié par les prédateurs du coton” a-t-il indiqué.

Il a ensuite fait un rappel historique du programme du coton biologique et équitable au Mali. Selon lui, une phase expérimentale, démarrée en 1998 et achevée en 2001, a convaincu de la possibilité de produire du coton au Mali sans apport d’engrais chimiques de synthèse et sans pesticides chimiques de synthèse.

Il dira que la première phase du programme de production du coton biologique (2002-2005) a été marquée par la certification bio en 2002 par ECOCERT International et par celle équitable en 2004 par Fair Trade Labelling Organisation (FLO).

Dans sa présentation de la deuxième phase, démarrée en 2006 et qui doit prendre fin en 2008, Sidi N’Guiro a indiqué qu’elle va s’atteler à développer une filière autonome qui doit générer une quantité significative de coton de bonne qualité, certifié et produit selon les méthodes de l’agriculture biologique.

Selon lui, dans cette phase, le Mobiom va jouer le rôle clef de promotion de la filière avec le soutien de Helvetas Mali. Il a aussi levé le voile sur les résultats obtenus par le programme depuis sa première phase.

Sidi N’Guiro a indiqué qu’en 2002, le programme a démarré avec 174 producteurs et productrices pour atteindre 1748 producteurs et productrices en 2005. Dans la même période, la superficie cultivée en coton biologique est passée de 118 ha à 738 ha pour une production qui a évolué de 47 tonnes à 386 tonnes de coton graines.

La campagne 2006-2007 n’étant pas encore bouclée, Sidi N’Guiro a levé le voile sur les prévisions de 2006. A son avis, avec une superficie de 1810 ha, 3170 producteurs et productrices sont à pied d’œuvre pour produire 828 tonnes de coton graines.

Parallèlement à la production du coton biologique, le directeur du Mobiom a indiqué que les paysans, en rotation au coton, cultivent le Sésame biologique. “Après, deux années d’expérimentation à petite échelle, la production de sésame bio et équitable a débuté pendant la campagne 2005-2006 et sur une prévision de 50 tonnes, seules 21 tonnes ont pu être produites“, a-t-il révélé.

Sidi N’Guiro a estimé que le programme bénéficie d’un certain nombre d’atouts, dont le prix de vente du Kilogramme de coton graine. A l’issue de la campagne agricole 2005-2006, le kilogramme de coton biologique a été acheté au paysan à 305 F Cfa contre 160 F Cfa pour le coton conventionnel.

Cependant, il a mis un accent particulier sur les défis de la filière. Selon lui, ce sont : la production de la matière organique en quantité et qualité suffisante et l’implication des producteurs dans le mécanisme de fixation du prix.

Il a aussi indiqué que la filière est menacée par la multiplication des labels et par les discours favorables à l’introduction des OGM et la privatisation de la CMDT. Pour sa part, Lazare Yombi, inspecteur à ECOCERT International est intervenu pour donner quelques précisions sur la certification des produits bio.

Selon lui, l’agriculture bio est un mode de production qui s’articule autour de pratiques de culture ou d’élevage soucieuse des équilibres naturels. Il dira, pour cela, qu’elle exclut l’utilisation des intrants chimiques de synthèse et des OGM.

Donc, selon l’inspecteur Lazare Yombi, un produit est qualifié bio à partir de sa certification. “C’est le certificat d’inspection d’un organisme accrédité à cet effet qui donne la qualité bio à un produit, sinon il reste un produit naturel”, a-t-il déclaré.

Sékou Diarra, coordonnateur du programme a indiqué que le label équitable fait appel à la nécessité d’une certaine justice dans la conduite du commerce international. Il dira aussi que ce label prend en compte le respect d’un certain nombre de normes dont l’exclusion du travail des enfants.

Kouloumégué Dembélé de GIP- BIO a salué l’initiative de Helvetas au Mali. Selon lui, cette initiative offre une opportunité aux paysans maliens qui peuvent désormais faire le coton bio et équitable. Il a indiqué que dans la production du coton conventionnel plus de 64 % des coûts de production sont absorbés par les intrants.

La production du coton bio et équitable est une alternative crédible à la crise de la filière cotonnière“, a-t-il déclaré. D’autres participants se sont inquiétés de l’existence d’un marché potentiel pour le coton biologique.

Sékou Diarra a indiqué que le marché international demande actuellement 8 000 tonnes de fibres de coton et le Mali n’a pu proposer qu’environ 150 tonnes de fibre de coton bio et équitable.

De son côté, Sidi N’Guiro a rassuré l’assistance en indiquant que le marché international du coton bio et équitable évolue au rythme de 38 % par an et va atteindre les 100 % à partir de 2006.

Assane Koné Soumaïla T Diarra

30 octobre 2006.