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Cette édition avait pour thème central comme nous l’annoncions dans notre édition du vendredi, « les pouvoirs locaux et le développement ». Elle a réuni plus de 3000 participants venant de tous les continents et intervenant dans les organisations internationales, les associations, les organisations non gouvernementales, le secteur privé.

Parmi les invités de marque, il y avait aussi le président de la Commission l’Union africaine, Jean Ping, le secrétaire de l’Organisation internationale de la Francophonie, Abdoul Diouf, et Wangari Maathai, présidente de la fondation Green Belt Movement, prix Nobel de la paix 2004. L’Afrique était fortement représentée aux Journées européennes du développement à Strasbourg qui planchait sur le développement local au moment où étaient réunis à Washington les dirigeants de vingt pays industrialisés et émergents sur la crise financière qui menace leurs économies (voir articles en page 14). L’Afrique a ainsi fait entendre sa voix sur la tribune du forum des Journées européennes du développement de Strasbourg.

Nos dirigeants présents à Strasbourg ont tous manifesté leur inquiétude face à la menace de la crise financière qui peut devenir planétaire si des mesures concertées ne sont pas prises à temps. Africains et Européens qui se sont succédé à la tribune ont tous ont été unanimes à dire que la crise financière peut affecter l’aide publique au développement en Afrique et aussi le développement local dont il était question à la rencontre de Strasbourg.

Le président burkinabé a évoqué la crise financière en indiquant que celle-ci peut à la longue atteindre l’Afrique, un continent qui souffre déjà de la pauvreté et du sous-développement. Selon lui, plus d’un milliard et demi de personnes vivent au dessous du seuil dans la pauvreté à travers le monde et la crise financière pourrait aggraver cette situation. C’est pourquoi il a appelé Européennes et Africains à agir ensemble afin de construire un monde prospère et équilibré.

Le président malgache estime, pour sa part, qu’il est temps que l’Afrique prenne son destin en main. A ce propos, il dira que la crise économique doit être une opportunité pour le continent de mettre en place des solutions de développement pérennes et novatrices. Pour y arriver, le président Ravalomanana estime qu’il faut relever d’abord le défi énergétique en mettant l’accent sur le bio-carburant et moderniser l’agriculture. Il a fait remarquer que l’Afrique a besoin d’investissements afin de construire des infrastructures de base pour améliorer les conditions de vie des populations.

Le président de la République, Amadou Toumani Touré, a de son côté, évoqué l’expérience de notre pays en matière de décentralisation dont le processus, amorcé sous le régime colonial et surtout, au cours des premières années qui ont suivi l’Indépendance en 1960, à travers la création de communes, de moyen puis de plein exercice, s’est accentué dans les années 90 avec l’avènement de la démocratie pluraliste.

La décentralisation est de nos jours un processus essentiel et inéluctable dans nos pays et le Mali s’y est résolument engagé, a commenté le président Touré, avant de constater que la promotion de la gouvernance démocratique et des libertés publiques, va de pair avec le processus de décentralisation. Tout comme le combat pour l’atteinte des Objectifs du millénaire pour le développement ne peut être gagné par la concentration des pouvoirs de décision au seul sommet.

Le chef de l’État estime aussi que l’évolution démographique et l’urbanisation galopante, du fait de l’exode rural, constituent aujourd’hui des éléments additionnels de préoccupation à prendre en compte. C’est pourquoi, dira-t-il, la décentralisation est perçue au Mali comme un facteur incomparable de cohésion sociale, de paix, de sécurité et de stabilité. Et constitue la épine dorsale du processus de démocratisation au Mali.

Le président Touré a salué tous les partenaires qui ont aidé notre pays à procéder à la mise en place du Projet d’appui à la reforme administrative (PARAD) et du Programme du développement institutionnel (PDI), tous deux destinés à améliorer la gouvernance économique pour une meilleure organisation de l’État et de la modernisation de son administration. La décentralisation est en marche dans notre pays, a rappelé ATT en indiquant que le Mali compte aujourd’hui 703 communes urbaines et rurales, 49 cercles, 8 régions, 1 district qui sont administrés par des conseils communaux, des conseils de cercle et des assemblées régionales.

Le Haut conseil des collectivités assure la représentation nationale de ces entités décentralisées. Une autre expérience qui donne plus de satisfaction à notre pays est celle de la loi qui institue l’élection des chefs de village et de quartiers par les populations.

Le président de la République a aussi évoqué la création de l’Agence nationale d’investissements des collectivités locales (ANICT) qui a permis de financer plus de 3500 projets depuis sa création il y a cinq ans.

Le président Touré indiquera par ailleurs que notre pays a décidé d’expérimenter la possibilité d’atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement en les focalisant sur une échelle plus réduite avec un échantillon constitué de 166 communes les plus vulnérables aux crises alimentaires. Cette initiative novatrice vise à relever du retard accusé dans la réalisation des Objectifs du milliaire pour le développement, a-t-il précisé.


La fin de l’argent facile

Le chef de l’État a salué la qualité de l’accompagnement de la Commission européenne qui a fait preuve de beaucoup de pragmatisme et d’imagination avec la formule d’appui budgétaire général comme sectoriel en adoptant ces concours complexes du terrain des collectivités locales.

Mais pour Amadou Toumani Touré, toutes ces performances ne doivent pas occulter les problèmes liés à la fragilité des structures en place et des difficultés inhérentes aux transferts effectifs de ressources financières et des compétences en ressources humaines, ainsi qu’à l’indispensable création de ressources financières locales autonomes.

Cette ambition est au centre des priorités du Cadre stratégique pour la croissance et la réduction de la pauvreté et du Projet pour le développement économique et social (PDES) dont la mise en œuvre s’appuiera sur les efforts budgétaires internes, l’accompagnement de l’Union européenne et d’autres partenaires. « La principale leçon que nous tirons de notre expérience est que le processus de décentralisation nécessite véritablement des actions de longue haleine, qui ne peuvent se mettre en place que progressivement », a-t-il souligné.

Les crises actuelles confirment la nécessité de bâtir une nouvelle architecture mondiale, en impliquant non seulement les pays émergents, mais aussi l’Afrique en vue d’un meilleur équilibre, entre le monde industrialisé et le monde en développement, a noté le président Touré, avant de constater qu’une chose est sûre : « c’est la fin de l’argent facile ». Il a expliqué que le capitalisme ultra-financier n’a plus droit de cité et que c’est la revanche de l’économie réelle qui suppose un investissement productif. Et sur ce point, l’Afrique a des opportunités à saisir. « Sans aucune arrière pensée ».

Le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, et le secrétaire d’État à la Coopération et à la Francophonie, Alain Joyandet dont le pays assure la présidence de l’Union européenne ont tous deux soutenu le renforcement de l’aide publique aux pays africains et cela malgré la persistance de la crise financière.

Le même constat a été fait par le commissaire européen au Développement et à l’Action humanitaire, Louis Michel qui a réaffirmé le soutien de l’Union européenne à l’Afrique qui peine encore, il est vrai à relever le défi de la lutte contre la pauvreté.

Pendant trois jours plusieurs thèmes ont été débattus par d’imminentes personnalités, comme « Droits de l’homme de l’homme et développement », « Crise alimentaire : quelles réponses ? », « Crise financière : Quelle reforme de Bretton Woods pour le développement ? ».


Envoyé spécial

M. KÉITA

17 Novembre 2008