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medicaments.jpgQue ce soit au plan économique, social, sanitaire ou même en terme de sécurité, les deux phénomènes ont des conséquences incalculables

Le phénomène est mondial, mais il touche les pays à des degrés divers. Selon de récentes statistiques, les produits contrefaits et piratés représenteraient entre 5% et 9% du marché mondial. Le manque à gagner qui en résulte est énorme même s’il se révèle très difficile à chiffrer avec précision. La contrefaçon touche, en effet, tous les secteurs économiques.

Depuis des années, nos unités industrielles en souffrent énormément. Mais les plus grands dommages causés sont humains. Qu’il s’agisse des consommateurs ou des travailleurs licenciés.

C’est cet aspect précisément que le Centre national d’assistance et d’assurance du consommateur (CENA), tente de combattre dans notre pays.

Le président de cette structure, un juriste d’entreprise, Ladji Gakou vient de convier en assemblée générale des représentants du secteur industriel, des artistes, des responsables d’associations de consommateurs.

La rencontre qui s’est déroulée à la Direction nationale des industries (DNI) était destinée à installer des commissions de travail spécialisées dans la lutte contre la contrefaçon et pour la protection des consommateurs.

Expliquant sa démarche, Ladji Gakou a jugé que jusque là, les associations de consommateurs et titulaires de droits semblent très peu sensibles et aux actions (certes timides) engagées dans cette lutte.

Il s’agit donc de la première initiative du genre. Youssouf Diawara, de la division « qualité » de la DNI et membre du nouveau comité créé pour lutter contre la pratique, reconnaît qu’il est pratiquement impossible d’éradiquer le fléau.

Mais, quand tous les acteurs se mettront ensemble, estime-t-il, les actions engagées seront plus efficaces. La récente assemblée générale initiée par le Centre national d’assistance et d’assurance du consommateur a abouti à la création de commissions spécialisées réparties entre l’organisation, les aspects financiers et la communication.

Le comité aura comme principal objectif de sensibiliser le public sur les dangers qu’impliquent la consommation de produits piratés. Il travaillera étroitement avec les pouvoirs publics, pour lutter contre la prolifération de produits contrefaits dans notre pays.

DES CONSÉQUENCES TRAGIQUES :

Il faut dire que les conséquences humaines de la contrefaçon sont incalculables. Elles peuvent même parfois être tragiques. Des briquets qui explosent, des pièces mécaniques de voiture ou d’avion défaillantes, de faux médicaments, ont peut citer des exemples à l’infini.

L’on se rappelle encore du scandale qui éclata au Niger en 1995 lors d’une campagne de vaccination contre la méningite. En effet, dans ce pays voisin, près de 3 000 personnes avaient été vaccinées contre cette maladie avec des médicaments contrefaits en provenance du Nigeria voisin.

« La contrefaçon tue !« , lance Ladji Gakou en estimant qu’il est « enfin temps d’agir concrètement« .
Les conséquences sociales de la contrefaçon sont également très graves. Comme nous l’avons dit plus haut, de nombreuses entreprises nationales ont été obligées de licencier massivement leurs salariés. C’est le cas par exemple de la SOMAPIL qui a dû mettre des dizaines de travailleurs en chômage technique l’année dernière. Souvent cela ne suffit même pas et des entreprises sont forcées de mettre la clé sous la porte.

Juriste de formation, Ladji Gakou est partisan de privilégier les moyens juridiques pour combattre la mauvaise pratique. Pour l’instant, constate-t-il, le consommateur n’est protégé que par l’article 182 de la loi qui condamne une personne ayant causé un préjudice à une autre. Si le consommateur veut réellement se battre, il lui faut passer par les associations de protection des consommateurs.

Le comité mis en place par CENA va, notamment, s’attacher à faciliter les démarches juridiques aux personnes victimes d’un préjudice suite à la consommation d’un produit contrefait. Le comité va « contribuer à l’émergence d’un type nouveau de consommateur malien, averti et réactif« , garantit Ladji Gakou.

37 500 MILLIARDS FCFA !

Économiquement, les conséquences de la contrefaçon dans notre pays sont encore très difficiles à évaluer. Pour le moment, les seuls chiffres officiels proviennent des prises effectuées par les douanes. Par exemple entre 2004 et 2006, celles-ci ont saisi 3 478 cartons de savon, 126 cartons de piles, 1 043 cartons de cigarettes, 78 089 cartons de CD et cassettes, et 10 tonnes de médicaments divers.

Et ce n’est là que la partie visible de l’iceberg, conviennent de nombreux connaisseurs du phénomène. L’un des rôles du comité sera donc d’aider à évaluer l’ampleur de la contrefaçon au Mali grâce notamment à un travail de prospection des marchés qu’il projette pour enregistrer les cas de contrefaçons. Immense tâche !

Pour ouvrir une nouvelle fenêtre sur la situation, signalons que c’est dans le secteur pharmaceutique qu’il y a surtout péril en la demeure. Selon l’Organisation mondiale de la santé, près de 10% des médicaments en circulation dans le monde seraient contrefaits. Ce chiffre atteindrait 25% voire 50% dans les pays en voie de développement.

L’OMS estime qu’en 2010, le marché des médicaments contrefaits et piratés représentera près de 75 milliards de dollars dans le monde, soit 37 500 milliards Fcfa ! De quoi aiguiser encore plus les appétits.

Bertrand Willi MICHELS- L’Essor

30 août 2007.