«Sans la mine d’or de Massiogo, Kadiolo n’aurait pas échappé à une révolte sociale l’année dernière», indique Salia Mallé, commerçant dans la capitale du Folona, pour nous situer toute l’importance de la nouvelle activité que la population vient de se découvrir : l’orpaillage !
Notre source précise que, «l’or a surgi à Massiogo au moment où le chômage faisait rage dans la préfecture. Les transporteurs étaient en crise de passagers et de marchandises, les paysans étaient mécontents de la campagne cotonnière, une importante partie de la population avait du mal à manger à sa faim. Les jeunes, à cause du conflit ivoirien, ne savaient plus où aller» ! Une vraie poudrière que toute étincelle aurait pu faire exploser. Un foyer éteint par la poudre et les pépites d’or.
Oui, heureusement que l’or a brillé pour faire oublier les colères, les frustrations. Depuis la découverte des premières pépites dans les eaux boueuses d’une rivière, la nouvelle s’est répandue comme le son du Tabalen. Et ce fut la ruée vers l’or. Presque tout Kadiolo y a accouru. Et pas seulement les bras valides. Au «Damenda» (à la mine), il y a aussi bien des mineurs que des vieilles personnes venues chercher fortune.
«En un laps de temps, c’est une véritable agglomération qui a surgit au bord d’un cour d’eau. Elle est aujourd’hui plus peuplée que la ville de Kadiolo», indique une source médicale. «Une vingtaine de bœufs sont tués par jour, mais c’est à peine si on trouve de la viande à la boucherie», témoigne Issiaka Diarra, un mineur qui a abandonné les bancs pour aller tenter sa chance à la mine.
Si les sources officielles parlent d’une dizaine de milliers de personnes, ceux qui en reviennent parlent d’une vingtaine voire une trentaine de milliers d’orpailleurs, de commerçants, de transporteurs… (Nous sommes contentés de recouper les informations glanées ici et là parce que la mine se serait vidée en grande partie à cause de la Tabaski, NDLR). Ce qui est sûr, c’est qu’en dehors des Maliens, on y trouve aussi des Guinéens, des Burkinabé et des Ivoiriens qui partagent la même bande frontalière que Misséni.
A côte de l’or, beaucoup d’autres activités commerciales y prospèrent naturellement. Le transport, déjà moribond à cause de la crise ivoirienne, est en train de retrouver un second souffle. Finalement chacun y trouve son compte. Surtout que la mine fait des millionnaires tous les jours.
En effet, ceux qui ont déjà eu la chance de découvrir des «kourouw» (grosses pépites) seraient nombreux. «Il ne se passe pas un jour sans que quelqu’un fasse une découverte qui lui apporte des millions de F CFA», apprend-t-on de sources proches des acheteurs non officiels d’or. La seule fausse note, c’est que la chance ne semble pas encore sourire aux autochtones de Kadiolo.
Les risques de l’aventure !
Mais, il ne se passe aussi de jour sans qu’une mine ne s’effondre sur des infortunés. Le plus souvent, les chasseurs d’or sont obligés de creuser des puits de profondeurs insoupçonnés à la recherche des pierres précieuses.
Ne répondant à aucune norme technique, les mines s’effondrent régulièrement sur les mineurs. Et même si les autorités sanitaires disent que des campagnes de vaccination et de sensibilisation en faveur de l’hygiène sont menées, les risques d’épidémies ne sont pas à écarter à cause du manque d’eau potable.
«Les gens utilisent la même source d’eau (rivière) pour les besoins quotidiens que pour leurs activités professionnelles», indique un chauffeur de Taxi-Brousse. Sans compter les risques de hausse des taux de prévalence des IST et du VIH/Sida parce que le plus vieux métier du monde y prolifère comme dans tous les lieux de concentrations humaines.
Des risques qui ne semblent pas décourager les nouveaux aventuriers que les Taxis-Brousse, les cyclomoteurs, les vélos… déversent quotidiennement. Après tout, on a rien dans ce monde sans risque !
Moussa Bolly
Une zone aurifère
L’existence de l’or dans la localité de Misséni n’est pas surprenante. En effet, il y a quelques années, Barik (une compagnie américaine) y avait effectué des prospections qui s’étaient avérées fructueuses selon des sources proches de la société. Certains avaient même évoqué l’éventualité d’un riche gisement de Diamant. Mais, curieusement, les Américains avaient renoncé à l’exploitation des gisements découverts.
A l’époque on avait officiellement soulevé des questions de rentabilité commerciale pour justifier la non exploitation de cet or. Mais, des sources proches de certaines notabilités de la localité indiquent que Barik a renoncé parce que le prix à payer en vie humaine, surtout du côté des «Blancs», était trop élevé.
«Les Djinns voulaient du sang de Toubabs et non d’Africains», nous apprend-t-on ! Une explication moins rationnelle. Mais, toujours est-il que cette même mine fait aujourd’hui la fortune des aventuriers venus de tous les côtés de l’Afrique de l’Ouest.
M.B
16 janvier 2006.