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M. Peter Mandelson est un expert de la question du coton au sein de l’UE. Avant de devenir commissaire européen au commerce, il connaissait bien les difficultés des pays producteurs du coton de l’Afrique de l’Ouest. Des Etats qui souffrent énormément des subventions que les nations riches accordent à leurs cotonculteurs.

« Mon séjour à Bamako m’a permis de visiter une usine d’égrenage de la CMDT où j’ai pu voir, par moi-même, le dur labeur effectué par cette entreprise sans oublier vos cotonculteurs dans les zones rurales qui se battent désespérément pour garantir leur existence et nourrir leurs familles quand les prix du coton sont très bas », a témoigné le commissaire européen. C’était au cours d’un point de presse animé mardi dernier à l’Hôtel Kimpeski et auquel ont participé les ministres maliens de Commerce de l’Industrie, de l’Agriculture et celui de l’Investissement et de Petites et Moyennes Entreprises. On y notait aussi la présence des représentants des cotonculteurs africains.

Le conférencier s’est engagé à offrir son soutien aux cotonculteurs africains et à entamer de discussions auprès des pays riches comme les Etats-Unis pour les inciter à revoir leurs subventions. S’agissant toujours des subventions, M. Peter Mandelson dira que l’Europe doit d’abord mettre de l’ordre dans sa maison avant d’appeler à une action au reste du monde.

L’Union Européenne qui ne produit que 2 % de coton mondial n’est en fait qu’un acteur mineur sur les marchés internationaux, du reste, dominé par les Etats-Unis et la Chine. Mais, elle est un importateur important du coton des pays de l’Afrique de l’Ouest comme le nôtre.

Le Commissaire européen a assuré les Africains que l’UE a approuvé une reforme fondamentale de son régime « coton interne » visant à réduire significativement les subventions de certains pays ayant un effet de distorsion sur les échanges commerciaux. Il a annoncé que  » A partir de 2006, 65 % des subventions que l’UE octroie aux cotonculteurs ne seront plus liées à la qualité qu’ils produisent.

Plaidoyer auprès de l’OMC

Le résultat sera que les agriculteurs européens produiront moins de coton. Ce qui sera une opportunité pour les pays de l’Afrique de l’Ouest de vendre plus leur coton en Europe. A cela, il ajoutera, que l’UE est maintenant prête à faire une exception pour les pays africains producteurs du coton qui traversent une crise sans précédent dans la commercialisation de leur » or blanc ».

Il s’agira pour l’UE de faire un plaidoyer au près des autres pays membres de l’OMC afin d’éliminer toutes les formes de subventions à l’exportation, faciliter l’accès aux marchés et réduire les soutiens domestiques ayant des effets de distorsion sur les échanges commerciaux.

M. Peter Mandelson a rappelé le forum Europe-Afrique sur le coton qui s’est tenu en juillet dernier à Paris. Au cours de cette rencontre, un plan d’action a été adopté par les deux parties sur les domaines spécifiques liés au développement et la nécessité d’un engagement national des Etats africains pour traiter le manque de compétitivité et la vulnérabilité du secteur cotonnier.

Le commissaire européen au commerce a affirmé que la mise en oeuvre du plan d’action sur le coton est bien avancée au niveau de l’UE qui a accordé des ressources additionnelles de 310 millions Euro pour la programmation du développement du Mali, Burkina, Bénin et Tchad.

Une aide conséquente
La commission européenne a, aussi, accepté d’allouer à ces quatre pays une aide budgétaire de 40 millions d’Euro en complément de son assistance actuelle au développement. Le Mali a bénéficié de 10 millions Euro. Enfin, M. Peter Mandelson a annoncé la mise en place d’un programme de renforcement de capacités pour les produits de base agricoles avec un budget de 45 millions d’Euro dont 15 millions d’Euro seront alloués spécifiquement au secteur cotonnier.

Des propos rassurants pour le gouvernement malien en quête constante d’initiatives pouvant redonner à la filière-coton la compétitivité attendue. Le ministre de Commerce et de l’Industrie, Dr. Choguel Kokala Maïga, a déclaré que, après les différents échecs de négociations sur le coton, les propos du commissaire européen au commerce vont donner un coup d’accélérateur au processus des négociations et surtout à la mise en place de l’Agenda de Doha qui prévoit une reforme effective de la filière coton.

Des enjeux sociaux non négligeables
Il a estimé que même si l’UE n’est pas un grand producteur du coton, elle a quand même une influence considérable sur les échanges commerciaux et sur les négociations internationales. Selon Choguel, l’initiative de l’UE suscitera un nouvel espoir aux millions de cotonculteurs africains qui ne croyaient plus aux discours de lutte contre la pauvreté.

Son homologue de l’Agriculture, M. Seydou Traoré, a mis l’accent sur le lien entre le coton et la lutte contre la pauvreté au Mali. Ceci, selon lui, est beaucoup plus important pour que, au cours des négociations, le débat ne tourne pas seulement autour du commerce. Il a également évoqué le problème des subventions des pays riches qui ont fait perdre à l’économie malienne plus de 47 milliards F CFA entre 2004 et 2005.

Ce qui a ainsi mis le gouvernement dans l’impossibilité de réaliser certains de ses objectifs, surtout au niveau de la réalisation des infrastructures sociales de base ayant un impact réel dans la réduction des effets de la pauvreté sur leurs bénéficiaires.

Madiba Kéita

26 avril 2005