La pauvreté de masse est devenue un phénomène généralisé dans notre pays : 63,80% et 21% de la population totale vivent respectivement dans la pauvreté et dans l’extrême pauvreté.
Quelle stratégie faut-il mettre en place pour réduire la pauvreté au niveau des collectivités décentralisées ?
Estimée à 11.419.182 habitants en 2004, la population malienne ayant une espérance de vie de 58 ans est très jeune et 80% d’entre elle vivent dans le milieu rural.
Le revenu par habitant est estimé à 240 dollars US contre une moyenne de 510 dollars US pour l’Afrique Subsaharienne.
Les indicateurs sociaux placent notre pays au 166è rang mondial selon l’Indice de Développement Humain du PNUD.
Dans le programme d’allègement de dettes de la Banque Mondiale, le Mali répond aux critères des pays pauvres très endettés (PPTE) et a réuni les conditions de son admission au point d’achèvement de l’Initiative PPTE élargie au PPTE2.
La pauvreté puisqu’il s’agit d’elle, peut être sous plusieurs angles :
– la pauvreté monétaire qui se traduit par une insuffisance de revenus nécessaires pour procurer à une personne le minimum de consommation indispensable pour vivre ;
– la pauvreté humaine qui exprime les privations dont souffle une personne en termes de décadence des conditions d’existence telles que l’accès à la santé, à l’éducation, à l’alimentation, au logement, à l’électricité, à l’eau potable…
Avec l’avènement de la démocratie dans notre pays en 1991, les autorités du pays ont changé de système de gestion en confiant la gestion des communes aux populations elles-mêmes. L’objectif recherché à travers la décentralisation est le développement des communes.
Depuis le début du processus, la décentralisation a suscité un certain nombre d’espoirs d’où des politiques et stratégies de développement participatif.
En dépit des efforts consentis, le développement économique au niveau des communes reste faible quand on observe le niveau élevé de pauvreté en milieu urbain, particulièrement en milieu rural.
Aujourd’hui, il y a nécessité de revoir les stratégies jusqu’ici mises en oeuvres. Cela va de la redéfinition des axes prioritaires aux plans d’appui des communes en passant par le renforcement des capacités (financières, humaines, matérielles et managériales).
STRATEGIES DECENTRALISEES DE REDUCTION DE LA PAUVRETE
Pour améliorer l’indice de pauvreté communale et donc réduire la pauvreté, il faut agir sur les principaux déterminants que sont la taille de la commune, le ratio d’écoles du second cycle sur le premier cycle de l’école fondamentale, les infrastructures sanitaires (centres de santé et pharmacies humaines et vétérinaires) et de loisir, l’électrification et l’adduction d’eau potable.
Toute réalisation au niveau de ces équipements collectifs doit être accompagnée d’un effort national d’électrification des communes concernées au risque de rendre inopérants les investissements consentis.
L’électricité est jugée fondamentale dans les activités de développement parce que constituant un puissant moteur pour la croissance économique.
Malheureusement au Mali, le taux moyen d’électrification des communes en 1998 n’était que de 1,35% des ménages avec seulement 0,37% en milieu rural pour 7,56% en milieu urbain.
La stratégie gouvernementale visera à promouvoir l’électrification, par l’extension du réseau électrique et par des initiations diverses à la consommation des sources alternatives de courant électrique.
A cet égard, le financement de l’électrification participe de la lutte contre la pauvreté et devrait en conséquence bénéficier des ressources PPTE.
Au niveau décentralisé, les communes devront mieux intégrer le développement des équipements collectifs à différencier selon les besoins spécifiques prioritaires, la construction des centres de santé dans certaines communes contre l’adduction d’eau dans d’autres.
Par ailleurs, la Vision Mali 2025 et le Cadre Stratégique de Lutte contre la Pauvreté (CSLP) se traduisent par l’objectif prioritaire général de réduire la pauvreté pour parvenir à une incidence de 47,5% en 2006, soit une diminution d’un quart de l’indice de la pauvreté actuel (63,8%) par la mise en oeuvre de l’ensemble des politiques de développement sur les quatre prochaines années.
Cet objectif s’appuie sur une stratégie globale et cohérente dont les dimensions essentielles sont :
– une croissance forte et durable (au moins 6,7% de taux moyen annuel sur la période 2002-2006 créatrice de richesses, mieux réparties au profit des pauvres ;
– des politiques de développement économique et humain davantage orientées vers les attentes des pauvres en termes de satisfaction des besoins d’emploi et de revenus d’accès aux services sociaux de base ;
– la consolidation d’une gouvernance démocratique, soucieuse de la participation des populations et de la société civile à tous les niveaux, et orientée vers le renforcement de l’Etat de droit et de la qualité des services rendus par les pouvoirs publics ;
– la promotion de programmes d’actions spécifiques visant l’amélioration volontaire des opportunités d’emploi et de revenus des plus pauvres, ou leur protection face aux risques sociaux.
Cette stratégie globale ne peut se concevoir sans des stratégies spécifiques ciblées sur la réduction de la pauvreté. Il s’agit:
– d’assurer aux collectivités des capacités techniques et financières significatives pour leur permettre d’assurer leur fonctionnement et un minimum d’investissement;
– de mettre à la disposition des communes des moyens humains, matériels et financiers pour améliorer la mobilisation et la gestion de leurs ressources.
C’est dans cette optique que l’Etat a mis en place le Programme National d’Accompagnement des Collectivités Territoriales qui comporte deux composantes principales : (l’ANICT) et la Cellule de Coordination Nationale des Appuis Techniques aux Collectivités Territoriales (CCN.
A travers l’Agence Nationale d’Investissement des Collectivités Territoriales (ANLCT), l’Etat entend réduire la pauvreté en permettant aux collectivités territoriales de
– développer des investissements productifs ;
– améliorer l’accès des populations aux services sociaux de base ;
– renforcer leurs capacités humaines et financières ;
– promouvoir une bonne gouvernance locale.
Le réseau de centres de conseils communaux (CCC) est destiné à aider les collectivités territoriales dans la formulation de leur programme de développement économique, social et culturel…
Comme observation, on peut dire que la décentralisation offre des conditions, des opportunités et des moyens de réduire durablement la pauvreté à travers l’appropriation de la gestion publique au niveau local et partant, peut conduire à une amélioration significative des conditions de vie des populations.
Il est généralement admis que pour réduire la pauvreté au niveau des communes (qui sont majoritairement rurales jusqu’à 86%), un des défis majeurs reste le financement des investissements quand on connaît les limites des seules ressources mobilisables par les communes sur leurs propres activités ou sur leurs productions.
Mamadi TOUNKARA
28 juillet 2005