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Du 1er novembre 2008 au 30 avril 2009, le ministère de l’Equipement et des Transports procédera à la mise en vigueur de mesures exceptionnelles pour les propriétaires d’engins à deux roues. Cette action, selon les responsables du département, vise à faciliter le dédouanement, l’immatriculation et l’obtention de l’autorisation du permis de conduire. Mais, c’est en réalité une imposition fiscale qui ne dit pas son nom.

Loin de la sécurité routière évoquée comme prétexte, ces mesures visent deux objectifs inavouables : renflouer les caisses de l’Etat et réduire le nombre de motocyclistes. Dans les deux cas, à mon analyse, c’est le pouvoir d’achat du Malien moyen qui est visé.

L’Etat malien veut renflouer ses caisses au détriment des citoyens et réduire le nombre de motocyclistes alors qu’il n’existe pas de transport public dans ce pays où les transports en commun sont des plus désorganisés de l’Afrique de l’Ouest, voire du continent. Avec les nouvelles mesures envisagées contre les propriétaires d’engins à deux roues à partir d’avril 2009, le gouvernement veut certainement récupérer en partie ce qu’il perd dans la subvention de certains produits de grande consommation.

A mon analyse, la sécurité routière, la protection des citoyens… ne sont que des prétextes pour imposer de nouvelles dépenses aux responsables de familles déjà éprouvées par la vie chère. Et cela sous la pression de certains opérateurs privés de connivence avec des agents de l’Etat. Nous avons l’impression que nos dirigeants ne réfléchissent pas assez ou ne se préoccupent pas réellement de la situation précaire dans laquelle vit la grande majorité des Maliens.

Les nouvelles mesures ne vont coûter que seulement 300 millions de F CFA au Trésor public. Mais, à combien cela va revenir aux familles ? Quelle est l’incidence financière sur les revenus des familles ? Cela, on ne le dit pas parce que c’est le cadet des soucis de ceux qui se battent aujourd’hui pour imposer cette mesure dans leurs propres intérêts.


Un transport en commun insuffisant et défaillant

Ils sont déjà nombreux les parents qui sont obligés de se ruiner pour offrir une moto à leurs enfants afin de leur permettre d’aller à l’école ou d’être indépendants de l’insuffisance ou de la défaillance des transports en commun en milieu urbain.

Ce n’est pas non plus de gaieté de cœur que de nombreux agents de la fonction publique ou du secteur privé prennent la moto pour aller au travail. Non seulement ils n’ont pas les moyens de s’offrir une voiture, mais ils savent aussi qu’ils seront des éternels retardataires s’ils attendent les bus ou les « Sotrama » pour aller au boulot. Il est donc insensé de leur imposer d’autres sacrifices financiers pour renflouer les caisses d’un Etat qui ferme les yeux sur le gaspillage de ses ressources par des cadres véreux.

Comme le ridicule ne tue pas, c’est le ministre Séméga qui est au-devant de ce combat fiscal. Et pourtant, c’est durant sa gestion qu’on a dépensé… 11 millions de F CFA en une matinée pour acheter du thé et du café. Comme sanction : il s’est retrouvé à la tête de l’un des ministères les plus juteux de la République pour surtout piloter le très lucratif Millénium Challenge.

Ce qui est sûr, ce ne sont ni le permis ni les plaques d’immatriculation qui vont sécuriser la circulation. La plupart des accidents est due à des comportements. L’insécurité routière est un donc un problème de mental, de comportement. Il n’y a que l’éducation et la sensibilisation pour résoudre cette équation. Mais, en la matière, l’Etat ne fait que du saupoudrage au lieu d’élaborer et d’exécuter une vraie campagne de communication sur ce fléau.

Sensibilisation et grands travaux de l’Etat

La sensibilisation finit toujours par payer. La preuve en est que le port du casque se généralise. Sans y être contraints, la sensibilisation commence à amener les motocyclistes à comprendre son utilité. Sur le plan socioculturel, la sensibilisation à outrance commence aussi à produire des effets dans la lutte contre des fléaux sociaux comme l’excision.

Pour réduire les accidents de circulation, le gouvernement et les municipalités devront jouer pleinement leur rôle. Cela commence d’abord par l’aménagement des pistes pour les deux roues comme on le voit au Burkina à côté. A Bamako, la densité de la circulation fait qu’il est nécessaire d’aménager des couloirs spécifiques pour les véhicules de transports en commun.

Ne serait-ce que par ces deux mesures, le nombre d’accidents va considérablement baisser. Et puis, si M. Séméga se préoccupe tellement de la sécurité de nos enfants, qu’attend-t-il pour initier un arrêté interministériel interdisant tout simplement les cortèges de mariage qui sèment la chienlit à longueur… de rues les jeudis et dimanches ?

Toutes les associations de consommateurs et l’Assemblée nationale sont aujourd’hui interpellées sur ces nouvelles mesures. Elles doivent interpeller à leur tour le gouvernement qui, à ce que nous sachions, n’a pas à imposer aux citoyens des mesures fiscales sans le quitus des élus de la nation.

Mais, Séméga est trop zélé pour le savoir. Et s’il ne fait pas attention, son zèle va précipiter une révolte populaire et précipiter la chute de ce gouvernement. A moins que cela ne soit l’objectif qu’il recherche pour concrétiser son rêve de Primature ?


Massaren Kéita

16 Octobre 2008