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Au cours de cette rencontre qu’il voulait très conviviale avec la dizaine de représentants de la presse d’Etat et privée, le ministre de l’Industrie et du Commerce a, d’entrée de jeu, abordé la question brûlante des subventions dans les pays développés, avec les Etats-Unis en tête.

Ces subventions qui sont à l’origine de la chute du prix du coton ont fait perdre aux pays africains producteurs de coton 400 millions de dollars pour la seule campagne 2004-2005, soit environ 200 milliards de FCFA.

Lors des cinq dernières années, ces mêmes subventions ont entraîné un manque à gagner de 400 milliards de FCFA pour le Mali. Un malheur ne venant jamais seul, la chute drastique des cours du dollar n’est pas faite pour arranger la situation.

Le montant des subventions annuelles s’élève à 3-4 milliards de dollars pour les Etats-Unis et à 800-850 millions de dollars pour l’Union Européenne. Les plus grands producteurs européens de coton sont la Grèce et l’Espagne.

La Chine aussi est un grand producteur de l’or blanc. Elle octroie, elle aussi, des subventions à ses producteurs cotonniers, mais, à la différence des Etats-Unis, elle n’exporte pas son coton. Heureusement.

Les coûts de production du coton s’élèvent à 65 cents la livre, alors que cette même livre est vendue sur le marché international à…50-55 cents. Autant dire que le secteur est structurellement déficitaire du fait principalement des subventions.

Si cette tendance fâcheuse n’est pas renversée, c’est la filière cotonnière qui est menacée de mort à brève échéance.

Ce scénario-catastrophe, au demeurant très plausible, s’il venait à se réaliser, s’accompagnera forcément de désastres socio-économiques, avec à la clé des milliers de personnes jetées à la rue. D’où le sursaut des pays africains producteurs de coton.

La dernière initiative en date de la croisade des pays africains cotonculteurs porte sur la création d’un fonds de sauvetage pour la filière coton.

Les quatre pays producteurs de coton de l’Afrique de l’ouest et du centre, le Mali, le Burkina Faso, le Bénin et le Tchad- ont, dès le début de leur initiative, opté pour la stratégie de la négociation.

C’est en vertu de cette position que ces pays ont déposé une soumission sur la table du Directeur Général de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC).
Cette initiative fut fortement appuyée par celle des présidents de ces pays qui sont montés au créneau pour aller défendre le dossier coton africain.

Ce fut le cas du président du Burkina Faso, Blaise Compaoré, qui s’est envolé pour Genève pour plaider le même dossier et du chef de l’Etat malien, Amadou Toumani Touré, qui a fait devant le congrès un vibrant plaidoyer en faveur des millions de cotonculteurs africains.

Cette position, à en croire le ministre Choguel Maïga, est dictée par le réalisme.
Toutefois, la condamnation récente des Etats-Unis par l’OMC, suite à une plainte du Brésil, vient conforter la légitimité du combat des pays africains producteurs de coton.

Après l’échec de la Conférence ministérielle de l’OMC tenue en septembre 2003, l’initiative des pays africains producteurs de coton s’est traduite, à titre principal, par une bataille soutenue tendant à rallier l’opinion internationale à la cause des pays en voie de développement dont, pour certains, au moins 60 % des recettes d’exportation viennent du coton. Grâce à cette lutte opiniâtre, la question du coton est devenue, aujourd’hui, dans l’arène internationale une question majeure.

Ainsi, en perspective de la prochaine Conférence ministérielle de l’OMC, dont les travaux devront se dérouler en décembre 2005 à Hong Kong, ils sont parvenus à consacrer un sous-comité à la question du coton.

Au-delà de la question urgente des subventions, le salut de la filière coton passe par la transformation sur place de notre or blanc.

A ce titre, la valorisation de 25% seulement de notre coton peut permettre au Mali d’engranger l’équivalent des recettes d’exportation de ce produit stratégique.

Plus généralement, pour sortir notre pays de l’ornière, Choguel Maïga préconise une industrialisation soutenue reposant, dans un premier temps, sur trois secteurs-clé comme la transformation du coton, la production du sucre et des fruits et légumes susceptibles de créer des dizaines de milliers d’emplois, tout en rapportant des centaines de milliards de FCFA en termes de valeur ajoutée.

Toutes les conditions sont réunies pour ce faire : les matières premières, le savoir-faire, les marchés colossaux de l’UEMOA et de la CEDEAO.

A titre d’exemple, le marché textile de l’UEMOA, c’est environ 800 milliards de FCFA.

Yaya Sidibé

18 Mars 2005