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La Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (Cemac) a « pris acte » mardi de la ratification fin octobre, par tous les États membres, de l’accord de 2013 sur la libre circulation des personnes dans la sous-région, mettant fin à des négociations laborieuses entamées il y a plus de quinze ans.

Les chefs d’Etat de la Cemac, réunis en sommet extraordinaire à N’Djamena, ont aussi décidé d’« autoriser » la Banque de développement des États d’Afrique centrale (Bdeac) à débloquer 1,7 milliards de francs pour « accompagner l’application de la libre circulation », selon le communiqué final du sommet.

45 ans de débats

La question de la libre circulation est sur la table depuis des années en Afrique centrale : en 1972, l’ancêtre de la Cémac avait déjà acté la libre circulation des personnes, sans qu’elle ne soit appliquée. En 2000, à la création de la Cémac, l’idée d’un « passeport Cémac » avait été avancée puis décidée, mais il n’a jamais vu le jour.

Les négociations sur la libre circulation, laborieuses, ont depuis continué à chaque sommet de la Communauté, mais elles ont longtemps achoppé en raison des refus de la Guinée équatoriale et du Gabon, pays pétroliers peu peuplés et relativement prospères qui craignaient une immigration massive.

Les six pays de la Cémac (Cameroun, Centrafrique, Congo-Brazzaville, Gabon, Guinée Equatoriale, Tchad), dont la monnaie commune est le franc CFA, représentent un marché de 30 millions de consommateurs, dont une grande partie vit dans la pauvreté.

Fin octobre, la Guinée équatoriale, le Gabon, le Congo et la Centrafrique ont finalement entériné la suppression des visas pour les ressortissants de la Cémac.

Le Tchad avait accepté début août de ratifier l’accord. Le Cameroun applique, lui, le principe de « réciprocité », autorisant la libre entrée sur son territoire de ressortissants dont le pays a appliqué l’accord.

Surmonter les craintes

« Il y a des vraies craintes par rapport à cet accord, mais il est du devoir des États de la sous-région de les surmonter », a déclaré Alain-Claude Bilie By Nze, porte-parole du gouvernement gabonais. « Il y a trois éléments majeurs (à respecter dans l’application de cet accord) : la mise en place d’instruments biométriques, la coordination des services de police et de sécurité des Etats de la sous-région et le respect de la réglementation du travail ».

La Guinée équatoriale et le Gabon, qui s’étaient déjà engagés le 17 février à donner leur accord sur la libre circulation des personnes dans la région, avaient déjà conditionné cet accord à la mise en place de pièces d’identité biométriques. Mais l’accord n’a jamais été mis en place au Gabon. La Guinée équatoriale avait fait volte-face peu de temps après.

Fondée en juin 2000 à Malabo, la Cemac réunit des pays aux revenus très différents, et peine à mettre en œuvre des mécanismes d’intégration économique et monétaire. Beaucoup d’accords ont déjà été annoncés par le passé, sans qu’ils ne soient appliqués par la suite (compagnie aérienne commune Air Cemac, passeport commun…)

La libre circulation des personnes et des biens est un enjeu en Afrique alors que le commerce intra-africain reste encore peu développé.

Jeune Afrique du 02 Novembre 2017