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Le Mali continue de célébrer avec magnificence le cinquantenaire de son indépendance. La Commission nationale d’organisation de cet anniversaire a eu de gros sous à sa disposition. Sur le budget consacré à la célébration, beaucoup de chiffres ont été avancés à travers le pays, avec souvent un lot de contestations émanant de citoyens médusés.
Mais, selon le président de la Commission nationale d’organisation du Cinquantenaire, Oumar Hamadoun Dicko, « le budget total du Cinquantenaire est de l’ordre de 6 milliards de F CFA. Le budget d’investissement fait plus de 4 milliards et celui de la commission fait 226 millions de F CFA ».

Le Cinquantenaire a certainement été marqué par la réalisation de certains projets dont l’inauguration a donné lieu à du « m’as-tu-vu ». Des commis de l’Etat, qui ont inventé et baptisé toutes sortes de projets « œuvres du Cinquantenaire » n’ont pas ménagé leurs peines pour séduire le manitou national, ATT. Chaque fois que le chef de l’Etat était invité à inaugurer une réalisation, les observateurs remarquaient que le coût du projet était relégué au second plan, pour, dirait-on, ne pas susciter la colère des Maliens. Parce que parfois les montants annoncés vont au-delà de l’entendement du citoyen lambda.
Un Malien résidant aux Etats-Unis nous a confié à son retour des vacances au pays que « c’est vraiment aberrant de constater que pour des jeux de lumière et des feux d’artifice, certains responsables se jouent de la conscience nationale en parlant des centaines de millions de nos francs ».

Les comptes des projets rendus publics officieusement ne sont pas les seuls à donner froid dans le dos. Les sommes allouées pour l’organisation d’activités dans le cadre du Cinquantenaire peuvent donner lieu à des questionnements. Oumar Hamadoun Dicko note avec satisfaction que « je reçois par jour entre 30 et 40 demandes d’activités à sponsoriser et à accompagner ». Selon des témoignages, toutes les activités sponsorisées par la Commission nationale du Cinquantenaire n’ont pas eu lieu, du moins comme prévues, certaines phases ayant été supprimées.

Connivence des autorités ?
Alors qu’au moment du décaissement, les activités sont prises en compte dans leur plénitude. Une situation qui alimente les suspicions autour de la gestion du budget dévolu à la célébration. Surtout qu’il y a eu déjà des dénonciations de représentants de certaines localités de l’intérieur qui se sont senties superbement ignorées dans le financement des activités.

A en croire un participant à une réunion sur la célébration du Cinquantenaire qui a réuni au siège de l’Agence nationale des collectivités territoriales (Anict) des délégations de plusieurs zones de l’intérieur, la commission, les autorités nationales et des partenaires techniques et financiers, un mandant d’une commune de l’intérieur du pays s’était publiquement offusqués de la mise à l’écart de sa localité à propos de la distribution d’un certain fonds mis à la disposition de la Commission du Cinquantenaire.

Ebahis, certains partenaires à qui l’on demandait leur contribution pour la célébration auraient exigé des explications sur la provenance de ces sous, mais difficile d’aller loin face à des subterfuges.

Il faut toutefois reconnaître que les autorités nationales n’ont pas aidé à mieux cadrer les activités de la Commission du Cinquantenaire et partant à donner plus de lisibilité aux dépenses par elle faites. Comment peut-on investir une commission sans lui signifier la date de la fin de sa mission ? Oumar Hamadoun Dicko affirme que « nous n’avons pas de fin officielle de mandat ».

Si les autorités n’ont pas officiellement indiqué la fin de la mission de la Commission, comment pourrait-on s’attendre à un bilan financier définitif et crédible ? Devrons-nous espérer que le reliquat du budget pour la célébration du Cinquantenaire, s’il y en avait et si les autorités annonçaient la fin des travaux de la Commission, sera reversé dans les caisses du Trésor public ?

Comme méthode préventive, l’ancien ministre des Maliens de l’extérieur et de l’Intégration africaine persiste et signe : « Dans ce pays, c’est la suspicion constante. Avant de dire qu’on a bouffé les sous, nous-mêmes, nous allons clarifier les états financiers ». En tout cas, Victor Hugo soutient que l’avenir est un « fantôme aux mains vides qui promet tout et qui n’a rien ». A méditer.
Ogopémo Ouologuem
(correspondant aux USA)

03.12.10