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Choix des missions

Les premières missions exécutées par le Bureau du Vérificateur Général ont été lancées en juin 2005. Elles ont essentiellement porté sur le deuxième volet des missions assignées au Vérificateur Général par la loi N° 03-030 du 25 août 2003, à savoir, le contrôle de la régularité et de la sincérité des recettes et dépenses publiques. En conséquence, trois catégories de missions de vérification ont été mises en chantier dont une sur la collecte et le reversement de la TVA et taxes assimilées ; une autre sur les droits de douane et taxes rattachées ; une troisième sur les marchés publics. De façon générale, le choix des missions a procédé à une analyse approfondie des statistiques nationales sur les recettes et les dépenses publiques.

En effet, selon les statistiques de 2003 du Fonds Monétaire International sur le Mali, les droits de douane ont représenté en moyenne 52,7 % des recettes budgétaires de l’Etat, contre 17,3 % pour la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Les revenus des droits de douane conjugués à ceux de la TVA constituent donc près de 70 % des recettes budgétaires au Mali. Par ailleurs, les statistiques nationales font ressortir que seulement 10 % des entreprises paient près de 80 % des recettes fiscales de l’Etat. De plus, la fraude et la concurrence déloyale porteraient sur 50 % de l’économie nationale selon l’Organisation Patronale des Industriels (OPI). De son côté, la Banque Mondiale a estimé, pour l’année 2000, à environ 200 milliards de F Cfa le manque à gagner pour l’Etat occasionné par la fraude fiscale sur les importations de marchandises.

Cet état de fait entraîne une situation de grande précarité des entreprises opérant dans le secteur formel et a incité le Vérificateur Général à initier des missions par rapport aux droits de douane et à la TVA. Ce choix se justifie d’autant plus que, de façon générale, tous les acteurs de l’activité économique, aussi bien du secteur privé que du secteur public, s’accordent sur la nécessité de combattre les importations frauduleuses. La mission de vérification de la TVA a concerné quatre entités. Bien que certaines difficultés aient été rencontrées sur le terrain, les travaux effectués ont permis de mettre à jour des manques à gagner d’environ 13 milliards de F Cfa pour l’Etat et ont révélé plusieurs violations du code général des impôts. La mission sur les droits de douane s’est, quant à elle, focalisée sur la vérification des recettes douanières liées aux importations d’hydrocarbures pour l’exercice 2002. Pour cette seule année, les travaux de vérification ont mis en évidence un manque à gagner pour l’Etat de plus de deux milliards et demi de F Cfa au titre des droits et taxes compromis sur les importations d’hydrocarbures, ainsi que de graves dysfonctionnements administratifs. En 2004, les dépenses publiques totales et prêts nets se sont chiffrés à 625,8 milliards de F Cfa, soit 24,8 % du PIB. Les achats publics ayant représenté environ 56 % de ces dépenses constituent une part importante dans les dépenses de l’Etat. Par ailleurs, depuis 1995, le Mali a adopté un Code des marchés publics dans l’optique d’une meilleure maîtrise des achats publics. Toutefois, plusieurs études ont montré l’inefficience du processus de passation des marchés publics. Au delà des procédures qui ne sont pas exemptes de toute critique, la lourdeur administrative constitue un véritable goulot d’étranglement. De surcroît, les procédures de commandes publiques trouvent un écho d’autant plus défavorable auprès du public que les abus des agents de l’Etat sont régulièrement rapportés par les médias. Des efforts importants sont cependant en cours au niveau national et régional visant à une amélioration de cette situation qui occasionne des coûts supplémentaires tant au niveau des administrations que du processus des commandes publiques en termes d’allongement de la durée des marchés. Au plan national, le Ministère de l’Economie et des Finances, sous l’impulsion de certains partenaires au développement, a entrepris une relecture du Code des Marchés Publics. Pour sa part, la Commission de l’UEMOA, en partenariat avec la Banque Mondiale et la Banque Africaine de Développement, a entrepris depuis l’an 2000, un programme régional de réforme des marchés publics dans les huit Etats membres. Aussi, et compte tenu de la rareté des ressources publiques, les marchés publics constituent-ils une autre cible des interventions du Vérificateur Général. Pour la vérification des marchés publics, un échantillon composé des Ministères de l’Agriculture, de l’Education Nationale, de la Santé, de l’Equipement, de même que le Ministère de l’Economie et des Finances (en tant que chargé de la réglementation sur les marchés publics) a été sélectionné. Les travaux effectués en 2005 ont concerné le Ministère de l’Economie et des Finances et celui de l’Agriculture. Ils ont conduit à des révélations importantes en termes de défaillances dans le processus de passation des marchés publics. Des irrégularités graves ont été constatées tant au niveau des procédures d’évaluation des offres et d’attribution des marchés, qu’à celui des contrôles effectués par la Direction Générale des Marchés Publics (DGMP). Outre ces trois grands axes de contrôle que sont la TVA, les droits de douane et les marchés publics, d’autres missions de vérification ont également été initiées suite à des demandes d’assistance formulées par des responsables de structures (cas de la Banque de l’Habitat du Mali) ou des plaintes émanant de citoyens (cas de PYRAMIDION). Entre avril et décembre 2005, le Bureau du Vérificateur Général a reçu au total 60 plaintes. Dans ce domaine, le Bureau s’est assigné comme obligation de donner une suite écrite à chaque correspondance reçue. Les plaintes se répartissent en celles directement prises en charge par le Bureau du Vérificateur Général (22 %), celles traitées et orientées vers des structures plus indiquées (Médiateur de la République, Procureur de la République, autres administrations) compte tenu de la nature spécifique de la plainte (48 %), et celles classées sans suite correspondant notamment à des lettres d’information ou à des demandes insuffisamment motivées (30 %).

La mission de vérification à la BHM a mis en évidence des dysfonctionnements très nombreux et très préjudiciables qui, s’ils ne sont pas résolus dans les meilleurs délais, entraîneraient une cessation de paiement pour cette banque, pourtant si capitale dans la politique de logements du pays. La mission de vérification des conditions d’attribution du marché relatif aux études et au suivi architectural de l’Hôtel du Plan (bâtiment devant abriter les structures du Ministère du Plan et de l’Aménagement du Territoire) a, quant à elle, révélé des irrégularités dans l’attribution dudit marché à la société FAUR et le rôle joué par la Direction Générale des Marchés Publics (DGMP), en violation du code des marchés publics. Enfin, il convient de souligner que dans le cadre des missions générales assignées au Bureau, le volet évaluation des politiques publiques à travers un contrôle de performance, n’a pas été abordé en 2005. Compte tenu de l’importance de ce type de contrôle dans l’amélioration de la gestion des affaires publiques en termes d’économie, d’efficacité et d’efficience, le Vérificateur Général a requis un renforcement de l’expertise du Bureau en la matière avant sa mise en oeuvre. L’organisation du séminaire d’intégration des vérificateurs s’inscrivait en partie dans cet objectif. Au terme des missions, des dossiers concernant les irrégularités constatées ont été transmis au Procureur de la République, conformément aux dispositions de l’article 1 de la loi instituant le Vérificateur Général.

Le présent rapport fait la synthèse des observations et recommandations issues de travaux réalisées, relatives aux domaines suivants :
– Collecte et reversement de la TVA,
– Droits de douane et taxes rattachées sur les hydrocarbures en 2002,
– Marchés publics,
– Banque de l’Habitat du Mali,
– Etude et suivi architectural de l’hôtel du plan,
– Traitement des plaintes.

Ahmadou Traoré

14 juin 2006