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Zoumana Sarré y vend de la viande à un prix inférieur à celui généralement pratiqué sur le marché.

Une véritable aubaine en ces temps de vie chère. Dans ses installations qui respirent encore le neuf le jeune boucher propose le kilogramme de viande avec os à 1400 francs (contre 1500 francs ailleurs). La viande sans os est vendue chez lui à 1600 francs au lieu des 1700 francs qui constituent le prix le plus répandu.

La viande vendue moins cher dans ce kiosque est le produit original d’un partenariat entre l’Association des jeunes bouchers du district de Bamako, le Fonds auto-renouvelable pour l’emploi (FARE), l’Agence pour la promotion de l’emploi des jeunes (APEJ), l’Agence nationale pour la promotion de l’emploi (ANPE), le Programme national d’action pour l’emploi en vue de réduire la pauvreté (PNA/ERP) et le Fonds d’appui pour la formation professionnelle et de l’apprentissage (FAFPA).

Ces différents partenaires se sont engagés dans une initiative se rattachant à la promotion de l’emploi des jeunes.

Aux termes de la convention de partenariat signée entre les différentes parties, le FARE s’engage à garantir pour une année auprès de la société « GALBAL », les prêts accordés aux jeunes bouchers qui ont été installés dans les kiosques. Le Fonds assure aussi le suivi, l’installation et l’exécution de ce projet jusqu’au remboursement des prêts.

Le Programme national d’action pour l’emploi en vue de réduire la pauvreté (PNA/ERP) a, pour sa part, installé les kiosques et équipé les jeunes bouchers bénéficiaires du projet. Les frais de formation de ceux-ci ont été pris en charge par l’APEJ. C’est aussi l’Agence qui va supporter la garantie complémentaire destinée à couvrir les prêts accordés à ces jeunes bouchers. En outre, avec le FARE et à l’Association des jeunes bouchers, elle suit l’opération du début à la fin.

Le projet a débuté en avril dernier et concerne pour le moment une vingtaine de jeunes sélectionnés qui ont subi une formation de 15 jours assurée par le FAFPA. Pour le moment, ils sont dix bouchers à être effectivement installés. Les dix autres sont dans l’attente et commencent à trouver le temps long.

Mais à l’intention de ceux-ci, un responsable du projet prêche un petit peu de patience : la seconde cohorte sera, dit-il, installée avant la fin de ce mois.
Zoumana Sarré, la trentaine passée, fait donc partie de ceux qui ont déjà commencé à exploiter leurs kiosques. Il est aussi le président de l’Association des jeunes bouchers. Zoumana a préféré installer son kiosque à Djicoroni Para où il réside.

Apparemment, les affaires vont très bien pour lui, à en juger par le nombre des clients qui font la queue devant son kiosque. Le jeune boucher écoule sans grande peine son stock de viande tous les jours. « Le client qui tient à se ravitailler chez moi doit se présenter très tôt. Car à midi déjà tout est vendu et je ferme boutique », dit-il, très à l’aise dans son uniforme composé d’une blouse et d’une calotte blanches.


TASSER LES PRIX :
Un autre jeune assure que l’ouverture de son kiosque à Faladiè a été très bien accueillie par les ménages dans ce quartier de la rive droite. Lui non plus n’a aucune difficulté à écouler sa dotation de viande. Idem pour le kiosque de Sébénikoro tenu par Zoumana Dero dit Boua. Les ménagères viennent s’approvisionner à flux tendu et les affaires sont excellentes.

Dans un contexte où chaque franc dépensé pour les besoins alimentaires est compté et recompté, l’opération test menée avec les jeunes bouchers suscite tout naturellement l’intérêt des consommateurs. Et la satisfaction des bénéficiaires du projet qui jouissent en outre d’un cadre de travail plus qu’acceptable.

« Nous allons tout faire pour ne pas décevoir nos partenaires », a promis Sarré qui estime que lui et ses compagnons ont eu de la chance. Parmi ces partenaires, le FARE joue un rôle primordial dans un projet dont la réussite le réjouit. D’autant plus que le démarrage s’était avéré plus laborieux que prévu, ainsi que le révèle le directeur adjoint du Fonds, Soungalo Traoré.

« L’initiative du FARE d’installer certains jeunes bouchers du district de Bamako dans les kiosques a pris forme en 2007, rappelle-t-il, mais le projet ne s’est concrétisé que cette année.

L’objectif global étant d’organiser de manière plus formelle la profession boucher. Pour le moment, le FARE s’est limité à installer 20 jeunes bouchers. Si ces derniers parviennent à honorer leurs engagements, nous allons étendre notre opération à d’autres jeunes dans le District, et pourquoi pas ailleurs« .

Le responsable du FARE a tout particulièrement insisté sur la qualité des installations où sont établis les bouchers. Et aussi sur les conditions de parfaite hygiène dans lesquelles se déroule la vente de viande.
Soungalo Traoré sait de quoi il parle lorsqu’il évoque la période d’observation à respecter avant de tirer des conclusions définitives.

Il faut en effet se souvenir qu’en 1995 où l’ASCOMA (Association des consommateurs du Mali) et l’OMBEVI (Office malien du bétail et de la viande) avaient engagé une opération similaire. Celle-ci était destinée à casser la spirale spéculative dans laquelle était aspiré le prix de la viande après la dévaluation du franc CFA intervenue quelques mois plus tôt.

Une quinzaine de boucheries modernes tenues par une trentaine de jeunes diplômés formés pour la circonstance, avaient été installées dans toutes les communes du District, certaines de ces dernières en accueillant deux ou trois. La concurrence introduite par ces jeunes bouchers et leurs installations coquettes et salubres devaient non seulement contribuer à tasser les prix, mais aussi à inciter les bouchers traditionnels à améliorer leurs étals en observant de manière plus stricte les règles d’hygiène.

Cette opération aurait-elle pu réussir ? On ne le saura jamais. Car le combat pour une autre boucherie cessera faute de combattants. Quelques mois seulement après que ces kiosques aient été mis en service, plus de la moitié d’entre eux ont été fermés pour cause de désertion massive des « bouchers témoins« .

Les jeunes avaient délaissé couteaux et tabliers pour des horizons qu’ils supposaient plus prometteurs et qu’ils croyaient socialement plus valorisants. Espérons que cette fois-ci, ce genre de chimère épargnera le projet. Et que les bénéficiaires s’adapteront durablement à une activité qui leur offre un vrai avenir.

M. KEITA et

Hawa J. KEITA

16 Mai 2008