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Le métier d’aide ménagère est une activité génératrice de revenus dans la mesure où il permet à celles qui l’exercent de tirer leur épingle du jeu à travers la constitution de leurs trousseaux de mariage. C’est la raison pour laquelle des filles à la recherche d’un mieux-être quittent leurs parents pour la grande ville où tout n’est pas pourtant rose.

Elles viennent chercher de quoi se payer leurs trousseaux, préparer leurs mariages et retourner au village afin d’aider leurs parents dans les travaux champêtres en période hivernale. Ces filles rurales plus connues sous l’appellation « bonne ou 52 » sont devenues aujourd’hui dans la capitale des piliers surtout dans les foyers mal entretenus par les épouses trop occupées par leurs charges multiples.

En examinant la présence de ces aides ménagères en ville, Boubacar Camara, sociologue, affirme « qu’il encourage les filles rurales qui viennent travailler en ville ». « C’est vrai qu’officiellement c’est pour se payer les trousseaux, c’est-à-dire les ustensiles de cuisine et autres. Mais à y regarder de près la pauvreté du monde rural est pour beaucoup dans cet exode », explique-t-il.

Cette pauvreté, poursuit notre interlocuteur, ne permet plus aux parents de faire face à certaines exigences, entre autres, comme par exemple doter correctement la fille au moment de son mariage parce que la dot réclamée généralement au village est différente de celle de la ville, c’est-à-dire purement symbolique.

« De plus, la mère est privée de cette dot. C’est pourquoi elle va demander à son enfant d’aller s’engager comme aide ménagère en ville en vue d’économiser et de préparer son mariage. Le monde rural est un monde infernal où les conditions de vie ne permettent pas aux mères de faire face aux unions de leurs enfants ».

Sevrées de droits des femmes

Issues généralement de la campagne, les aides ménagères ont différentes motivations. Les plus jeunes sont soucieuses de leurs trousseaux de mariage. Les plus âgées, divorcées ou veuves se préoccupent du renouvellement de leur vie sociale ou se réfugient en ville. Mais dans leur quête effrénée de bien-être matériel, les « servantes » subissent les pires servitudes.

Selon le sociologue Camara, elles sont bonnes à tout faire. Elles se réveillent avec le chant du coq pour se coucher tard la nuit. Aides ménagères, le terme « bonne » n’est qu’un euphémisme pour atténuer un phénomène indigne aujourd’hui, ajoute-t-il.

La soif de « bonne » est un pur snobisme chez des citadines. « Mêmes celles qui peuvent tenir leurs foyers sans aides ménagères recourent aux bonnes, parce que c’est du pur esclavagisme. Certaines femmes se révèlent incapables de gérer leurs foyers sans aide ménagère.

Avec le coût actuel de la vie, il y a des familles qui en embauchent jusqu’à deux quand bien même elles ne peuvent pas les payer. Généralement, au moment où ces pauvres filles s’apprêtent à rentrer chez elles, leurs employeurs inventent tout un tas de prétextes pour ne pas payer leurs salaires. Aujourd’hui sans elles, rien ne va dans les familles. C’est imaginable ça ! » témoigne le sociologue.

Pour un salaire de 6000 à 7500 F CFA par mois, des « bonnes » sont victimes de fausses accusations, d’injures, de violences de la part de certains employeurs. La question « bonne », aux dires de notre sociologue, mérite d’être examinée dans la mesure où il existe déjà des structures pour les aider.

Dans l’Afrique traditionnelle, on épousait une femme pour qu’elle puisse faire face aux exigences du foyer. Malheureusement, de nos jours, pour des raisons difficiles à cerner, des Bamakoises renoncent à toute vie de femme au foyer. Mais ne serait-ce qu’au regard des tâches dures qu’elles accomplissent, les servantes, sans doute, méritent plus de respect et de bonnes conditions de travail.


Assitan Haïdara


La vulnérabilité au féminin

On les appelle domestiques, servantes ou couramment « bonnes », les petites mains des aides ménagères sont aujourd’hui devenues indispensables, voire incontournables tant dans la bonne tenue des ménages de Bamako et des villes maliennes.

Mais si dans certaines maisons – rares – elles vivent ou presque comme des enfants adoptives de la famille et bénéficient de conditions de travail et de vie assez décentes, force est de reconnaître que, pour la majorité, Bamako est un calvaire, voire un enfer où leur vécu n’est pas loin de celui des esclaves domestiques des temps anciens.

La plupart arrivent à Bamako sans adresse. Et sont très vulnérables, elles tombent entre les mains de patronnes, qui, malgré leurs rôles d’ouvrières infatigables de la maison, les maltraitent comme si elles n’étaient pas des êtres humains. Elles deviennent ainsi les souffre-douleur de toute la famille. Enfants, adultes, tous s’acharnent sur elles. Et dans cette désorganisation, le moindre soupçon suffit pour qu’elles soient frappées d’opprobre et jetées à la porte.

Le nombre de ses aides ménagères est ignoré par la population, parce que peu de travaux de recherche ont été faits à leur sujet.

Nous parlons des cas de nos aides ménagères, communément appelées « bonnes ». Elles sont dans la plupart des familles à Bamako. Elles viennent généralement de la campagne et sont de deux catégories : celles entre les 14 et 25 ans viennent chercher leurs trousseaux de mariage, celles de 27 à 40 ans sont divorcées ou veuves et viennent à la ville avec le rêve d’y trouver un peu de répit.

Elles sont embauchées pour aider les épouses « maîtresses » de maison. Mais ce que certaines d’entre elles subissent n’est que de la pure servitude. Elles sont « bonnes à tout faire ». Elles se réveillent avec le champ du coq pour se coucher tard dans la nuit.

Sètè Traoré

23 Juillet 2008