3 – L’aide sert à qui ? Eux ou nous ?
Croyez-moi le secteur du BTP est aussi stratégique qu’une armée nationale. Il mérite de garder toute sa souveraineté afin de générer une éclosion des compétences locales ainsi qu’un développement national.
Pourvoyeur d’emplois et de multiples valeurs ajoutées le secteur du BTP, fortement maîtrisé et approprié, apporte un épanouissement certain à notre économie de notre état, un de ceux qui gardent le peloton de queue de la liste des pays les moins avancés du monde.
Aveu de partenaires au développement
A la fin des années 80, une crise aiguë d’emplois de jeunes diplômés a sévit au Mali. Les autorités d’alors, à la recherche d’alternatives pour les mettre au travail, ont souscrit au programme AGETIPE. Initié sous la 2ème république, ce vaste espoir national n’a commencé ses premiers travaux qu’avec l’avènement de la transition démocratique en 1991.
Ainsi, la Banque mondiale prétendait créer des emplois pérennes, valoriser les compétences nationales, faire émerger une nouvelle race d’entrepreneurs nationaux, et surtout permettre la création d’une valeur ajoutée nationale ; même si cela devait passer par le fractionnement des chantiers colossaux.
Un plafond des marchés avait même été fixé dans l’espoir de permettre l’accès à plusieurs compétences locales. L’accent avait été mis aussi sur le groupement ou le partenariat dans les marchés pour lesquels des compétences étrangères étaient indispensables, avec obligation de transfert de technologie.
Trop beau c’était …
Bien sûr, qu’il fallait s’attendre à de sérieuses et lourdes embûches, telles :
– Le niveau élevé des cautions de soumission aux appels d’offres : la fragile situation technique et financière des entrepreneurs ne leur permettait de prendre en charge que les travaux de moindre envergure. Encore fallait-il avoir les moyens adéquats de participer efficacement à une consultation.
– Le manque de personnel hautement qualifié capable, et de moyens techniques comme des équipements de routine, indispensables à un programme de construction d’infrastructures routières, tels le bulldozer, la niveleuse, le compacteur, le camion citerne … , font cruellement défaut sur le territoire national.
Problème de financement ou d’organisation, allez-y savoir !?
– L’absence de couverture appropriée de sinistres ou risques éventuels : face aux instabilités politiques de nos états et à la précarité des ressources de nos compatriotes, les sociétés d’assurance et de réassurance rechignent, et à juste titre, à accompagner nos entreprises locales dans leur aventure, si je puis m’exprimer ainsi.
– L’insuffisance de la lutte contre les trafics d’influence : obstacles omniprésents et invisibles, le clientélisme, le copinage et la corruption continuent de connaître un bon hivernage. Que faire du choix des Hauts Responsables (suivez ma pensée, mon regard et mon doigt !), n’est-il pas très souvent lié à des règles que je me garderais ici de nommer.
Pourquoi se fatiguer ?
Est-il d’ailleurs utile d’égrener ces multiples maux, constamment dénoncés mais jamais éradiqués ? D’ailleurs, ne constituent-il pas des règles de conduite et des états d’esprit ancrés depuis fort longtemps dans nos mœurs.
Qui ignore le taux pour accéder à un marché public important ?
Le qualificatif » dessous de table » sied t-il toujours quand la table est en vitre claire sans aucune teinte ? Tire t-on toujours satisfaction de sa » sueur » (salaire ou traitement mensuel) ou doit-on se glorifier plutôt des multiples pots de vins ou de pots de » dableni (en langue bamanan) ou bissap » religion et croyance musulmane obligeant ?
A proprement parler : l’aide sert à qui ?
La remarque générale est, que beaucoup d’entreprises étrangères raflent les marchés au Mali au détriment des nationales. Celle-ci ne s’arrête pas là seulement : des entreprises européennes réalisent des travaux financés par l’Europe, des groupes chinois ont le premier rôle si le financement est chinois, et ainsi de suite.
Alors si ceci est la règle consacrée, alors pourquoi les financements africains ne profitent t-ils pas exclusivement aux africains seulement, surtout si ce sont des dettes dont le remboursement incombera à nos pays ?
Est-ce, se tromper que d’avouer que l’aide reste liée en matière de grands travaux ? Alors, l’aide » aide » t’elle d’abord celui qui aide ? C’est-à-dire eux ou nous ? Merci de m’aider à trouver la réponse !
(à suivre)
13/12/2005
Cheich Abd El Kader, architecte
–abdelkader@afribone.net.ml
–abdelkader@Koulikoro.net